Peut-on dire que les lucioles sont plus nombreuses cette année au Québec? Chercheuse en entomologie à l’Université de Montréal, Flavie Leblanc répond à cette question en nuance. D’une part, elle souligne qu’aucun recensement des populations de lucioles n’a été réalisé récemment au Québec.
«On ne peut pas confirmer qu’il y en a plus. Par contre, on les observe plus. Elles sont plus actives. Il faut savoir que les grandes périodes de chaleur, les pluies et l’humidité encouragent l’activité des insectes. Les lucioles, comme tout insecte, sortent pour se nourrir et se reproduire lorsqu’il fait plus chaud et humide», explique l’étudiante en Sciences biologiques.
Il existe 19 types de lucioles au Québec et un peu plus de 170 au Canada et aux États-Unis. Sur le globe, on dénombre plus de 2000 espèces différentes. Les lucioles peuvent vivre le jour ou la nuit. Certaines s’illuminent, d’autres non. Chez différentes variétés, les femelles n’ont pas d’ailes, ou elles sont très courtes.
Sa transformation
Les lucioles (Lampyridae) sont des coléoptères, au même titre que les longicornes, les scarabées ou les coccinelles. Elles vivent une métamorphose complète. Comme un papillon en quelque sorte.
«Lors des nuits chaudes, les mâles cherchent les femelles. Ils s’accouplent. Le mâle meurt peu de temps après et la femelle survit jusqu’à la ponte», poursuit Flavie Leblanc.
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/YWWQRJWIBNBS5BXOKJHQPBEDMM.jpg)
Les lucioles vivent surtout dans les milieux humides, notamment dans les tourbières, les marais et près des lacs. Les femelles pondent leurs œufs dans la végétation. Dépendamment de l’espèce et de la météo, ceux-ci prennent quelques jours à éclore. Une fois nées, les larves peuvent rester dans leur état pendant plusieurs mois (jusqu’à deux ans). Au Québec, elles hivernent au chaud sous la terre.
«La larve ressemble à une petite chenille avec des écailles. On la voit très rarement. Elle se nourrit principalement de petits vers, d’escargots et de limaces. En somme, de petites proies invertébrées à corps mou», indique la chercheuse.
Puis, vient la dernière nuit, celle de la transformation. La larve atteint un stade immobile, appelé la nymphe, l’équivalent de la chrysalide du papillon. Finalement, elle devient adulte et s’envole vers d’autres cieux à la recherche d’un partenaire. «L’objectif de l’adulte est surtout la reproduction», ajoute Mme Leblanc.
Sa lumière
Les lucioles ne naissent pas avec une ampoule dans le corps. Physiquement, la luminescence s’explique par une réaction chimique provenant des deux derniers segments de l’abdomen de l’insecte. Autant les mâles que les femelles font de la bioluminescence. Les œufs et les larves également.
«Le corps de l’adulte est recouvert de petits trous, des trachées. N’ayant pas de poumons comme nous, il s’agit de son système respiratoire. L’oxygène se rend jusqu’au bout de son abdomen. Là-dedans, il y a une enzyme, la luciférase, et une protéine, la luciférine. Celles-ci, mélangées à l’oxygène, créent la luminescence», résume l’experte.
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/Y25AN4IUENBLJHDQJZZYFGBRD4.jpg)
Parmi les 19 espèces de lucioles répertoriées au Québec, seulement 13 émettent des signes lumineux. Chacune d’elles affiche des signaux différents. La répétition, l’intensité et la forme du point lumineux diffèrent. Ainsi, une femelle et un mâle peuvent se reconnaitre en prévision de l’accouplement.
«Les femelles, qu’elles aient des ailes ou non, restent au sol la plupart du temps. Elles regardent au ciel pour chercher leur partenaire. Le mâle vole et émet des signes lumineux. Lorsqu’une femelle l’aperçoit, elle lui répond avec une lumière similaire», note Flavie Leblanc.
Femme fatale, la Photuris ne manque pas d’ingéniosité pour trouver ce qu’elle veut. La femelle peut imiter le signal lumineux d’une autre espèce de luciole. Ses intentions ne concernent toutefois pas l’accouplement.
«Lorsque le mâle reconnait le signal, en se posant, la femelle le bouffe».
Son utilité
Comme d’autres insectes, les lucioles sont très utiles à la biodiversité. Ces petits prédateurs mangent les espèces nuisibles, notamment dans les champs, et contrôlent les populations envahissantes ou parasitaires.
La luciole est toutefois en danger, indique Flavie Leblanc. Certaines études mentionnent un déclin des populations. L’utilisation des pesticides en agriculture, la pollution lumineuse et générale, l’imprévisibilité des conditions météorologiques et la destruction des milieux humides semblent en cause.
«Certaines utilisent la lumière de la lune pour se repérer. En voyant un lampadaire, elles se perdent. Et la pollution lumineuse rend la communication plus difficile pour les lucioles», conclut la jeune femme.