L’été meurtrier

Le mois de juillet aura été le mois le plus chaud jamais connu. Sur la photo, des incendies encerclant Palerme, en Sicile, ont forcé de nombreuses évacuations.

ÉDITORIAL / La nouvelle est tombée jeudi comme une marmite d’eau bouillante sur nos têtes: selon le Service Copernicus concernant le changement climatique (C3S), l’organisme de l’Union européenne qui surveille le réchauffement de la planète, ainsi que l’Organisation météorologique mondiale, institution des Nations unies, le mois de juillet qui se terminera lundi aura été le mois le plus chaud jamais connu.


Le plus chaud de l’Histoire, le plus chaud depuis que les humains sont sur Terre.

Les spécialistes ont insisté.



La planète ne passe pas un bel été.

Les dernières images affolantes sont arrivées d’Italie cette semaine, où le pays est divisé entre des incendies meurtriers dans le sud et des intempéries qui ont aussi fait deux morts dans le nord, dont une adolescente en camping écrasée par un arbre. Dans la région de Venise, des grêlons ont fait d’importants dommages et en Lombardie certains étaient si gros et si violemment projetés qu’un avion venant de décoller de Milan a été endommagé et forcé à atterrir d’urgence.

En Sicile, les incendies encerclant Palerme ont forcé des évacuations, une église datant du 15e siècle, joyau historique, a été rasée et trois personnes âgées ont péri, deux dans les flammes de leur maison et une troisième, car elle n’a pas pu recevoir des soins médicaux d’urgence, vu les chemins fermés par les flammes.

L’enfer de Dante, version 2023.



Au Canada aussi on y goûte.

Selon les données les plus récentes — au moment d’aller sous presse — du Centre interservices des feux de forêt du Canada, quelque 4823 incendies ont fait rage depuis le début de 2023 et 1004 sont encore actifs dont 620 hors contrôle, et tout cela a brûlé 12,3 millions d’hectares de forêts, broussailles et compagnie.

Notre air est pollué par tout cela, bien sûr.

Et aussi ici, la chaleur sèche qui cause les flammes survient en parallèle avec des intempéries violentes et leurs conséquences : de la grêle qui abime les récoltes, des lacs et rivières qui débordent, des tornades qui causent d’importants dommages matériels.

••••

Mercredi, le premier ministre Justin Trudeau a procédé à un important remaniement au sein de son cabinet, pour mettre en place la meilleure équipe possible, a-t-il dit, afin d’affronter les tempêtes actuelles.

L’inflation alimentaire, les taux d’intérêt élevés, la perspective d’un ralentissement économique mondial, la montée de l’autoritarisme, la guerre en Ukraine, les changements climatiques font partie des grands défis qui se posent, a-t-il expliqué en substance.



Il y a l’augmentation de l’itinérance aussi.

Et voilà effectivement d’immenses problèmes à gérer.

Mais n’y a-t-il pas des évidences bien concrètes, bien palpables, qui nous disent en cette fin de juillet brûlant, que la crise climatique devrait prendre une place prioritaire à l’ordre du jour de tous.

Pour stopper au plus vite l’accélération du phénomène.

Et pour préparer tout le monde aux conséquences, même à très court terme.

Tout doit être revu avec les lunettes des changements climatiques pour mieux planifier l’avenir, mais aussi pour prévenir le pire, demain.

De l’entretien des arbres — en cas d’intempéries violentes, ils peuvent tuer — jusqu’à la construction de nouvelles digues contre les eaux qui montent, en passant par une nouvelle attitude de prévention face aux maladies causées ou aggravées par la mauvaise qualité de l’air, tout doit être analysé. L’inflation alimentaire? C’est avec les agriculteurs qu’il faut aussi s’assoir. «Si la tendance se maintient, pouvez-vous continuer à produire vos fruits et légumes, vos grains, vos viandes?

Et vos méthodes? Aident-elles à lutter contre les gaz à effet de serre ou l’inverse?»



Transports, santé, éducation… Doit-on apprendre aux enfants à l’école, dès maintenant, comment réagir face aux événements climatiques extrêmes comme on leur apprend, dans les pays ou régions à risques, comment se protéger quand il y a des tremblements de terre?

La foudre, le vent qui fait tomber toutes sortes de choses, l’eau qui monte, la grêle…

Doit-on développer de nouveaux protocoles à leur enseigner?

Doit-on aussi redoubler les programmes de prévention des incendies?

Savons-nous tous suffisamment, toute la population, à quel point la moindre étincelle peut transformer en brasier un terrain très sec?

Les lois doivent-elles être resserrées pour obliger de la climatisation vraiment efficace dans certains lieux, notamment où vivent les personnes âgées. Nos installations sont-elles à jour?

L’allure des climatiseurs dans certaines résidences nous laisse en douter.

La préparation, c’est aussi la conscientisation.

Nous tardons tous à changer nos habitudes de vie pour diminuer notre empreinte carbonique.

Nous avons l’impression que ça ne changera pas grand-chose à l’avenir du monde, à côté des grands pollueurs industriels.



Et ce n’est effectivement pas uniquement aux citoyens, comme individus, de faire leur part.

Le gouvernement doit jouer un rôle de leader à cet égard.

Mobiliser les entreprises comme les individus.

Il faut dire qu’il le fait déjà, que ça n’a rien de nouveau, qu’il y a plein de programmes et de démarches en place.

Ce n’est pas assez.

Greta Thunberg a raison depuis le début.

Il faut plus.

Il faut monter le volume beaucoup fort pour qu’on entende parler de cette mobilisation essentielle partout, tout le temps.

Ça chauffe.