Chronique|

Futur hôpital en Outaouais: d’une promesse à l’autre

Le gouvernement Legault a arrêté son choix sur un vaste terrain de la rue d’Edmonton, dans le secteur Hull, en juin 2022. Il semble toutefois que Québec branle dans le manche non seulement en raison de l’ampleur des coûts, mais aussi des délais liés aux expropriations.

CHRONIQUE / Ne me dites pas qu’on va se retaper la discussion sur l’emplacement du futur hôpital régional à Gatineau!


Après un débat acrimonieux, le gouvernement Legault a arrêté son choix sur un vaste terrain de la rue d’Edmonton, dans le secteur Hull, en juin 2022. Ce terrain faisait consensus dans la communauté qui voulait installer le futur hôpital au centre-ville de Gatineau.

Sauf qu’entre-temps, les coûts estimés de l’hôpital régional ont bondi de 2,5 à plus de 4 milliards. Il semble que Québec branle dans le manche non seulement en raison de l’ampleur des coûts, mais aussi des délais liés aux expropriations.

Si bien qu’aujourd’hui, lorsqu’on demande au ministre de la Santé, Christian Dubé, si le terrain de la rue d’Edmonton est toujours le premier choix du gouvernement, il refuse de répondre par un oui clair et net. Il se réfugie dans des faux-fuyants qui alimentent les rumeurs. Dont celle voulant que le gouvernement revienne à son idée originale de bâtir le futur hôpital dans les Hautes-Plaines, en bordure de l’autoroute 5. Sur un terrain excentré, loin du centre-ville, loin du transport en commun, loin de tout…

Si ce scénario devait se confirmer, attendez-vous à ce que la coalition de gens d’affaires, de politiciens et d’organismes communautaires qui militaient pour un hôpital au centre-ville ressorte ses pancartes.

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Cette valse-hésitation du gouvernement Legault est d’autant plus incompréhensible qu’il sait depuis le début que le choix du terrain sur d’Edmonton coûtera quelques centaines de millions de plus en raison des expropriations.

Au moment d’annoncer le choix du site, en juin 2022, ces coûts supplémentaires ne semblaient poser aucun problème. Québec était prêt à payer les coûts d’extra. Un hôpital au centre-ville coûtait plus cher, mais c’était le prix à payer pour un aménagement plus durable du territoire.

Qu’est-ce qui a changé en un peu plus d’un an pour que Québec hésite? Les coûts de construction survoltés par l’inflation? Les difficultés économiques du Québec? La complexité liée au déménagement du quartier général de la police de Gatineau situé sur les terrains pressentis pour le futur hôpital?

Va savoir.

À moins que la pression vienne du milieu de la santé lui-même. La communauté médicale réclame un nouvel hôpital le plus vite possible, et l’aménagement durable du territoire arrive bien après la nécessité de soigner convenablement des patients dans sa liste de priorité.

D’ailleurs, le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens du CISSSO ne mâche plus ses mots pour décrire la situation du réseau de la santé. Son président, le Dr Tinouch Haghighat, parle d’hôpitaux «en voie de désagrégation», d’une population pénalisée de «façon discriminatoire» et «privée de soins adéquats»…

Mais ce discours teinté par l’urgence d’agir, il existait il y a un an aussi. Ce n’est pas d’hier que les hôpitaux manquent de main-d’œuvre, que les blocs opératoires tournent au ralenti, que les urgences ferment de manière temporaire faute de personnel…

Tout cela le gouvernement Legault le savait au moment d’annoncer le choix de la rue Edmonton.

À moins que ce ne soit la concurrence de l’Ontario qui mette un surplus de pression? De l’autre côté de la rivière, l’ouverture du nouveau campus Civic de l’Hôpital d’Ottawa est toujours prévue pour 2028-2029. Il donnera à l’Ontario un argument de plus pour attirer des infirmières québécoises de son bord…

Petit rappel en terminant: la promesse originale du gouvernement Legault était de construire un nouvel hôpital de 170 lits prêts à soigner des patients dès 2023. Cette promesse s’est transformée en cours de route pour un nouvel hôpital régional de 600 lits (gain net de 240 lits) avec ouverture en 2032. Fort bien.

Maintenant, est-ce qu’on s’apprête à assister à une autre surenchère de promesse? Est-ce que pour justifier de nouveaux délais, on va nous promettre un hôpital encore plus beau, encore plus gros? Ce sera quoi cette fois-ci? Un nouvel hôpital de 800 lits en 2052? J’ai hâte de savoir.