«Des trous partout» dans les services du CISSSO, dénoncent les grévistes du front commun

Des syndiqués du Front commun manifestaient mardi devant le centre de réadaptation La RessourSe, dans le secteur Hull.

Il y a ici une «désillusion», là-bas le constat qu’«il y a des trous partout» dans les services. D’un piquet de grève à l’autre, les doléances diffèrent parfois, mais elles se rejoignent toutes sur un point: celui des conditions de travail jugées inadéquates par les travailleurs de la santé de l’Outaouais.


Pour une troisième fois en deux semaines, les syndiqués du front commun intersyndical ont débrayé, mardi. Cette semaine, dans le réseau de la santé, les membres de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et de la Confédération des syndicats nationaux sont en grève trois jours, de mardi à jeudi.

Les infirmières, infirmières auxiliaires et inhalothérapeutes du Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais seront pour leur part en grève jeudi et vendredi.

Devant plusieurs installations du CISSSO, à diverses intersections ou le long de grandes artères, les affiches du front commun étaient nombreuses dans les rues de la région, mardi, alors que le débrayage touche autant le réseau de la santé que celui de l’éducation.

«Indignation»

«L’indignation n’est pas disparue, a constaté Christine Prégent, représentante nationale de l’APTS pour l’Outaouais. […] On fait face à un mur avec un gouvernement qui est complètement fermé.»

L’arrivée d’un conciliateur à la table de négociation fait germer un certain espoir pour le front commun, affirme Mme Prégent, «ne serait-ce que pour reprendre le dialogue» avec le gouvernement.

À deux pas du Centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) d’Aylmer, Janie-Pier Pelletier manifestait dans le froid, un café à la main.

L’éducatrice spécialisée a commencé son emploi au CHSLD il y a trois ans et demi. Elle réalise aujourd’hui que son environnement de travail est une désillusion par rapport à l’idée qu’elle s’en faisait pendant ses études.

Mme Pelletier voudrait travailler à temps plein. Après avoir été un certain temps contrainte à un horaire de trois jours, elle a pu obtenir une quatrième journée. Mais elle n’a toujours pas accès au temps plein. Même si les besoins sont grands pour les 75 résidents du CHSLD, dit-elle.

L’éducatrice spécialisée affirme aussi ressentir la surcharge de travail de ses collègues. Les activités qu’elle planifie pour les résidents «tombent tout le temps à l’eau», faute de ressources pour s’en occuper.

Au bout, ce sont les résidents qui se retrouvent à vivre un «déconditionnement», déplore Janie-Pier Pelletier, qui n’écarte pas la possibilité de quitter le réseau.

La «surcharge» dénoncée

Dans le secteur Hull, en bordure du boulevard Saint-Raymond, Anick Thilie manifestait pour soutenir ses collègues. Retraitée de l’Hôpital de Hull depuis l’été 2021, la préposée aux bénéficiaires donne encore un coup de pouce au réseau.

Partout autour d’elle, Mme Thilie dit voir que «la surcharge est plus lourde» que lorsqu’elle a commencé sa carrière, au début des années 1980. Des collègues partis pour avoir de meilleures conditions de travail, elle en a vu des tonnes au fil des décennies.

«Le monde quitte […] le Québec pour s’en aller juste à côté en Ontario», déplore-t-elle.

Camille Pellerin-Forget, physiothérapeute à La RessourSe, a fait un clin d'oeil à la pièce «En berne» des Cowboys Fringants sur son affiche de gréviste.

Physiothérapeute en réadaptation pédiatrique à La RessourSe, Camille Pellerin-Forget considère que les postes vacants se font de plus en plus pesants sur les épaules des travailleurs.

Ancienne candidate du Parti québécois dans Hull, la physiothérapeute note que «tout le monde met la main à la pâte» pour tenter de diminuer les listes d’attente, ce que soit avec des heures supplémentaires ou avec une plus grosse charge de travail. «Mais à quel prix? C’est un peu ça qu’il faut se poser comme question», dit-elle.

Au niveau salarial, Mme Pelletin-Forget pourrait toucher environ 20 000$ de plus par année si elle traversait en Ontario. Elle désire continuer de travailler au Québec, mais «tant qu’on n’aura pas un réseau qui va être confortable dans lequel travailler, les trous de services vont s’agrandir, craint-elle. […] Il y a des trous partout.»