L’école Côte-du-Nord, dans le secteur Hull, a adopté cette façon de faire pendant la crise de la COVID-19 en raison notamment de la configuration de l’école, puisque les salles de toilettes des garçons et des filles étaient situées chacune à une extrémité du bâtiment. Le temps a passé depuis et l’équipe-école a choisi de conserver le concept qui est à la source d’un débat de société, notamment avec toute la question d’identité de genre.
Tous les autres centres de services scolaires de la région confirment qu’ils n’ont aucun bloc sanitaire mixte. Il s’agirait donc du seul établissement scolaire à fonctionner ainsi, même si la décision n’a pas été prise dans le cadre de débats sur l’identité de genre, précise le Centre de services scolaire des Portages-de-l’Outaouais (CSSPO).
«Les toilettes de l’École Côte-du-Nord sont mixtes depuis la pandémie pour une question de logistique », explique le CSSPO. « Étant donné que les toilettes des filles et les toilettes des garçons sont situées aux deux extrémités de l’école, pendant la pandémie, l’école a rendu les toilettes mixtes afin de faciliter la surveillance, Comme ce changement a non seulement facilité la surveillance, mais également les déplacements dans l’école, dû à la proximité des toilettes pour tous et toutes, ils ont maintenu le tout tel quel. Il n’y a pas eu de plaintes en lien avec cette situation.»
Ni la direction générale de l’organisation ni la direction de l’école ont souhaité commenté davantage la question sur la place publique.
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Signe que leurs enfants n’en avaient pas fait un cas, des parents rencontrés par Le Droit aux abords de l’école dans les derniers jours n’avaient même pas été informés par ces derniers que ce concept était établi dans leur école depuis belle lurette.
«Ça ne me dérange pas, je n’y vois pas d’enjeu. C’est une question d’habitude. Socialement, nous ne sommes pas habitués mais je pense que tout simplement, ça va venir avec le temps. Ça ne cause pas problème du tout», a lancé Mylène, maman d’une fillette.
Quelques mètres plus loin, une maman d’un élève de deuxième année a abondé dans le même sens.
«On n’a pas de problème avec ça. C’est bien géré, qu’ils fassent ce qu’ils veulent, c’est ça la réalité maintenant, c’est correct», s’est-elle exclamé.
Un père de famille qui venait reconduire ses enfants à deux coins de rue ignorait lui aussi qu’on avait opté pour cette alternative pour se faciliter la tâche à l’école et estime lui aussi qu’il n’y a rien à redire sur le sujet.
«Il n’y a aucun problème, au contraire justement des fois les (salle de) toilettes des gars peuvent être pleines et celles des filles vides, ou vice-versa, alors de cette façon-là au lieu de faire attendre les enfants, tout le monde peut y aller n’importe quand, à la cabine qui est disponible», explique-t-il.
Sur la question plus large des toilettes mixtes dans les écoles, ce parent est d’avis qu’il n’y a aucun débat à avoir.
«Les enfants ne m’en ont même jamais parlé, ni même mentionné quoi que ce soit, alors ça ne doit pas les déranger du tout. Personnellement, je pense la même chose. Je trouve ça très bien », plaide David. «Justement, nous sommes allés dans un centre commercial en fin de semaine et il y avait des toilettes mixtes. Les enfants me demandaient lesquelles étaient pour gars ou filles, et je leur ai dit, ah, c’est cool, c’est mixte. Il y avait des cabines d’un côté, des urinoirs de l’autre et une section à aire ouverte avec les lavabos. Ils n’ont même pas posé de questions, ils ont fait ce qu’ils avaient à faire, pour eux c’était juste normal.»
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À la mi-septembre, quand le projet d’une école secondaire de l’Abitibi-Témiscamingue d’aménager un bloc sanitaire mixte a fait les manchettes, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a annoncé que Québec fermait pour l’instant la porte aux salles de toilettes communes sans genre dans les établissements scolaires. Il avait entre autres invoqué l’intimité et le respect dont les jeunes ont besoin.
Pour la mère de trois filles – dont deux fréquentent cette école – et conseillère municipale de ce quartier, Isabelle N. Miron, qui salue cette initiative, il devrait y avoir consensus sur cette question.
«Selon moi, c’est un faux débat, qui passe à côté des enjeux. On s’acharne sur les toilettes alors qu’on devrait plutôt se questionner sur comment faire pour que les jeunes, quelque soit leur identité de genre, se sentent ben accueillis dans les écoles», martèle-t-elle, ajoutant être consciente qu’il y a plusieurs priorités en éducation, mais que dans un monde idéal, les établissements scolaires seraient tous climatisés et dotés de toilettes non genrées.
Elle n’hésite d’ailleurs pas à commenter les propos du ministre Drainville qui a affirmé il y a quelques semaines que des filles qui ont leurs premières menstruations pourraient être mal à l’aise ou être confrontées à des moqueries de la part des garçons.
«Franchement, j’espère qu’on va éduquer nos garçons à voir ça comme un phénomène extrêmement normal et naturel », lance Mme N. Miron. « Les gars qui se moquent de ça vont de toute façon le faire à l’extérieur des toilettes ou dans les corridors. Moi, j’enseigne à mes filles qu’elles n’ont pas affaire à avoir honte de leur corps et de ne laisser à personne le droit de les agacer.»
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Le personnel de l’école n’a rien à redire sur ce concept établi depuis quelques années, selon ce qui a été rapporté au Syndicat de l’enseignement de l’Outaouais.
«Ça se passe bien. Dans le fond c’est une ouverture sur la diversité, mais aussi sur les relations égalitaires et le respect. En quelque part, l’important là-dedans est que la sécurité des élèves soir assurée, tout passe par la gestion et la surveillance, comment s’est mis sur pied », indique la présidente Nathalie Gauthier. « On amène les enfants du primaire à avoir cette ouverture-là pour que ça se poursuive quand ils seront au secondaire. Ça peut très bien fonctionner.»
Elle ajoute que cette réalité «est de plus en plus normale dans les espaces publics» mais qu’il y a «encore du chemin à faire».
Dans le réseau privé de l’Outaouais, le Collège Saint-Alexandre indique ne pas avoir de salles de toilettes mixtes mais que des toilettes non genrées et individuelles sont disponibles.