Le processus menant à un nouveau contrat de travail – le dernier est échu depuis le 31 août dernier – avance au compte-gouttes, admet la présidente de l’Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO), Anne Vinet-Roy, qui n’est cependant pas prête pour autant à dire que les relations ne sont pas cordiales. Du moins pour l’instant, insiste-t-elle.
Une quinzaine de séances de négociation ont eu lieu entre les deux parties depuis septembre.
«Il n’y a ni bonne nouvelle ni mauvaise nouvelle (dans les négociations), c’est juste que nous ne sommes pas rendus ni à un moment où il y a impasse, ni à un moment où il y a entente potentielle. Il y a encore beaucoup de mouvement à la table, des échanges d’information, sauf que ce n’est pas très rapide. Mais ce n’est pas que ça va mal pour autant, il faut faire attention au message», a-t-elle indiqué.
L’AEFO représente 13 000 membres qui travaillent dans plus de 470 écoles à travers la province.
Les dernières négociations en 2019 et 2020 avaient été difficiles entre la province et les enseignants, rappelons-le, puisque des grèves de zèle et des grèves rotatives avaient été déclenchées face à l’impasse. Une entente est finalement survenue peu après que la pandémie de COVID-19 a frappé le pays puis forcé un confinement et la fermeture des écoles.
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Cette fois, c’est la vitesse des négociations qui fait qu’on pourrait croire qu’il y a du sable dans l’engrenage.
«Côté contenu (de la prochaine convention collective), on a passé la moitié des dossiers, mais il reste encore un certain morceau. Des fois, il y a beaucoup de ramifications, il faut lire entre les lignes. Le défi, c’est que ça fait longtemps que ça dure. Le gouvernement avait neuf tables de négos, maintenant il en reste sept. Il y en a quatre pour les enseignants, trois pour le (personnel de) soutien. Mais jusqu’à mars, on avait deux jours par mois qui nous étaient alloués, alors qu’on le veuille ou non ça n’avance pas très vite, on était limité côté temps. Là, on a eu six jours en mars», affirme la leader syndicale.
Les enjeux sur la table
Les conditions d’apprentissage des élèves, la composition de même que la taille de la classe, les ressources d’aide allouées aux enseignants lorsque par exemple un curriculum est modifié, les pratiques d’embauche, la rétention et l’attraction de la main-d’œuvre ainsi que la rémunération sont au nombre des enjeux discutés à la table.
«Le phénomène de pénurie continue de s’aggraver, particulièrement pour le système d’éducation francophone, mais comment peut-on faire pour recruter les gens et les garder? Il faut aussi (les enseignants) répondre aux besoins de plus en plus changeants des élèves d’aujourd’hui, mais il y a une limite à ce qu’on peut faire humainement quand les groupes grossissent. [...] Le salaire, nos membres nous ont dit que c’était important pour eux, comme n’importe quel autre travailleur en ce moment avec le coût, la qualité de la vie. Ça fait partie des discussions, ça fait partie d’un tout. Ce n’est pas un secret, c’est une composante de nos demandes», explique Mme Vinet-Roy.
En Ontario, la loi 124 adoptée en 2019 par le gouvernement Ford limite à 1% les hausses salariales consenties aux centaines de travailleurs du secteur public mais celle-ci a été jugée inconstitutionnelle par un juge l’automne dernier. La province a indiqué à ce moment qu’elle comptait faire appel de la décision.
«Il y avait eu des gels salariaux avec le gouvernement précédent (Wynne) alors ça fait quand même un certain nombre d’années qu’on ne peut pas dire que les gens qui œuvrent dans les domaines financés par le système public ont de grosses augmentations. Il y a un rattrapage qui date de quelques années», soutient la présidente de l’AEFO, sans dévoiler la stratégie du syndicat.
Selon la grille salariale actuelle, un enseignant détenant son brevet gagne 53 000$ par an au bas de l’échelle, alors que le revenu annuel grimpe à 103 000$ au sommet de celle-ci.
Mme Vinet-Roy soutient que la suite des choses dans les mois à venir sera déterminante, mais qu’on n’agite pour l’instant aucun drapeau rouge.
«Ce qui va dicter (la suite), c’est l’évolution de l’avancement des sujets. Nous, on a l’intention de continuer à négocier de bonne foi pour une entente juste et équitable, qui protège nos droits et acquis puis qui, on l’espère, améliore les conditions de travail et allège la tâche de plus en plus lourde. Ce qui va dicter si à un moment donné on est obligé de passer à une autre étape, c’est l’état des discussions, mais nous n’en sommes pas là. Le mécanisme suit son cours. La dernière fois, on a déclaré une impasse plus tôt, mais là le gros défi c’est la lenteur. Ça n’empêche qu’on va utiliser (des moyens plus forts) si on en a besoin. Quand on entre en négos, on est prêts à toute éventualité», conclut-elle.
L’AEFO représente notamment 6400 membres au Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE), au Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO) et au Conseil scolaire de district catholique de l’Est ontarien (CSDCEO).