Budget 2024 à Gatineau: retour marqué de l’asphalte à la table du conseil

Les élus gatinois pourraient devoir faire le deuil de plusieurs travaux de pavage aux quatre coins de la ville.

L’asphalte a fait un retour marqué à la table du conseil municipal, mercredi matin. Le contexte inflationniste et les paramètres serrés de la proposition budgétaire 2024 faite par l’administration Bélisle pourraient forcer les élus à faire leur deuil de nombreux chantiers de pavage aux quatre coins de la ville. Plusieurs élus refusent d’envisager un tel scénario. Certains ouvrent timidement la porte à une augmentation de taxes supérieure à celle de 2,9% proposée lundi par le comité exécutif.


La Ville prévoit investir 175 millions en pavage entre 2024 et 2028. Le prix du bitume a toutefois explosé dans les dernières années, passant de 967$ le mètre en 2019 à 2691$ l’an passé. Ainsi, si le conseil souhaite honorer ses engagements en matière de travaux sur le terrain d’ici 2028, il devra trouver 57 millions de plus afin de combler le manque à gagner.

Pour 2024, une somme de 30 millions est planifiée pour des travaux de pavage. La Vérificatrice générale précisait, en 2019, que pour faire un véritable rattrapage dans l’entretien des rues, c’est plutôt une somme annuelle de 63 millions qui devrait être injectée dans le pavage.

Le conseiller municipal gatinois Mike Duggan.

Le conseiller Mike Duggan n’a pas hésité à se qualifier d’«asphaltite», mercredi. Il souhaiterait voir le conseil faire un effort plus important afin d’entretenir le réseau routier de Gatinois. «Beaucoup de projets prévus l’an passé ont déjà été reportés, a-t-il souligné. Avant c’était en raison de problèmes de ressources humaines et maintenant c’est un problème de financement. Je ne dis pas que je veux aller au-delà d’une augmentation de taxes de 2,9%, mais j’aimerais savoir quel serait l’impact si on décidait de maintenir nos engagements en pavage, si on décidait d’augmenter nos investissements. C’est certain que les citoyens ne veulent pas payer plus, mais s’ils voient plus de résultats, peut-être qu’ils seraient d’accord à accepter de payer un peu plus à court terme.»

Champagne reste ferme

Le chef d’Action Gatineau, Steve Moran, affirme être «très inquiet» par la proposition du comité exécutif qui forcerait le conseil à reculer sur des engagements importants en matière de pavage. Il a rappelé que l’état des rues trône au sommet des motifs d’insatisfaction des Gatinois depuis des années. «J’entends une insatisfaction autour de la table pour le pavage, a-t-il noté. On a intérêt à gratter les fonds de tiroirs pour trouver l’argent nécessaire pour s’attaquer au déficit d’entretien dans le pavage.» Ce dernier continue toutefois de croire que cela doit se faire dans le respect d’une hausse de taxes de 2,9%.

Le conseiller municipal Edmond Leclerc

Le conseiller Edmond Leclerc abonde dans le même sens que M. Duggan. Selon lui, une augmentation raisonnable de la taxe foncière dépend de ce que le contribuable obtient en retour. «Selon moi, le travail de l’élu est de voir plus loin qu’un simple objectif de hausse de taxe, a-t-il répété. On justifie la hausse de la taxation par ce qu’on offre de plus aux citoyens. Personne ne veut dépasser une hausse raisonnable, mais je veux que l’on considère une hausse de la taxe pour faire plus d’asphalte. Je ne dis pas que ce serait la source de revenu à utiliser, mais je veux voir ce scénario, je veux pouvoir le considérer.»

Le président du comité exécutif, Daniel Champagne, a rappelé qu’il n’a aucune ouverture à considérer un scénario qui ferait augmenter la hausse de taxes au-delà de 2,9%. Il s’est toutefois dit prêt à considérer une option à l’intérieur des paramètres budgétaires énoncés en début de semaine. «Une augmentation de 1% de taxe rapporterait environ 6 ou 7 millions de dollars de plus, a-t-il expliqué. On ne fait plus beaucoup de kilomètres avec ça. Je rappelle qu’on fait face à un déficit d’entretien des infrastructures de 1,8 milliard de dollars. Les municipalités n’y arriveront pas seules. On peut bien taxer davantage, on n’y arrivera pas plus.»

Projets abandonnés

L’asphalte n’est pas la seule victime du contexte budgétaire à Gatineau. Pour respecter ses engagements en matière de hausse de taxe, le comité exécutif a dû refuser pour 247 millions de dollars de projets d’entretien des infrastructures. Certains projets ont dû être carrément retirés de la planification municipale, alors que d’autres sont repoussés ou revus à la baisse.

L'achat de 15 chenillettes devant servir au déneigement des trottoirs d'ici deux ans serait abandonné.

La réfection du mur-écran du boulevard La Vérendrye est l’un des projets qui ont été remis aux Calendes grecques. L’achat de 15 chenillettes pour améliorer le déneigement des trottoirs est aussi mis en danger. Des réfections de 10 millions de dollars dans les arénas et piscines extérieures sont aussi disparues de la planification, tout comme des travaux importants de réfection de 25 millions à la Maison du citoyen. Les décisions finales sur ces dossiers seront prises vendredi.

Eau jaune

La volonté de la conseillère Tiffany-Lee Norris Parent d’intensifier et d’accélérer les travaux pour s’attaquer au problème de l’eau jaune représenterait des dépenses supplémentaires importantes. Le directeur général adjoint, André Turgeon, a précisé que pour réaliser des interventions sur 6 km de conduite particulièrement problématique, le conseil devrait trouver une somme d’environ 40 millions de dollars. Mme Norris Parent a précisé qu’elle fera une proposition en ce sens d’ici la fin de la semaine.