Gatineau: le conseil doit jongler avec des surplus de 22,9 millions

Le service des finances a annoncé au conseil municipal, mardi matin, qu’il bénéficie d’un surplus net de 22,9 millions de dollars qu’il peut investir en complète symbiose avec ses priorités.

La Ville de Gatineau continue de nager dans des excédents budgétaires, dopés encore une fois par des revenus de droits de mutation de loin supérieurs aux prévisions. Le service des finances a annoncé au conseil municipal, mardi matin, qu’il bénéficie d’un surplus net de 22,9 millions de dollars qu’il peut investir en complète symbiose avec ses priorités.


Le montant comprend les 17,5 millions de la «réserve COVID» versée par le gouvernement du Québec en 2020 pour aider la municipalité à faire face à la pandémie.

En novembre dernier, les élus ont déterminé que le logement abordable, le financement d’actions pour lutter contre les changements climatiques et les projets de développement comme les infrastructures sportives et culturelles, étaient les trois seules priorités dans lesquelles ils se donnaient le droit d’investir les surplus nets. Cette politique de gestion des excédents a vite été remise en question, mardi.



Attendre un portrait plus clair

D’abord, le comité exécutif a convenu d’attendre un portrait plus clair de la situation financière de la Société de transport de l’Outaouais (STO) avant de proposer au conseil une répartition des surplus. La Ville pourrait être dans l’obligation d’éponger un déficit de plusieurs millions provoqué par la baisse d’achalandage depuis la pandémie. Le président de la STO, Jocelyn Blondin, a rappelé que le transporteur public prévoit un manque à gagner de 9,7 millions en 2023. La STO souhaite toutefois pouvoir utiliser les 6,2 millions restant de l’aide financière obtenue par le transporteur public dans le cadre de la pandémie pour éponger ce déficit. «On attend la réponse de Québec», a précisé M. Blondin.

Le déficit de la STO pourrait atteindre 9,7 millions de dollars.

«Je souhaite ardemment que la STO soit capable de déposer un budget équilibré pour ne pas que Gatineau devienne une marge de crédit, a ajouté la mairesse France Bélisle. Nos surplus, on les utiliserait ailleurs.»

Urgence en itinérance

Plusieurs élus d’Action Gatineau (AG) ont affirmé qu’il y a urgence d’agir financièrement en matière d’itinérance. La conseillère Isabelle N. Miron a mentionné que «des fois, une situation d’urgence force à faire preuve d’agilité dans nos choix politiques». Elle a rappelé que la Soupe populaire avait demandé de l’aide financière en vain pendant des mois pour embaucher des gardiens de sécurité et que faute d’appui pour sécuriser ses employés, l’organisme a quitté le centre-ville.

Il y a deux semaines, des itinérants et des organismes du centre-ville de Gatineau demandaient à la Ville de Gatineau de déclarer l'état d'urgence.

Le chef d’AG, Steve Moran, a précisé qu’à son avis, la question n’est pas de savoir s’il faut déroger de la politique d’utilisation des excédents ou pas, mais de reconnaître l’urgence de la situation sur le terrain. «On a la capacité d’allonger des fonds, allons-y, a-t-il lancé. La Ville ne peut pas rester les bras croisés. Le jeu de ping-pong avec le gouvernement n’aide pas les gens en situation d’itinérance.» Ce dernier propose au conseil d’investir maintenant 1 million de dollars pour répondre à des besoins urgents sur le terrain.



«Il y a une canicule présentement et il n’y a rien pour soulager les gens dans la rue, a-t-il noté. Il faut une halte, des toilettes, en endroit pour déposer ses choses, des lits de débordements et il faut plus de gens pour aider», a-t-il affirmé.

La rue Georges

Le conseiller de Masson-Angers, Mario Aubé, n’a pas nié la situation difficile dans laquelle se trouvent les itinérants au centre-ville, mais il a rappelé que les urgences sont relatives. L’état de la rue Georges qui traverse son quartier, a-t-il rappelé, fait le tour du Québec en raison de sa première position au palmarès des pires routes du Québec réalisé par la CAA. «Dans mon secteur ce matin, personne ne m’a parlé d’itinérance, a-t-il noté. Ça ne veut pas dire que ce n’est pas un problème. Mais l’itinérance c’est surtout au centre-ville. Si je retourne à Masson-Angers et que je dis aux gens qu’on a investi 1 million de dollars en itinérance, les gens vont me crier après. Je ne suis pas contre investir un million en itinérance ou ce qu’il faudra, mais l’urgence ce matin à Masson-Angers, c’est la rue Georges.»

La conseillère d’Action Gatineau, Caroline Murray, a pour sa part rappelé que le conseil doit adopter une nouvelle politique sur le déneigement. Et comme la magie n’existe pas, améliorer les services à la hauteur des attentes du conseil nécessitera des investissements importants.

Pas un plat de bonbons

La mairesse Bélisle a dit comprendre les nombreuses priorités soulevées par ses collègues, mais elle a rappelé aux élus que les surplus nets de la Ville, «ce n’est pas un gros bol de bonbons». Elle a aussi souligné qu’il y a d’autres sources de financement disponibles pour répondre à des besoins urgents. «On a récemment été courageux en votant une somme de 800 000$ pour sauver un projet de logement, a-t-elle rappelé. Je crois que le conseil est prêt à être agile quand vient le temps de faire des interventions importantes pour la communauté.»

Mme Bélisle a précisé qu’elle ne prévoyait pas pour l’instant investir de manière urgente pour des services aux itinérants. Le président du comité exécutif, Daniel Champagne, n’a pour sa part pas fermé la porte à étudier la question en prévision de la décision du conseil sur l’utilisation des excédents au début juillet.