Ce lave-vaisselle qui brise après 2 ans

Le retour obligatoire de milliers de fonctionnaires fédéraux au bureau jusqu’à trois jours semaine depuis janvier a fait bouger l’aiguille de l’achalandage des deux sociétés de transport en commun d’Ottawa-Gatineau, qui stagnait depuis plusieurs mois.

CHRONIQUE / Enfin! Voilà que le gouvernement fédéral se décide à établir un «droit à la réparation» au Canada, afin de prolonger la durée de vie des électroménagers et des appareils électroniques. Le budget Freeland prévoit établir un «cadre» législatif dès 2024, après discussion avec les provinces et territoires.


Il était plus que temps.

On a tous en tête une histoire de lave-vaisselle en bon état de marche qu’on a dû remplacer prématurément en raison d’une pièce de rechange qui coûtait plus cher que l’appareil neuf. Ou encore d’un téléphone intelligent parfaitement fonctionnel, qui n’a pas survécu à la plus récente mise à jour du système.



Une lectrice, Henriette Levasseur, a vécu une expérience hallucinante dans un magasin de Gatineau. Elle se cherchait une lampe. En trouve une qui lui plaît. Mais réalise que l’ampoule Del intégrée à la lampe ne se remplace pas. «Et après?», demande Mme Levasseur au commis. «Après, il n’y a rien d’autre à faire que jeter la lampe», concède celui-ci. Mme Levasseur m’a écrit un courriel indigné: «J’avais entendu parler d’obsolescence programmée. Mais à ce point?»

Mais oui, à ce point. Êtes-vous si surprise?

L’âge d’or des électroménagers qui durent toute une vie est bel et bien révolu. Selon une enquête récente de l’organisme Équiterre, 25% des Québécois font réparer leurs appareils électroniques et électroménagers. Les bris observés surviennent à peine 2,6 ans après l’achat. Un délai inacceptable! J’ai eu une cuisinière qui m’a duré 15 ans. Ma dernière laveuse a rendu l’âme après 2 ans…

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Donc oui, vivement, un droit à la réparation au Canada. Notre pays a plusieurs longueurs de retard sur l’Europe en cette matière. La France, par exemple, a voté une «loi anti-gaspillage». Son but? Redonner au consommateur un meilleur accès à la réparation de ses appareils.

Pour ce faire, les législateurs français ont entre autres créé en janvier 2021 un «indice de réparabilité». Il attribue une note sur 10 à certaines catégories d’appareils électroniques et ménagers. «Il permet de savoir vraiment à quel point l’appareil est réparable», m’expliquait récemment Amélie Côté, analyste chez Équiterre.

L’indice de réparabilité français évoluera, en 2024, en indice de durabilité, précise-t-elle. Ainsi avant d’acheter une nouvelle laveuse ou un téléphone cellulaire, les Français sauront combien d’années leur appareil est censé fonctionner et s’ils peuvent ensuite accéder à des pièces de rechange à un coût raisonnable.

La loi anti-gaspillage produit déjà son effet en Europe.

Le groupe Seb, un fabricant de petits électroménagers, a changé la conception de ses produits pour les rendre plus durables et plus réparables. Au point de garantir, pendant 7 à 10 ans, la disponibilité des pièces détachées. Et pour s’assurer que les réparations soient faites en moins de 48 heures, il a déployé un réseau de 6500 réparateurs agréés. Le groupe Seb s’assure que les réparations se font presque toujours à un coût moins onéreux que celui d’un remplacement.

Le rêve…



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Le droit à la réparation présage d’une nouvelle économie. Où la réparation, le reconditionnement des objets, le seconde-main auront la cote. Où les fabricants, au lieu de nous garrocher du tout à jeter, auront avantage à nous offrir des produits plus durables. Nous en sommes là. À revoir non seulement nos modes de production, mais aussi nos modes de consommation.

Quand la laveuse brise après deux ans, nous sommes prompts à blâmer le fabricant. Mais regardons-nous. Comme consommateur, on veut du neuf. Parce qu’on a l’impression que c’est plus fiable. Combien de temps on passe à magasiner de nouveaux vêtements, de nouveaux gadgets pour nos appareils intelligents?

Si on passait plus de temps à entretenir nos objets plutôt qu’à s’en procurer des neufs? Est-ce qu’on ne s’y attacherait pas davantage? N’y ferait-on pas plus attention?  Qui sait si on ne cesserait pas de consommer plus de ressources que la Terre arrive à en produire...