Sans se lancer dans de grandes compressions budgétaires comme l’avait fait le gouvernement Chrétien dans les années 1990, le gouvernement Trudeau prévoit réduire les dépenses au sein de la fonction publique de l’ordre de 15 milliards de dollars d’ici cinq ans.
La ministre des Finances Chrystia Freeland assure que ces compressions n’auront pas d’impact sur l’offre de services. Il pourrait s’agir d’économie par attrition, par exemple.
Chaque ministère aura la responsabilité d’identifier des dépenses qu’ils jugent inutiles et les couper. On ignore si l’élimination de postes ou encore des gels d’embauches seront en vigueur.
«C’est sans doute possible. Les sommes en jeu ne sont pas si grandes. Sans réduire le personnel, je ne sais pas comment ils vont faire, mais il y a des départs à la retraite, des nouveaux employés qui coûtent moins cher que les anciens et il y a peut-être d’améliorer les façons de faire dans un contexte de recrutement», a déclaré le titulaire de la chaire de recherche en fiscalité à l’Université de Sherbrooke, Luc Godbout.
D’ici 2026-2027, le gouvernement de Justin Trudeau veut avoir réduit de 7,1 milliards en «recentrant les dépenses». Ottawa compte ainsi diminuer le recours aux services de consultants et en services professionnels du privé, comme McKinsey par exemple, de l’ordre de 15% en 2023-2024.
Outre les services, le fédéral veut réduire considérablement les voyages effectués par les fonctionnaires de l’État. Cette mesure particulière a déjà commencé à être mise en oeuvre dans les derniers mois par certains ministères, comme Patrimoine canadien.
Il pense aussi épargner près de 7 milliards de dollars en faisant des économies sur les dépenses admissibles par les ministères et les organismes gouvernementaux. Les Forces armées canadiennes, qui ont bénéficié d’une hausse de leur budget en 2022, les transferts directs aux ordres ordres de gouvernements et aux communautés autochtones sont exemptés de cette mesure.
Toutefois, les sociétés de la Couronne devront éventuellement emboîter le pas, soutient Ottawa, ce qui constituerait des économies d’environ 1,3 milliard sur quatre ans à compter de l’an prochain.
Les 6,4 milliards de dollars restants seront des sommes économisés grâce à une réorientation des dépenses précédemment annoncées, et ce, au cours des six prochaines années.
Un contexte pas facile
Ces mesures surviennent alors que le gouvernement est en pleine négociation pour renouveler la convention collective d’environ 156 000 fonctionnaires de l’État membres de l’Alliance de la fonction publique du Canada. Ces derniers menacent de déclencher une grève si le fédéral ne leur offre pas des hausses salariales annuelles moyennes de 4,5% sur trois ans.
«Il y a un processus de négociations en cours. On a certaines estimations de cela. On verra quand les négociations se concluront et si elles se terminent différemment de nos estimations, alors il faudrait les ajouter de façon graduelle au budget», selon un haut fonctionnaire du gouvernement.
Un autre milliard pour Phénix
Par ailleurs, le gouvernement fédéral n’a pas accompli son objectif qu’il s’était fixé dans le budget 2021, soit celui d’éliminer les arriérés liés au système de paie Phénix. Encore aujourd’hui, on compte des milliers de dossiers non réglés, sept ans après la mise en oeuvre de ce système qui vit de perpétuels ratés.
En 2022, le budget présenté par la ministre Freeland ne faisait pas mention de ce système, au grand dam des syndicats de la fonction publique.
En 2021, le gouvernement avait dépensé 23 millions pour éliminer les arriérés et indiquait que le même montant serait dépensé pour la même raison, l’année suivante.
Ottawa annonce maintenant vouloir «renouveler les ressources du système de paye» et estime que ça lui coûtera plus de 500 millions par année au cours des deux prochaines années.
Ce milliard de dollars comprend la résolution des arriérés, mais aussi le fonctionnement quotidien du système de paye.
Le budget fédéral prévoit par ailleurs un fonds pour «améliorer l’administration de la paye du gouvernement». Ce sont 52 millions qui devraient être dépensés en 2023-2024 pour la création d’un nouveau système de paye qui tarde toujours à voir le jour.