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La mairesse France Bélisle et le comité exécutif ont voulu aller très vite dans ce dossier. Trop vite. Sous prétexte que le temps presse, ils ont cherché à s’éviter l’étape des consultations publiques. Et les voilà confrontés au syndrome du pas dans ma cour, peu importe le terrain qu’ils désignent pour accueillir le futur QG, que ce soit le site Guertin, celui des Hautes-Plaines ou un autre.

Il faut savoir que sur les 5 sites retenus par la ville pour accueillir le futur QG de police, 4 nécessitent un changement de zonage. Or dès qu’on parle d’un changement de zonage dans une ville, il faut envisager que des citoyens s’y opposent en demandant un référendum sur la question. On a très souvent pesté, parfois avec raison, contre la loi québécoise qui autorise ainsi une minorité de citoyens à bloquer d’immenses projets.

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«Il faut reprendre le processus du départ et parler à la population», réclame de nouveau le chef d’Action Gatineau, Steve Moran. Ce dernier revient à la charge avec cette demande depuis la première présentation sur le QG, en novembre. «On parle de la plus grande dépense de la Ville depuis la fusion, a-t-il ajouté. Les citoyens ont le droit de faire partie de la discussion.»

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Une certaine vague de fond semble se dessiner depuis novembre, constate pour sa part le président du conseil municipal et conseiller d’Aylmer, Steven Boivin. «Ce qui rallie tous ces discours qu’on entend, c’est le manque de consultation publique, et dès novembre, dès qu’on nous a présenté le projet de QG, beaucoup de gens autour de la table on dit que ça prendrait une consultation publique. Quatre mois plus tard, on a présenté d’autres sites, il n’y a toujours pas eu de consultation publique et on arrive aujourd’hui à se dire qu’on pense qu’il faut peut-être consulter la population pour avoir une acceptabilité sociale. Ce qui nous manque comme information, c’est ce que les gens pensent de ça, c’est important d’avoir cette information-là pour prendre une décision qui aura un impact pour 50 ou 100 ans sur notre sécurité publique.»

La conseillère Olive Kamanyana était présente lors de la séance d’information sur le choix du site du boulevard de la Technologie, dans le quartier des Hautes-Plaines, lundi soir. Elle affirme que les gens ne cherchent pas seulement à avoir de l’information dans ce dossier. «Ils cherchent à être entendus et à être écoutés, lance-t-elle. Ils ne veulent pas juste discuter d’un site ou d’un autre, ils veulent comprendre notre décision de la centralisation, connaître ses impacts réels et que leurs avis soient considérés.»

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Les raisons qui poussent le conseil à envisager la centralisation des services policiers dans un quartier général sont inconnues de la population, se désole Mme Kamanyana. «On n’a jamais fait la démonstration que nous avons la bonne réponse à nos besoins tels que définis par la police et par la loi, ajoute M. Moran. La centralisation peut être intéressante dans le meilleur des mondes, mais aujourd’hui on comprend les défis de la centralisation. […] Ça peut valoir la peine de reconsidérer la question de la centralisation si c’est pour voir si notre projet correspond à nos besoins. Prenons-nous la bonne décision avec les ressources financières que nous avons?»

Bélisle en réflexion

«En ce moment, je réfléchis», a lancé la mairesse France Bélisle, lorsque questionnée, mercredi matin, sur la possibilité de reporter le vote de mardi prochain sur le choix du site.

«Je demeure très préoccupée par un report considérant l’urgence d’agir qui est toujours là et les coûts qui s’accumulent [600 000$ par mois selon les chiffres avancés mardi par la mairesse], a-t-elle expliqué. Je n’ai pas de réponse claire à part de dire que je me donne le temps de réfléchir. […] Je crois qu’il faut continuer d’avancer, mais à l’heure où on se parle, il n’y a pas de vote officiel du conseil sur un site. Il y a eu un vote indicatif en faveur du site de la Technologie. Il y a cinq sites sur la table, on ne fera pas un reset d’un travail qui a déjà été fait.»

Mme Bélisle a rappelé qu’à son avis, une infrastructure policière de l’ampleur d’un quartier général comporte des éléments de sécurité pour lesquels les citoyens et les élus ne doivent pas s’improviser experts. «Ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas informer mieux», a-t-elle convenu.

Le conseiller et membre du comité exécutif, Mario Aubé, a aussi préféré continuer de parler d’«information» plutôt que de consultation. Il n’est pas fermé à reporter le vote de mardi prochain, mais «pour les bonnes raisons», dit-il. «Si on repousse, ça ne doit pas être juste pour expliquer un site, remettons le site Guertin dedans [la discussion] et expliquons les cinq sites pour que la population sache sur quoi les élus se sont véritablement prononcés.»

Un «gâchis»

Aux citoyens qui reprochent au conseil de prendre une «décision précipitée», la mairesse a voulu rappeler que la précipitation était bien relative dans ce dossier. «C’est dans les cartons de la Ville depuis un certain nombre d’années et on doit agir maintenant, a-t-elle rappelé. L’hôpital vient nous presser, mais le besoin était là bien avant l’élection de ce conseil en novembre 2021.»

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Steve Moran est d’avis que le dossier du QG est devenu un «gâchis» et qu’il appartient à Mme Bélisle. «La mairesse a beau vouloir remettre le blâme sur l’ancienne administration, mais la réalité c’est qu’elle est aux commandes de la Ville depuis presque 18 mois et que c’est un dossier qui lui appartient, a-t-il affirmé. C’est à elle et au comité exécutif à arriver avec un projet qu’ils peuvent vendre.»

Mme Kamanyana reproche à la mairesse d’avoir tout misé sur le site Guertin comme seul site possible dès le départ. «On a tout fait pour tenter de prouver ça, mais on a oublié de prévoir quoi faire si le site Guertin ne passait pas, a-t-elle mentionné. Il fallait arrêter dès le départ et écouter la voix populaire qui clairement voulait se faire entendre. On a plutôt tout mis ça sur l’urgence et la nécessité de protéger des informations relevant de la sécurité publique. On a utilisé la formule de l’urgence pour procéder de la façon dont on a procédé, en ne répondant pas aux revendications des gens qui voulaient être écoutés.»

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Il reste que cette loi existe pour une raison: obliger les élus à expliquer leur choix et à justifier leurs décisions. Ce qui est tout à fait normal dans une démocratie. Chaque fois que des élus essaient de passer outre à cette règle, ils se mettent dans le trouble.

Dans le dossier du QG de police, la mairesse Bélisle admettait à demi-mot, mercredi matin, que son administration aurait pu mieux communiquer avec la population. Mieux expliquer les enjeux, immenses et importants, liés au déménagement du QG de police. La population a été prise de court. Le dossier a atterri pour la première fois au conseil municipal en novembre dernier. Et déjà, on annonce à des citoyens qu’on va installer un QG de 200 millions dans leur cour. On serait surpris à moins!

Ceci dit, c’est vrai que le temps presse.

S’il faut déménager au plus vite les policiers, c’est non seulement que le poste actuel est désuet, c’est aussi pour céder le terrain au futur hôpital. L’opération est délicate. On sent Gatineau sous pression pour que l’opération se déroule sans anicroche. Le ministère de la Sécurité publique a Gatineau à l’oeil. La Ville veut à tout prix éviter de se retrouver sous tutelle.

Pour faire avancer les choses, la mairesse a mis énormément de pression politique sur le conseil municipal. Trop. Dès le départ, le comité exécutif a tenté d’imposer le choix du site de Guertin. En sous-estimant grossièrement la levée de boucliers qui allait suivre, autant parmi les élus que dans la communauté. Les élus se sont ensuite rabattus sur le site des Hautes-Plaines qui suscite aussi une levée de boucliers…

Comment s’en sortir?

Peut-être qu’on devrait commencer par débattre en public des avantages et des désavantages des 5 sites potentiels pour le futur QG de police. Ça n’a pas été fait. Les élus ont beaucoup discuté du site Guertin, puis du site des Hautes-Plaines. Mais très peu du parc des Draveurs, un plan B envisageable, selon moi. Ni du terrain de soccer sur Saint-Rédempteur, seul terrain potentiel qui n’implique pas de changement de zonage.

La mairesse réclamait un vote final sur le choix du site dès novembre dernier. Puis l’objectif a été reporté. Aux dernières nouvelles, elle espérait obtenir une décision finale mardi prochain. Je ne vois pas comment elle ralliera son monde en si peu de temps. Le conseil est divisé comme jamais. Certains élus réclament de véritables consultations, d’autres qu’on reprenne à zéro l’analyse des sites potentiels.

On ne gagne jamais rien à vouloir sauter des étapes dans le domaine public. Rappelez-vous la saga de l’aréna Guertin. Dans ce dossier aussi, des élus ont cherché à sauter des étapes pour économiser des coûts. Ça a fini par prendre plus de temps, et par coûter plus cher…

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