C’est en 2018 que Santé Canada approuve l’Ozempic, semaglutide en injection, pour le traitement du diabète de type 2. Le médicament améliore la maîtrise glycérique des diabétiques, en influençant la production d’insuline et la sensation de satiété.
Les gens qui en prennent voient leur faim être réduite et plusieurs perdent rapidement quelques kilos. Assez pour que le traitement popularisé sur les réseaux sociaux deviennent en grande demande, même chez les personnes qui ne sont pas diabétiques.
Mais attention, préviennent les médecins et pharmaciens. Les effets secondaires de ce médicament peuvent être difficiles à tolérer et les changements sur le corps ne sont pas éternels sans aussi modifier ses habitudes de vie. Et il n’y a, encore aujourd’hui, aucune approbation de Santé Canada pour de tels traitements.
C’est en fouillant sur Internet que Mathieu tombe sur l’Ozempic. Rapidement, sa curiosité est piquée et il appelle son médecin. «Je lui ai dit que j’étais insatisfait de mon poids. J’avais essayé plein de trucs. Même si certains marchaient bien, ce n’était jamais assez pour perdre du poids», indique, lors d’un entretien téléphonique avec Le Progrès, celui qui a dépensé près de 10 000$ pour différents traitements amaigrissants.
Même s’il convient qu’il ne souffre pas d’obésité (il mesure 6 pieds et pèse 200 livres), certains bourrelets le dérangent et Mathieu, qui désire garder l’anonymat pour des raisons professionnelles, est prêt à tout pour les perdre.
Ozempic lui apporte rapidement les résultats escomptés. «Avec l’Ozempic, on n’a plus faim. On n’a plus le goût de manger. J’ai perdu 20 livres en deux mois, tout en faisant un jeûne intermittent et en m’entraînant trois fois par semaine», commente celui qui n’a même pas réussi à prendre une bouchée dans un restaurant cinq étoiles, après l’un de ses traitements.
Ces temps-ci, même s’il ne fait plus attention, il assure ne plus prendre de poids.
Heureusement pour lui, Mathieu supporte bien le traitement, dont il s’injecte deux doses par semaine. La piqûre ne lui faisait pas peur. Il avait même déjà pensé à la liposuccion, admet-il en riant.
Mathieu a donc reçu une prescription pour un an d’injections. Et la fin approche à grands pas. «Est-ce que ça me fait peur d’arrêter? Oui. Il va vraiment falloir, quand je vais arrêter d’en prendre, que je maintienne mes bonnes habitudes de vie, soit de ne pas trop manger, de faire attention. C’est entre mes mains», commente-t-il.
Puisque le médicament n’est pas couvert par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) pour les gens qui utilisent l’Ozempic pour la perte de poids, ce sont les assurances de Mathieu qui remboursent son traitement. Et il se considère chanceux qu’elles ne soient pas trop pointilleuses...
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/V7TZV3QGORH3HHXJFHSU7CWRNM.jpg)
Popularité grandissante
Cet intérêt pour l’Ozempic, Mathieu n’est pas le seul à l’éprouver. Les réseaux sociaux regorgent de publications, autant positives que négatives, au sujet de ce traitement.
Dans le bureau de Dre Marie-Andrée Désy, médecin de famille de Chicoutimi, ils sont de plus en plus nombreux à débarquer avec des questions sur l’Ozempic. Mais ça ne veut évidemment pas dire qu’ils sont tous prêts à l’essayer.
«Souvent, quand les gens apprennent que c’est un traitement en injection, ça peut les rebuter. Aussi, peu de gens savent que le médicament est couvert par la RAMQ seulement en contexte de diabète et que ce ne sont pas toutes les assurances privées qui le couvrent. Donc oui, j’en parle, je donne toutes les informations. Mais souvent, la discussion arrête là», explique Dre Désy, lors d’un entretien téléphonique avec Le Progrès.
Le coût est un enjeu important, puisqu’il peut atteindre quelques centaines de dollars par mois, mais le traitement s’accompagne également de divers effets secondaires, qui sont surtout d’ordre gastro-intestinal. Ça peut être des nausées, des ballonnements, des diarrhées, des gaz intestinaux, qui en amènent même plusieurs à réduire leur temps de traitement, selon elle.
D’ailleurs, Dre Désy ne prescrit actuellement aucun traitement d’Ozempic à ses patients. Tant que Santé Canada n’approuvera pas ce médicament pour la perte de poids, elle ne le fera pas.
Il lui arrive cependant de prescrire d’autres médicaments pour la perte de poids. Ils demeurent, pour certaines personnes, la meilleure façon d’obtenir des résultats lorsqu’ils sont combinés à de bonnes habitudes de vie. Ils empêchent même parfois la nécessité d’une chirurgie bariatrique.
Dre Désy stipule toutefois que les médicaments ne sont jamais un premier choix à préconiser pour la perte de poids. «La prise de médicament fait partie de l’arsenal thérapeutique qu’on peut offrir par rapport à la perte de poids, mais ce n’est pas la première solution. Ça ne fait pas des miracles et ce n’est donc pas la panacée. L’Ozempic, c’est un médicament qui donne un coup de pouce, mais il faut absolument introduire des changements dans nos habitudes de vie. Ça passe par l’alimentation, par l’activité physique, mais aussi le psychologique», soutient la médecin rattachée au GMF des Rivières à Chicoutimi.
Pour elle, l’Ozempic pour la perte de poids, c’est un «oui, mais...». Elle tient à ce que les patients pensent aux coûts, aux effets secondaires importants, à l’absence d’approbation par Santé Canada et à ce qu’ils devront faire lorsque le traitement sera terminé, notamment. Elle note toutefois que la popularité grandissante du produit amène de belles discussions dans les bureaux des médecins alors que le poids est parfois un sujet délicat à aborder.
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/XBYTSFHYF5AAXOYUBIINHD2F7U.jpg)
De plus en plus de prescriptions
À la pharmacie Jean Coutu de la rue Sainte-Famille, à Jonquière, de plus en plus de personnes arrivent avec une prescription d’Ozempic.
Selon l’équipe de la succursale, les gens qui l’utilisent pour perdre du poids ont même dépassé ceux qui le prennent pour le diabète, dans une proportion d’environ 60% contre 40%.
«J’ai vraiment beaucoup de patients qui viennent chercher de l’Ozempic. Tous les jours, autant de personnes diabétiques que ceux qui veulent perdre du poids passent au comptoir», souligne Kristina Laforge, pharmacienne-propriétaire.
Il est difficile d’obtenir des données précises sur le nombre de personnes qui prennent ce médicament pour la perte de poids, puisqu’elles font affaire avec leur assureur privé. Or, à titre d’exemple, selon les données fournies par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), le nombre de personnes diabétiques qui ont acheté ce médicament en un mois est passé de 74, en novembre 2019, à 34 373, en novembre 2022.
La pharmacienne rappelle d’ailleurs qu’il n’est pas rare qu’un médicament soit pris pour une raison autre que son utilité première. Par exemple, des antidépresseurs peuvent être utilisés pour les personnes en dépression, mais aussi pour atténuer les migraines, les douleurs chroniques, l’insomnie... Avec l’Ozempic, la particularité tient plutôt au fait qu’il n’est pas approuvé par Santé Canada pour la perte de poids.
Somme toute, Mme Laforge partage l’avis de Dre Désy. «L’Ozempic, ça reste que c’est un médicament. Je pense qu’en premier lieu, la personne doit penser à son alimentation, à l’activité physique, c’est certain. Est-ce que l’Ozempic peut être un bon coup de pouce si des fois ça devient difficile à certains moments? Pour certaines personnes, ça peut l’être», soutient-elle.
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/XA2CIJU33JCEBIABWMZONF5MRU.jpg)
Un autre médicament fera d’ailleurs prochainement son entrée sur les tablettes des pharmacies canadiennes, le Wegovy. Déjà approuvé par Santé Canada en matière perte de poids, l’injection aura encore une plus grande quantité de la molécule qu’on retrouve dans l’Ozempic. Les deux professionnelles préviennent les futurs patients que les effets secondaires seront encore plus importants en raison du fort dosage de ce médicament.
*Nom fictif