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On est chanceux comme ça. On a la chance de pouvoir apprendre l’autre langue tôt, qu’il soit facile de trouver des concitoyens pour échanger dans cet autre code linguistique, tout ça nous donne la chance de créer encore plus de liens avec d’autres humains, d’avoir accès à plus de médias, de cultures, de savoirs. C’est fabuleux. Et bien des gens le savent!

Au Québec, 44,5% de la population est bilingue, nous dit Statistique Canada. Et 66,2% des anglophones y sont bilingues.

À l’extérieur du Québec, 89% des francophones sont bilingues.

En plus, en 2021, un Canadien sur quatre avait au moins une langue maternelle autre que le français ou l’anglais, et un Canadien sur huit parlait une langue autre que le français ou l’anglais de façon prédominante à la maison.

Bref, les Canadiens parlent beaucoup de langues.

On peut en être très fier.

Et on peut surtout ainsi constater qu’être au moins bilingue n’est pas un exploit inatteignable.

C’est la réalité quotidienne de millions de gens qui évoluent dans le monde moderne.

Qu’on ne réussisse pas à trouver quelqu’un pour diriger nos grandes sociétés pancanadiennes, comme Air Canada ou le CN parmi nos plus brillants bilingues est une aberration.

Penser qu’il s’agit d’une exigence exagérée est aussi une aberration.

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La question se pose depuis longtemps mais est revenue à l’avant-plan cette semaine avec la proposition d’un amendement à la nouvelle loi modernisée sur les langues officielles, la C-13, qui fait l’objet de bien des discussions et tiraillements aux Communes.

Le Bloc québécois, soutenu par le Nouveau Parti démocratique, demandait que la loi exige que les grands patrons d’Air Canada, du Canadien National (CN), des sociétés de la Couronne et des autres organisations assujetties à la Loi sur les langues officielles comme les administrations portuaires et aéroportuaires soient capables de parler ou du moins comprendre clairement le français.

L’amendement a été défait.

Ses opposants se sont demandé s’il était réaliste de croire que les dirigeants des autorités portuaires de villes comme Halifax ou Nanaïmo soient obligés de parler français. D’autres se sont inquiétés de la réduction du bassin de recrutement causée par une obligation de bilinguisme.

Et la discussion a pas mal pris fin.

Et on pourra encore, légalement, avoir des présidents d’Air Canada unilingues et des conseils d’administration du CN où personne ne parle français.

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Par où commencer pour expliquer à quel point nos élus ont raté une occasion importante de corriger une erreur du passé?

L’amendement du Bloc québécois était probablement trop vaste.

Il est vrai qu’exiger le bilinguisme de dirigeants de sociétés portuaires oeuvrant dans des marchés assez délimités avec une langue dominant sans équivoque les échanges professionnels peut parfois sembler exagéré. Mais encore.

Cela dit, est-ce que le patron ou la patronne des grandes sociétés jadis étatiques, aujourd’hui dotées de quasi monopoles sectoriels vu leurs circonstances historiques – oui on pense à vous Air Canada et cie – devraient comprendre et parler le français?

Oui.

Bien des unilingues des deux langues n’ont pas le choix de faire affaire avec ces entreprises aujourd’hui privées, il est donc normal que ces sociétés nagent dans les deux langues. Et réfléchissent pour ses clients dans les deux langues. Il faut que leurs équipes de directions soient conscientes de la réalité du bilinguisme. Qu’elles y soient sensibles. Et que ceux qui tiennent les rênes de ces grandes sociétés soient capables de lire, d’entendre, de se confier et d’écouter leurs partenaires et clients dans la langue de leur choix.

Et en plus, connaître l’autre langue? Ce n’est pas la fin du monde.

*****

Quand on entend les opposants s’insurger contre les exigences linguistiques, on a l’impression de les écouter parler d’acrobaties intellectuelles dignes des plus grands talents du Cirque du Soleil.

Allô! Des millions de Canadiens et Canadiennes sont bilingues.

Près de la moitié de la population du Québec l’est.

Ce n’est pas sorcier d’acquérir cette compétence si on a de grandes ambitions.

Si des gens veulent diriger de grandes entreprises visées par la loi sur les langues officielles, qu’ils deviennent bilingues.

Sinon, il y a plein d’autres grandes sociétés à diriger.

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