Parmi les points qui seront examinés, il est question de reporter de deux ans l’âge d’admissibilité minimal à la rente de retraite du RRQ, donc de 60 ans à 62 ans. On a fait grand cas de cet éventuel changement au régime, mais plusieurs autres modifications intéressantes sont aussi envisagées.
[ Des changements majeurs sont envisagés au RRQ ]
Près d’une quinzaine de groupes et d’experts feront valoir leur point de vue pendant les trois jours que dureront les consultations. Je ne vous ferai pas un compte-rendu de chacun des mémoires qui seront déposés devant cette commission, mais il en est un que j’attendais tout particulièrement, celui des membres du comité d’experts sur l’avenir du système de retraite québécois dont les travaux avaient mené à la publication du Rapport D’Amours, il y a 10 ans.
Ça ne fera pas autant de bruit que le retour sur scène d’ABBA sous forme d’hologrammes, mais ça a quand même les allures d’un come back. Le groupe était dirigé par l’ancien président du Mouvement Desjardins, Alban D’Amours, et composé des spécialistes René Beaudry, Luc Godbout et Bernard Morency. De bonnes têtes.
Le quatuor a déposé son mémoire hier. En 2013, il avait souligné à grands traits les risques croissants de longévité, soit les probabilités pour les retraités d’être à court de ressources vers la fin de leur vie. Je m’attendais donc à ce qu’ils appuient l’idée de reporter de deux ans l’âge d’admissibilité à la prestation du RRQ. Je me suis mis le doigt dans l’œil. Les experts favorisent le maintien à 60 ans, surtout pour ne pas échauder les Québécois à l’égard d’une réforme.
Ce qui se dégage de leur mémoire, c’est que la fenêtre entre 60 et 75 ans offre de formidables opportunités. Pour que les retraités puissent les saisir, on doit assouplir certaines règles et offrir la possibilité de repousser de 70 ans à 75 ans l’âge maximal auquel on peut demander sa rente. En échange, les retraités auraient droit à une prestation à vie accrue de 109 % (par rapport à celle prise à partir de 65 ans).
J’ai pu discuter avec Bernard Morency, la veille de la présentation du mémoire. Il a œuvré plus de trois décennies chez Mercer, une société spécialisée dans les avantages sociaux, dont les régimes de retraite. Il occupe aujourd’hui un siège d’associé à l’Institut sur la retraite et de l’épargne de HEC et il a reçu le titre de senior Fellow de l’Institut C.D. Howe, une firme versée dans la recherche sur les politiques publiques.
L’expert fait remarquer que les gens font moins une coupure nette entre la carrière professionnelle et la retraite. «De plus en plus, la retraite est progressive. Entre 60 et 75 ans, les revenus viendront du travail à temps partiel, un peu de l’épargne et des régimes complémentaires de retraite», explique Bernard Morency.
Selon lui, il est essentiel qu’au cours de cette période, les semi-retraités puissent profiter d’une plus grande flexibilité à l’égard de leurs différentes sources de revenus. D’où la recommandation principale de son groupe de permettre de débuter la rente du RRQ n’importe quand, entre 60 et 75 ans. Le quatuor propose également de rendre facultatives les cotisations au régime pour tous les travailleurs de 65 ans et plus. Il suggère en outre de prolonger la période durant laquelle on peut revenir sur sa décision d’encaisser la rente, après un premier versement.
Autres obstacles à éliminer, selon les auteurs du Rapport D’Amours, sont les limites imposées aux retraits des REER immobilisés et les comptes de retraite immobilisés (CRI) afin de pouvoir en accélérer le décaissement.
Aussi, ils préconisent le report de 71 ans à 75 ans l’obligation de convertir un REER en fonds enregistré de revenu de retraite (FERR). Cette décision relève du fédéral, tout comme cette autre recommandation du groupe : donner la possibilité de repousser la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) jusqu’à 75 ans en échange d'une rente accrue.
Après ma conversation avec Bernard Morency, j’ai relu le mémoire. J’ai alors eu une sorte d’illumination.
Le problème de la planification de la retraite, c’est qu’elle s’étale sur une période indéterminée, dont la fin est inconnue. Si seulement on savait plus ou moins l’année de notre décès, ce serait plus simple. Les conseillers s’échinent à mettre en place des stratégies de décaissement de manière à étirer notre pécule sur des horizons de 25 à 35 ans, des fois qu’on passerait le cap des 95 bougies.
L’approche des quatre experts cherche à restreindre l’essentiel de la planification de retraite à l’intérieur d’une période déterminée de 15 années, entre 60 et 75. Ensuite, la majeure partie des revenus de retraite serait assurée par les prestations du RRQ et la PSV, plus que doublée et indexée à l’inflation. Payable à vie.
Et bye-bye, le risque de longévité! Pas fou.