Les chargés de cours de l'UQO prêts à «livrer bataille»

La partie syndicale plaide que même si les relations sont cordiales et qu'il y a eu de réelles avancées pour les clauses normatives, rien n'est encore joué pour ses quelque 700 membres, sans contrat de travail depuis 13 mois.  

C'est devant un fort de glace symbolique et sous les airs de la chanson L'amour a pris son temps, thème du film La guerre des tuques, que les chargés de cours de l'Université du Québec en Outaouais (UQO) ont annoncé jeudi qu'ils augmentaient d'un cran la pression sur l'employeur en vue d'obtenir une nouvelle convention collective.


«On est en mode: on est prêts à mener une bataille. Là, on le fait de façon enjouée, ludique. On sait que l'UQO a toujours le discours qu'elle n'a pas de sous. [...] On sait qu'elle est toujours sous-subventionnée, mais ce n'est pas une raison pour que nous n'ayons pas des salaires à la hauteur, concurrentiels. Nous, on a vraiment dit à l'employeur qu'on voulait un règlement avant la semaine d'études, au début mars», explique Marie-Josée Bourget, présidente du Syndicat des chargées et chargés de cours de l’UQO (SCCC-UQO), ajoutant qu'on compte interpeller au besoin dans ce dossier la députée de Hull, Suzanne Tremblay.

L'offre patronale sur le plan monétaire n'a pas encore été déposée mais ce sera chose faite en février. 

La partie syndicale plaide que même si les relations sont cordiales et qu'il y a eu de réelles avancées pour les clauses normatives, rien n'est encore joué pour ses quelque 700 membres, sans contrat de travail depuis 13 mois.  

Pouvoir d'achat

Après 23 séances de négociation, le syndicat affirme attendre avec impatience l'offre salariale, considérant le contexte d'inflation et le fait que ses membres aient encaissé une baisse de leur pouvoir d'achat chiffrée à 10%. Une réalité qui touche tout particulièrement les employés à statut précaire, dit-on.

«Depuis 2018, on peut dire qu'on commence à voir une descente et là on veut rattraper puis surtout avoir un salaire comparable au moins à ce qui se fait au Québec», soutient Mme Bourget.

Mme Bourget

Selon la partie syndicale, il reste aussi à attaquer deux autres dossiers d'importance: la reconnaissance de la recherche et la formation à distance. Pour ce dernier point, le SCCC-UQO estime qu'on ne peut maintenir le statu quo et qu'on doit s'adapter au contexte universitaire de 2023.

«Il faut qu'il y ait une rémunération pour monter les cours. Pendant la pandémie, on a travaillé bénévolement à changer les modalités de nos cours. Ce n'est pas: on prend un cours en présentiel et on le change à distance, ça ne fonctionne pas ainsi. Peu importe le format, que ce soit distance synchrone ou asynchrone, il faut avoir les moyens de faire des cours de qualité», déclare Mme Bourget.

La formation à distance est prisée par de nombreux étudiants, en particulier ceux qui sont parents et travailleurs, spécifie-t-elle, rappelant du même coup que l'UQO a une forte proportion d'étudiants à temps partiel (environ 40%).

Meilleur climat que dans le passé

Le SCCC-UQO admet par ailleurs sans détour que les relations de travail dans l'établissement sont bien meilleures avec la rectrice actuelle, Murielle Laberge, qu'elles ne l'ont été avec ses prédécesseurs dont Denis Harrisson, en poste de 2015 à 2020.

«Je ne suis pas prête à lancer tous les blâmes sur l'ancien recteur, mais il n'était pas facile. [...] La rectrice actuelle, on la connaît depuis longtemps, elle a fait du syndicalisme, elle sait comment ça fonctionne un syndicat et un employeur, ce que peut-être l'ancien recteur ne savait que de façon théorique, pas pratique», affirme Mme Bourget.

Cette dernière cite comme exemple le fait que même lors de journées plus ardues dans les pourparlers, les deux parties ont réussi à trouver un accord sur certains points.

«On a été capables de dire: nous on est prêts à aller jusque-là, eux à cet endroit, alors c'est là qu'on se rejoint. Ce n'est pas parfait des deux côtés mais on est arrivés à une entente», explique-t-elle.

Le déclenchement d'une grève dès mars n'est pas exclu s'il y a éventuellement cul-de-sac dans les négociations, prévient-on. 

«Une grève, on ne peut pas faire ça en juillet, elle est là notre fenêtre (à la fin de l'hiver), car le trimestre se termine le 20 avril. On doit calculer les semaines», précise-t-elle.

Le SCCC-UQO rappelle que ses membres donnent 70% des cours au premier cycle, un des ratios les plus élevés en province.

«Si on n'est pas là, ça ne fonctionne pas», plaide Marie-Josée Bourget.

«De bonne guerre», selon l'UQO

Du côté de la partie patronale, la rectrice Laberge se dit relativement optimiste et précise que les négociations se sont véritablement entamées qu'en mai dernier au bout d'un long processus.

«Les relations sont bonnes, les discussions sont franches et respectueuses, ça progresse. Je comprends la volonté d'arriver le plus rapidement possible au monétaire, c'est une danse à deux. On essaie à la table de trouver des solutions à des problèmes et ce n'est pas toujours simple. Il n'y a pas de mauvaise volonté ni d'une part ni de l'autre. C'est de bonne guerre que le syndicat fasse une activité de visibilité pour sensibiliser le public, forcer la main de l'employeur. [...] Tout le monde va exercer le mandat qu'il s'est donné mais je souhaite qu'on trouve des voies de passage le plus rapidement possible», lance-t-elle.

Se disant «très consciente» de l'ampleur de l'inflation, Mme Laberge tient cependant à indiquer que cette variable affecte «tout le monde, pas juste les employés, les organisations aussi». 

«Tout coûte plus cher et notre capacité de payer, elle, n'a pas bougé avec le financement qu'on reçoit. La formule (générale) de financement des universités a été fixée il y a déjà quelques années. On démarre les travaux avec le ministère pour revoir cette méthode», explique la rectrice.