- Ah, oui, c’est vrai. On ne s’est pas vus, encore, en janvier. Bonne année!
- Si on voulait te souhaiter quelque chose, pour 2023?
- La santé!»
Derick Brassard ne dit pas ça sur le même ton que tout le monde.
Le quidam parle de «santé» dans les souhaits de la nouvelle année par simple habitude ou parce qu’il n’a pas envie de plonger dans des conversations plus sérieuses.
Brassard, lui, touche du bois. Il a vraiment besoin de rester en santé.
Il s’est pointé au camp des Sénateurs, en septembre, avec un simple contrat d’essai bon pour quelques semaines. Il devait convaincre le directeur général qu’il était encore capable de jouer dans la Ligue nationale de hockey.
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Quand il a signé son «vrai» contrat, bon pour toute la saison, il devait convaincre l’entraîneur-chef qu’il n’était pas devenu une simple roue de secours. Il s’était donné le défi de faire partie de la formation débutante dans plus de la moitié des matches de l’équipe. C’est un truc personnel. Il veut atteindre le plateau des 1000 matches en carrière avant d’accrocher ses patins. Une question de fierté.
On peut comprendre.
La blessure à Josh Norris lui a ouvert une porte. Il a trouvé en D.J. Smith un précieux allié.
On ne se demande plus vraiment si Derick pourra jouer son 1000e match. On compte désormais les jours qui le séparent de son 1000e match!
Il a pris part lundi au match numéro 982. Dans le meilleur scénario, il jouera son 1000e match dans le Grand Temple du hockey, sur l’avenue des Canadiens-de-Montréal, le samedi 25 février prochain.
Le commissaire Bettman lui remettra son bâton d’argent deux jours plus tard, lorsque les Sénateurs seront de retour à la maison pour affronter les Red Wings de Détroit. Il pourra alors célébrer cet exploit avec ses amis de l’Outaouais qui le soutenaient avant même qu’il soit célèbre.
Le chemin semble tracé. Le seul élément qu’il ne contrôle pas, c’est la santé.
«J’essaie vraiment de savourer chaque moment à l’aréna. Je suis content quand je suis avec les gars, m’a-t-il dit, avant de sauter sur la patinoire pour affronter les Predators. Tu ne sais jamais combien de temps tu vas jouer. J’essaie vraiment d’en profiter au maximum.»
Brassard parle comme un type qui commence à se rendre à l’évidence.
«Je suis parfaitement conscient que j’ai 35 ans, me dit-il. Et je ne sais vraiment pas ce qui va m’arriver, après ça.»
Nous allons atteindre le stade de la mi-saison, cette semaine. Il restera sept courtes semaines à écouler avant la date limite des transactions.
À cette période de l’année, les dirigeants allumés et responsables ont déjà une bonne idée de leur stratégie. Ils savent où ils s’en vont.
On a donc le droit de se poser la question. S’il demeure en santé, Brassard pourrait-il continuer d’aider les Sénateurs, l’automne prochain?
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Si on pose la question, directement, au directeur général, on risque d’obtenir une réponse assez vague.
S’il souhaite rajeunir sa formation, il ne sert à rien d’en parler immédiatement. Il a besoin de son vétéran, bien motivé, pour finir la saison.
S’il croit que Brassard peut encore jouer un rôle, il ne sert probablement à rien de montrer son jeu trop rapidement.
Il ne sert à rien de trop en parler avec Brassard, non plus. À 35 ans, il ne contrôle plus grand-chose.
Quand il dit qu’il veut «savourer chaque moment passé à l’aréna», on sent qu’il n’a pas vraiment envie de s’arrêter.
«Les gars qui ont déjà pris leur retraite me disent qu’ils s’ennuient de la routine. Ce qui leur manque le plus, c’est le sentiment d’appartenance à l’équipe. C’est pourquoi j’essaie juste de savourer chaque journée.»
En rentrant à Ottawa, pour effectuer un deuxième séjour avec les Sénateurs, il a découvert un groupe de joueurs qui lui ressemblent. Ils sont plus jeunes, oui, mais ils ont la même passion.
«Ce que j’aime, ici, c’est que les gars sont passionnés», confie-t-il.
Le terme «passion» est assez vague. Surtout au hockey. Brassard parle ici d’athlètes qui bouffent du hockey, 24 heures par jour, sept jours par semaine.
«Les jeunes aiment se retrouver sur la glace. On regarde toujours le hockey, ici, à la maison ou sur la route. Sérieusement, sur la route, on se retrouve toujours dans la chambre d’un gars et on regarde des matches ensemble. On a vraiment un bon vestiaire. On a des bonnes personnes. Je suis capable de voir les gars connaître du succès, ici pendant de nombreuses années.»
Brassard constate, comme tout le monde, que le «noyau des Sénateurs sera bon pour plusieurs années». Il ne devrait pas y avoir de place dans le top-6 à l’attaque prochainement. Dans le top-9 non plus, d’ailleurs.
Quand il est question du quatrième trio, c’est moins clair. Pour être poli, disons qu’il n’a pas été une force de l’équipe, jusqu’à présent, cette saison.
Si Brassard peut continuer de jouer de façon responsable, s’il peut gagner des mises en jeu, s’il peut dépanner en cas de besoin dans la deuxième vague du jeu de puissance...
Sa carrière n’est peut-être pas sur le point de s’arrêter.