Tirs groupés contre l’Université d’Ottawa au parlement

La décision de l’Université d’Ottawa d’interdire aux médias la prise d’images lors d’une conférence de l’ambassadeur de Chine au Canada était «une erreur» a déclaré le premier ministre Justin Trudeau. Libéraux et députés de l’opposition ont dénoncé cette situation qu’ils qualifient d’entrave à la liberté de presse.

La décision de l’Université d’Ottawa d’interdire aux médias la prise d’images lors d’une conférence de l’ambassadeur de Chine au Canada était «une erreur» a déclaré le premier ministre Justin Trudeau. Libéraux et députés de l’opposition ont dénoncé cette situation qu’ils qualifient d’entrave à la liberté de presse.


L’Université d’Ottawa a dit avoir exclu les caméras de télévision durant la conférence publique de l’ambassadeur Cong Peiwu, lundi après-midi, puisque ce dernier aurait refusé de participer à l’événement en leur présence. 

L’ambassadeur Cong Peiwu

«Au Canada, on ouvre surtout à des gens qui ont un profil public, les médias doivent avoir accès à ça», a déclaré M. Trudeau qui a dit ne pas avoir le fin détail de ce qui s’était produit à l’Université d’Ottawa.



Le premier ministre canadien, Justin Trudeau 

Plusieurs de ses ministres ont semblé surpris et pris de court par la décision de l’université. 

«Je vais voir et je vais essayer de comprendre ce qui s’est passé. La liberté de la presse, c’est important pour moi. Comme vous voyez aujourd’hui, je suis devant vous», a déclaré Mona Fortier. La présidente du Conseil du trésor est aussi la députée d’Ottawa-Vanier, qui comprend l’Université d’Ottawa sur son territoire.

La présidente du Conseil du trésor et députée d’Ottawa-Vanier, Mona Fortier

«Un problème majeur»

Sur Twitter lundi, l’Ambassade de Chine au Canada a parlé d’un «grand succès» et que l’événement avait aidé des étudiants de l’université à mieux comprendre les politiques étrangères et domestiques du gouvernement chinois. 

«Des journalistes des médias canadiens pertinents étaient présents», a relevé l’ambassade.

Or, ce n’est pas suffisant aux yeux de l’opposition conservatrice qui estime qu’Ottawa doit convoquer l’ambassadeur pour le réprimander. 

«On a un problème majeur. On ne peut pas accepter ça. Je m’attends qu’il y ait une réaction forte auprès du gouvernement chinois et de l’ambassadeur pour dire qu’ici, ça ne se fait pas», a déclaré le lieutenant politique du Parti conservateur pour le Québec, Pierre Paul-Hus. 

Le lieutenant politique du Parti conservateur pour le Québec, Pierre Paul-Hus

En entrevue au Droit, le porte-parole conservateur en matière d’Affaires étrangères Michael Chong a accusé l’Université d’Ottawa de s’être «inclinée devant Pékin».

«Les universités doivent présenter des débats publics, mais quand une personne veut utiliser une université pour avancer sa cause, elles devraient s’assurer que les médias canadiens aient accès à l’événement», a-t-il dit. 

Dans une déclaration écrite, l’Université d’Ottawa s’est engagée à «être plus claire avec ses conférenciers avant la tenue des événements sur la présence possible des médias électroniques» pour éviter que «cette situation regrettable» se reproduise.

Au parlement, le chef du Bloc québécois Yves-François Blanchet a rappelé que l’Université d’Ottawa a fait l’objet de vives controverses dans les dernières années au sujet de la liberté d’expression et d’enseignement sur son campus.

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet

«Il faudrait peut-être avertir l’Université d’Ottawa que le mot ‘’diplomate’’ ne s’applique pas si facilement à quelqu’un qui représente le Parti communiste chinois. On parle plus d’intimidateur. Donc, que l’Université d’Ottawa se soit prêtée à cela me semble indigne d’une institution qui est censée jouer un rôle fort auprès d’une jeunesse», a-t-il dit avant d’entrer à la Chambre des communes.



Un autre incident

Cette affaire n’est pas sans rappeler la sévère réprimande du ministre des Affaires étrangères chinois en 2016, Wang Yi, à une journaliste canadienne qui l’avait interrogé au sujet du respect des droits de la personne en Chine. 

Aux côtés du ministre canadien des Affaires étrangères de l’époque, Stéphane Dion, Wang Yi avait sermonné la journaliste disant qu’elle agissait de manière «irresponsable». 

À l’époque, M. Trudeau avait publiquement exprimé son «mécontentement» à la suite de cet événement et de hauts fonctionnaires avaient interpellé le ministre chinois et l’ambassadeur de Chine au Canada. 

Personne au sein du gouvernement fédéral n’a évoqué la possibilité que l’ambassadeur Cong Peiwu soit interpellé après l’incident survenu à l’Université d’Ottawa.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh

Le chef du NPD Jagmeet Singh voudrait voir Ottawa protéger les valeurs et les intérêts canadiens, dont la liberté de presse, dans des situations isolées comme celles-ci. 

«C’est quelque chose qui est sérieux et on doit prendre au sérieux cette question. L’approche chinoise au Canada, c’est quelque chose pour laquelle on doit avoir une bonne réponse», a déclaré M. Singh.