Cela se passe à l’école Oakville Trafalgar High School en banlieue de Toronto.
Kayla Lemieux, qui aurait commencé sa transition l’an dernier, enseigne les technologies de fabrication en atelier, son attirail grotesque et vulgaire à la vue de tous, apparemment un trip fétichiste dont il est difficile de saisir le sens en plein milieu de travail.
Seule conclusion possible: ses élèves, surtout des gars, étudient dans un environnement pornographique incroyablement injurieux pour les femmes.
Passons pour la sécurité: dans une vidéo, on voit cette personne manier une scie ronde à bout de bras, sa prothèse occupant tout l’espace entre elle et l’outil. C'est suffisamment étrange pour croire au canular.
S’appuyant sur la charte des droits de l’Ontario, l’école et la commission scolaire de Halton ont pris parti pour Kayla Lemieux au nom de l’inclusivité, de l’identité et de l’expression de genre et du respect de la diversité corporelle. L’école planche même sur un plan pour assurer la sécurité de ‘l’enseignant.e’ en cas de manifestations par des parents furieux.
«C’est un professeur très efficace. Tous les enfants adorent être dans sa classe», a déclaré la présidente de la commission scolaire, Dr Margo Shuttleworth, au Toronto Sun. Je n’en doute pas…
Si je comprends bien ce raisonnement, au nom de l’expression de genre, les profs pourraient enseigner nus? Confrontés à ce délire soi-disant progressiste, ne vous demandez pas pourquoi la droite dure s’installe même chez nous.
L’histoire, révélée par le site féministe Reddux, a fait le tour du monde, mais silence radio au Québec. Craignons-nous d’être traités de transphobes? Perso, je m’en tartine des deux bords de la tranche.
Mais ce n’est pas pour cela que j’ai changé mon sujet à la dernière minute.
Lundi matin, jour des funérailles d’Elizabeth II, j’ai assisté à une cérémonie commémorative en son honneur au cénotaphe de ma petite ville franco-ontarienne, Alexandria, collée sur la frontière avec le Québec, épicentre de la lutte des franco-ontariens pour l’éducation en français.
J’étais curieuse de savoir si l’événement allait attirer une foule (une soixantaine de personnes, dont des vétérans). Après qu’ait résonné la dernière note des cornemuses, j’étais meurtrie et humiliée, mais surtout enragée.
Le monument rend hommage aux soldats d’Alexandria tués lors des deux grandes guerres mondiales dont des Daoust, Desjardins, Vian, Quenneville, Parent, Lalonde, Lapierre, Legault, Asselin, Cholette, Jodoin, Bédard, Chevrier, Denis, Dufresne, Jacques, Jardin, Dandurand, Labelle, Lavigueur, Parent, Périard, Rochon, Blanchard, Filion, Hurtubise, Gravel, Jacques, Lebeau, Lefebvre, Montreuil, Poulin et Samson.
De jeunes Canadiens-français morts au champ d’honneur pour défendre la liberté entre 1939 et 1945, et, ironiquement, l’empire britannique en 1914 avec leurs frères d’armes English et Scottish Canadians.
À portée d’oreille de leurs fantômes, discours, prières, tout s’est déroulé en anglais. On a daigné chanter une strophe du Ô Canada en français. C’est tout. Même pas un petit «bonjour».
Quelle insulte, quel manque de respect, quelle gifle!
À la toute fin, je suis allée parler au maître de cérémonie pour lui exprimer ma colère - et ma tristesse car je me suis mise à pleurer. C’est alors qu’il m’a dit, avec cet accent franco-ontarien chantant, «vous avez raison, je n’y ai pas pensé». Et il m’a chuchoté son nom, un nom français. «Nous ferons mieux la prochaine fois», m’a-t-il promis.
Soyez assurés que je retournerai au cénotaphe le 11 novembre pour le vérifier.
Alexandria est une ville bilingue, avec son Shoppers’ Drug Mart et son Jean Coutu, sa Caisse populaire pharaonique et sa modeste Royal Bank ainsi que la nouvelle Buvette du marché qui enfin propose autre chose que des pizzas, des «wraps» et des hamburgers. Impossible d’ignorer que des francophones vivent ici depuis la création de l’Ontario.
Je défendrai toujours la cause des francophones hors-Québec mais leur vitalité s’écoule comme le sang d’une plaie ouverte.
Défendre l’identité de genre, c’est la mode. Passons. Mais l’identité profonde d’où jaillit le français qui confirme l’existence au Canada, et au Québec, d’un peuple fondateur distinct, qui s’en préoccupe encore?
Nous, héritiers du labeur de nos ancêtres, avons déjà entamé notre procession vers la crypte où reposent nos espoirs plombés par le multiculturalisme et l’indifférence du ROC.
Lise Ravary est journaliste depuis 40 ans et a tout fait dans le métier, que ce soit à la radio ou dans des magazines et des journaux, de Montréal à Toronto, en passant par Londres et Alexandria, avant de devenir observatrice et commentatrice à temps plein. On peut lire ses opinions dans nos pages deux fois par semaine.