Chronique|

Une rentrée parlementaire calme en apparence

Les élections provinciales du 2 juin dernier n’ont pas procuré de surprise, laissant place à une nette victoire des conservateurs. Neuf semaines plus tard, le discours du Trône prononcé mardi et marquant la rentrée parlementaire fut prévisible et convenu.

CHRONIQUE / Les élections provinciales du 2 juin dernier n’ont pas procuré de surprise, laissant place à une nette victoire des conservateurs. Neuf semaines plus tard, le discours du Trône prononcé mardi et marquant la rentrée parlementaire fut prévisible et convenu.


Le traditionnel exercice voulant que la lieutenante-gouverneure de l’Ontario, Elizabeth Dowdeswell, lise le discours écrit par le gouvernement dévoilant ses priorités pour la nouvelle législature, a été placé sous le sceau de l’inflation.

Sauf que le discours de Mme Dowdeswell ne comportait pas de solutions concrètes face à la hausse des prix, sinon les mêmes constats accablants partagés par les Ontariens depuis plusieurs mois. «Il n’existe pas de large consensus sur la vitesse à laquelle elle reviendra à des niveaux normaux.»

Sur la pénurie de main-d’œuvre en santé, le gouvernement a vanté les investissements des derniers mois, sans pour autant donner des détails et réponses fortes au vu de l’aggravation de la crise. Au mieux, la lieutenante-gouverneure a fait référence à la fermeture récente un à un des centres d’urgences dans les hôpitaux de la province, qualifiant la situation de «facteurs de stress à court terme».

Offerte le même jour que le discours du Trône, la mise à jour du budget provincial n’a là encore pas auguré de surprises. Le document s’avère quasiment une copie conforme de celui déposé en avril dernier, peu avant les élections. Parmi les quelques exceptions: 225 millions de dollars sont ajoutés pour l’éducation en paiement direct pour les parents.

Réélu confortablement avec 83 députés sur 124 à Queen’s Park, le Parti progressiste-conservateur au pouvoir n’avait pas d’intérêt à infléchir sa vision politique. Cette rentrée parlementaire confirme que deuxième mandat du premier ministre Doug Ford sera comme le premier basé sur la création d’emplois, la croissance, avec une attention marquée pour la lutte contre le déficit budgétaire.

Au final, l’annonce du ministre du Logement et des Affaires municipales, Steve Clark, le lendemain, a quelque peu éclipsé le discours du Trône et la mise à jour budgétaire. Conformément à cet objectif de croissance, l’équipe Ford veut conférer aux maires de Toronto et d’Ottawa un droit de veto sur les règlements qui entrent en conflit avec les priorités provinciales, comme la construction de logements.

Le but de M. Clark par ce projet de loi est louable: répondre au plus vite à la pénurie par la construction urgente de logements. En d’autres mots, le projet permettrait aux maires de ces deux villes d’annuler l’approbation par le conseil d’un règlement, comme un règlement de zonage, qui entraverait un ensemble de «priorités provinciales» qui seront énoncées plus tard dans les règlements.

Bien que séduisant et pragmatique sur le papier, le projet de loi de M. Clark comporte plusieurs zones d’ombres qu’il s’agira d’éclaircir. D’une, ce pouvoir accru pour les maires devra être utilisé avec parcimonie, au risque de devenir un déni pour la démocratie et l’ensemble des représentants municipaux.

Par ailleurs, la construction à tout prix, même avec des motifs vertueux, ne doit pas faire abstraction des dangers d’une «urbanisation de masse». À Ottawa, la multiplication des grands immeubles résidentiels sous l’impulsion du maire Jim Watson a mené certains quartiers du centre-ville à perdre leur âme, obligeant plusieurs résidents à fuir pour les banlieues.

En réalité, le projet de loi de M. Clark pourrait rencontrer beaucoup plus de résistances que prévu. Et contrebalancer l’idée d’une rentrée parlementaire d’apparence trop calme.

Sébastien Pierroz est journaliste et producteur pour la franchise d’actualité ONFR+ du Groupe Média TFO