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J’étais presque un personnage du roman La Maison d’Emma Becker que je suis en train de lire (magnifique). Comme si le fait de porter un chandail sans cacher-ce-sein-que-je-ne-saurais-voir était la plus honteuse des abjections.

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Sauf qu’il faisait chaud. Sauf que j’étais bien, comme ça. Sauf que je ne devrais pas être obligée de me justifier. Une femme ne devrait pas justifier son linge, excuser comment elle le porte, ni comment elle se sent.

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Est-ce qu’une femme peut être une femme sans être dérangée ? Plus précisément, une femme peut-elle être une femme sans être sexualisée ; sans être soit une mère, une putain, une vierge — ou une sainte-nitouche, une mariée, une dévergondée. Sans être belle ? Convoitée ?

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Le sans-brassière n’est pas une invitation. Pas une invitation à parler, à déranger, à regarder, à juger.

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Le sans-brassière n’est pas une technique de séduction. Ce n’est pas une offrande. Les bouts pointus existent ; ils sont là comme les doigts, le nez, les veines, les ongles.

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L’été arrive. Les canicules sont et seront monnaie courante. Avez-vous déjà porté un soutien-gorge dans une canicule ; ce tissu collé, presque soudé à la peau, sans place pour bouger, pour aérer, pour respirer ?

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Puis, il n’y a rien de plaisant dans les cerceaux de métal, cette clôture qui marque la peau et enserre le cœur.

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Cachez ce confort

Pour enlever un soutien-gorge, on doit se tordre les deux bras, exercer un pli de coude, une torsion de poignet — nullement naturels pour le corps — pour attraper l’agrafe, glisser les petits crochets de métal l’un sur l’autre, puis : la délivrance.

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Un des multiples bénéfices de ne pas porter de soutien-gorge est la sensation de ton corps au complet, sans qu’un étau vienne te claquemurer le torse — puisqu’il le faut pour avoir de « belles boules ». Des ronds parfaits, dont il ne faut surtout pas voir les mamelons — va pour le reste de la peau. Le rosé, le pointu, sont-ils si terribles ? C’est qu’ils pointent au sexuel, dit-on. Pas pour les hommes, cela dit, quand ils ont froid et qu’on voit.

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Les femmes ont droit aux montagnes, mais pas aux sommets.

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Ceci est un hommage

Un hommage au confort, qui devrait passer au premier plan, dans les esprits.

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Un hommage aux seins, comme aux mains, comme au nombril, parties de la beauté ponctuelle de chacun — moteur de mouvements. L’érotisation des seins se trouve dans l’intimité. La rue, le centre d’achat, le métro, l’épicerie, non.

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Prends le droit du confort de tes seins. Tu marches, manges, bouges ton diaphragme. Ton droit de confort est là. Tu as la permission de laisser respirer ton corps, de profiter du dehors, du dedans, avec tous tes membres. Les bras au repos ; les bras en l’air. En étirement. En allaitement. En une démarche rapide. En une danse. Quoi que tu sois, qui que tu sois, laisse-toi être.

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Que tes seins soient 32, 36, de toutes les lettres de l’alphabet, qu’ils aient été achetés ou non, que les petits motifs de cœur soient dont cute sur les bonnets, il n’en demeure pas moins que ta poitrine, ta peau, tes formes de toute nature sont une beauté qu’aucune armature ne pourra jamais égaler. Parce que c’est la tienne.

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Comme un grain de beauté sur la bouche, des veines lumineuses, des tics de main.

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Prends le droit de ton corps entier.

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