Chalk River: l’incident de 1988

Le laboratoire nucléaire canadien à Chalk River

Les plus vieux se souviendront sans doute de l’inquiétude suscitée dans la région, en décembre 1988, par ce déversement de quelque 500 litres d’eau lourde radioactive dans la rivière des Outaouais, provenant des installations nucléaires de Chalk River. Les laboratoires de recherche ont beau être à 170 km, pour les Gatinois qui puisent leur eau potable dans la même rivière, ils n’avaient jamais semblé aussi proches.


L’incident de 1988 s’est étiré pendant plus d’un mois dans la rivière des Outaouais. Le rapport précise que le panache d’eau radioactive a eu un effet sur la qualité de l’eau de la rivière dans la région pendant 22 jours. Des concentrations de tritium [une substance radioactive que les usines de production d’eau potable sont incapables de traiter] ont été décelées dans l’eau à partir du 16e jour après l’incident de Chalk River, et ce jusqu’à 38 jours après le déversement. 

Les concentrations maximales ont été détectées au 21e jour. Au plus fort de la crise, les concentrations maximales de tritium mesurées aux prises d’eau d’Ottawa ont atteint 440 Becquerels/litre. Selon la Commission canadienne de sûreté nucléaire, la concentration maximale acceptable de tritium est de 7000 Bq/litre. En 2009, le Conseil consultatif sur les normes de qualité et d’analyse de l’eau potable de l’Ontario a proposé d’abaisser cette limite à 20 Bq/litre, mais le gouvernement n’y a pas donné suite.

Le niveau de potentiel de risque associé à un déversement accidentel de substance radioactive dans la rivière des Outaouais est jugé «faible».

En 1988, les usines de production d’eau potable Lemieux et Britannia, à Ottawa, ont été avisées à temps de l’incident survenu à Chalk River. Aujourd’hui, la Ville d’Ottawa prélève systématiquement des échantillons d’eau dans la rivière des Outaouais afin de s’assurer qu’il n’y a pas de problème en provenance de Chalk River, explique Sarah Dorner, professeur à Polytechnique Montréal et cotitulaire de la Chaire industrielle en eau potable.

Le système de communication avec la Ville d’Ottawa est hyper rapide, assure-t-elle. Dès qu’il y a un événement en lien avec la rivière à Ottawa, on est mis au courant.

«C’est un enjeu qui préoccupe l’Outaouais, mais aussi la grande région de Montréal, dit-elle. Les analyses faites à Ottawa sont partagées grâce à un système de suivi et de communication.» La directrice du service de l’environnement de la Ville de Gatineau, Chantal Marcotte, abonde dans le même sens. «Le système de communication avec la Ville d’Ottawa est hyper rapide, assure-t-elle. Dès qu’il y a un événement en lien avec la rivière à Ottawa, on est mis au courant.»

La Ville de Gatineau n’a plus la mémoire corporative de ce qui avait été fait lors de l’incident de 1988, mais Mme Marcotte, assure qu’il serait possible de fermer les prises d’eau potable des usines d’Aylmer, Hull et Gatineau et de fonctionner sur les réserves pendant un certain temps. Elle ajoute que les usines sont aussi interconnectées, donc qu’elles peuvent s’approvisionner une l’autre en cas d’urgence. Cette fonctionnalité augmente la résilience des usines, note Mme Dorner.