Blessé, Mathieu Joseph a regardé la rencontre dans les gradins. Il n’était pas seul. Il avait un invité spécial.
Son nom: Anthony Allain-Samaké.
On a parlé d’Anthony, dans les différentes plate-formes du Droit, au début du mois d’avril. Il a quitté son équipe de calibre M15 AAA, en Outaouais. Il a été la cible de commentaires racistes, tout au long de la saison. Au terme d’une enquête, certains de ses coéquipiers ont été suspendus.
Gatineau est une petite grande ville.
Il se trouve que Joseph a de la parenté, de l’autre côté de la rivière des Outaouais.
Il se trouve, aussi, que son oncle connaît un peu la famille Allain-Samaké.
«Honnêtement, j’ai été un peu slow avant de contacter Anthony», a dit Joseph, presque mal à l’aise, quand je l’ai accroché au deuxième entracte.
J’ai fait mes recherches. J’ai lu des articles. Son histoire m’a interpellé.
«Ce sont des choses qui me sont arrivées, aussi.»
Joseph précise. «Ce n’était pas aussi intense que ça.»
Il n’a jamais joué avec un coéquipier ouvertement raciste.
Il a encaissé des commentaires dans le feu de l’action, sur la patinoire.
Il a souffert des préjugés.
«On tirait des conclusions sur le type de personne que j’étais, à cause de la couleur de ma peau. Des stéréotypes, tu sais.»
«Avec tout ce qui est arrivé, au cours des dernières années, on devrait retenir des leçons. On devrait s’améliorer. Des incidents continuent de se produire. C’est triste.»
Mathieu Joseph espère que son nouvel ami ne se laissera pas décourager. «J’espère qu’il ne perdra pas le goût de jouer au hockey.»
Joseph a bien l’intention de garder le contact.
«J’ai dit ça dans d’autres entrevues. Si je suis capable d’avoir un impact sur la vie d’une personne. Si je peux être un modèle pour un jeune, j’aurai fait ma job. C’est comme ça que le sport grandit.»
«On fait des pas dans la bonne direction.»
Joseph ne réalise même pas à quel point c’est vrai.
Il vient de se joindre aux Sénateurs. Il ne peut pas savoir à quel point son équipe a besoin de solides ambassadeurs, auprès de la jeunesse francophone.
Jeudi, il a trouvé un moyen de marquer de gros points, dans un match où les Sénateurs ont été blanchis. Il a marqué de gros points sans même enfiler son uniforme.
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La saison est finie. Ou presque. Il reste un match à disputer, mais c’est un match sur la route. On a presque l’impression qu’il ne compte pas.
Quand les Sénateurs ont salué leurs partisans de Kanata, au terme du match de jeudi, il flottait un parfum de finalité dans l’air du Centre Canadian Tire.
On a l’impression que la saison est déjà finie.
On a la curieuse impression, aussi, que la prochaine saison débutera très bientôt.
Un peu plus et j’écrirais qu’elle a déjà débuté.
J’ai eu cette curieuse impression durant la conférence de presse d’avant-match de D.J. Smith.
Il avait de l’énergie, le coach, cette semaine. Il n’avait pas l’air d’un type qui compte les dodos avant les vacances.
Un collègue lui a posé une question qui lui donnait l’occasion de se lancer dans un bilan.
Je ne me souviens pas de la question, exactement, mais il était question du scénario qui se répète. Encore une fois, les Sénateurs ont complété la saison en force, alors qu’ils étaient éliminés.
Comment pourrait-on éviter que le scénario se reproduise, encore, l’an prochain?
Smith a presque mordu à l’hameçon. Quand il a commencé à répondre, il semblait sur le point de promettre quelque chose aux partisans.
«Vous savez, Tim Stützle a fait de grands pas vers l’avant. Alex Formenton aussi. Il a joué une saison complète dans la Ligue nationale, maintenant. Tous nos jeunes joueurs continuent de progresser.»
Smith s’est ressaisi.
«Vous savez quoi? La pire chose que je pourrais faire, en ce moment, c’est parler. Maintenant, il faut agir.»
«Nous savons ce que nous avons à faire. Les joueurs savent, eux aussi. Ils ne veulent pas subir une autre sortie hâtive. Ils ont envie de jouer des matches importants. Tout ce qu’ils doivent faire, c’est s’entraîner avec sérieux, soigner leurs blessures et nous revenir à la fin de l’été avec la conviction qu’ils peuvent gagner chaque match.»
«Nous avons réussi à bien nous débrouiller, ces dernières années, dans des matches où nous devions affronter des équipes de très grande qualité. Si nous revenons l’an prochain, en ajoutant quelques pièces à notre casse-tête, je suis convaincu que nous pourrons passer à la prochaine étape.»
«Je n’ai pas besoin parler, vraiment. Il ne sert à rien de commencer à parler de ce que nous devrons faire l’an prochain. Il faut simplement agir.»