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La ministre des Finances Chrystia Freeland promet des «investissements intelligents» et le titre de son budget 2022-2023 résume ses intentions: «Un plan pour faire croître notre économie et rendre la vie plus abordable».

«En ce qui concerne toutes les incertitudes auxquelles les Canadiens font face, je veux aussi assurer les Canadiens que c’est une approche fiscale économique responsable», a déclaré la ministre Freeland.

Après la plus importante récession économique depuis les années 30, le Canada a fait le plein d’emplois qui avaient été perdus dans les deux dernières années. Le taux de chômage atteint les 5,5%, les revenus sont en forte hausse et le déficit pourrait passer de 114 milliards de dollars en 2022 à 53 milliards l’an prochain.

Le gouvernement estime que le contexte économique mondial actuel est «très incertain», notamment en raison de l’inflation qui sera en hausse partout dans le monde pour encore plusieurs mois.

La ministre des Finances ne prévoit pas prioriser le retour à l’équilibre budgétaire de sitôt. Le Canada empruntera de l’argent pendant encore au moins cinq ans, mais Ottawa envisage que le déficit fondra d’année en année pour atteindre les 8 milliards en 2027.

«Nous devons continuer d’investir dans la croissance économique du pays en raison des changements structurels qu’on voit en ce moment dans le monde économique. Le Canada ne peut pas rester immobile», a déclaré un haut fonctionnaire de l’État.

Des milliards en nouvelles dépenses

Et pour ne pas rester immobile, le gouvernement sort son chéquier et ses ambitions sont grandes. Il veut faire en sorte que 3,5 millions nouveaux logements soient construits dans les 10 prochaines années.

Ottawa créera d’ailleurs un fond pour accélérer la construction de 100 000 nouveaux logements nets d’ici cinq ans et instaurera le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété, tout en doublant le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation.

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Dans le cadre de son alliance avec le NPD qui le garderait au pouvoir jusqu’en 2025, le gouvernement libéral devait rendre la vie des Canadiens plus abordable. L’une des mesures phares était le lancement d’un programme de soins dentaires.

Ainsi, les familles au revenu inférieur à 90 000$ pourront bénéficier de ce programme qui sera d’abord réservé aux jeunes de moins de 12 ans cette année, puis pour les moins de 18 ans l’an prochain. Montant de la facture? 5,3 milliards sur cinq ans.

Mais il s’engage aussi à établir un réseau national de bornes de recharges et de continuer à rendre les véhicules zéro émission plus abordable en injectant 3 milliards.

Ottawa établira un fonds de croissance pour attirer des dizaines de milliards de dollars en capital privé pour concrétiser son virage vert.

«La vie des gens n’est pas changée. [Le programme de soins dentaires] peut changer les choses, sinon il n’y a pas de gestes flamboyants pour changer les choses à part ceux qui veulent s’acheter une première résidence», explique le professeur de fiscalité à l’Université de Sherbrooke, Luc Godbout, en entrevue au Droit.

Le budget de la Défense nationale gonfle

La guerre en Ukraine occupe une place importante dans le budget de cette année et le gouvernement promet d’en faire plus pour assurer la sécurité nationale et prendre une plus grande place sur la scène internationale.

D’abord, il offrira jusqu’à 1 milliard de dollars en nouvelles ressources sous forme de prêt au gouvernement ukrainien par l’intermédiaire du Fonds monétaire international et 500 millions de dollars supplémentaires en aide militaire.

Puis, le gouvernement s’engage à augmenter de 8 milliards le financement du ministère de la Défense nationale dans les cinq prochaines années.

L’enveloppe de la Défense nationale avoisinera les 30 milliards en 2023 et atteindra les 40 milliards en 2027. Le budget de la défense nationale aura doublé durant la décennie 2017-2027.

Ces investissements supplémentaires ne permettront pas au Canada d’atteindre le seuil des 2% de son PIB réservé à la défense, tel que le demande l’OTAN. À la fin de l’année financière, 1,5% du PIB sera destiné à ce secteur.

«On a des dépenses plus élevées qu’avant et pour dire la vérité on dépense plus pour la défense qu’on avait planifié avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie. La situation dans le monde a changé et c’est nécessaire, je suis d’accord de dépenser plus. Mais c’est important de faire des dépenses dans une manière planifiée et dans une manière efficace», a déclaré Mme Freeland.

Plus de revenus

«Par ailleurs, Ottawa anticipe que ses revenus budgétaires passeront de 316 milliards en 2022 à 394 milliards en 2023.»

Si les contribuables n’ont pas à payer davantage d’impôts, les institutions financières comme les banques et les compagnies d’assurances-vie verront leur impôt fédéral passer de 15 à 16,5%. Conjuguée à un dividende temporaire, cette mesure générera des revenus de 6,1 milliards sur cinq ans.

Les libéraux injecteront 1,2 milliard sur cinq ans dans l’Agence du Revenu du Canada pour élargir les audits des grandes entités et s’attaquer à l’évasion fiscale. Pour chaque dollar qu’il investit dans l’ARC, le fédéral évalue qu’il a généré cinq dollars de 2016 à 2021. Il prévoit ainsi recouvrer des revenus de 3,4 milliards sur cinq ans de cette mesure.

Ce budget survient alors que les deux dernières années ont été marquées par bon nombre de programmes spéciaux pour répondre à la pandémie de COVID-19. Le gouvernement a décidé de mettre fin à ces programmes, ce qui lui donne une marge de manoeuvre pour ses nouveaux investissements.

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Même si l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) se réjouissent des nouveaux investissements qui rendront la vie des Canadiens plus abordables, ils disent de part et d’autre avoir de sérieuses préoccupations.

C’est que le budget 2022-2023 déposé jeudi par la ministre des Finances Chrystia Freeland chiffre à 6 milliards de dollars sur cinq ans la somme que le gouvernement Trudeau souhaite récupérer dans le cadre d’un examen des politiques stratégiques de ses programmes.

En décembre, le premier ministre Justin Trudeau avait inclus dans la lettre de mandat de la présidente du Conseil du Trésor la tâche d’entreprendre cet exercice «pour déterminer dans quelle mesure chaque programme et politique d’importance contribue à relever les plus grands défis de notre époque», dont l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050.

Le budget prévoit que la ministre Mona Fortier pilote l’opération déclinée en deux volets pour d’abord évaluer les programmes, puis déterminer les possibilités d’économiser et de réaffecter les ressources ailleurs au besoin. Cet examen pourrait inclure, par exemple, les biens immobiliers du gouvernement, les déplacements des fonctionnaires et l’amélioration de la prestation de services numériques.

Économies

Ottawa semble vouloir profiter des méthodes de travail adoptées pendant la pandémie, comme le télétravail et le mode virtuel.

«Le gouvernement tente de nous convaincre que cet examen représente un moyen de trouver des économies dans le sillage de la pandémie. Mais l’examen soulève de graves préoccupations et nous en surveillerons le déroulement de près pour que ces “économies” ne soient pas synonymes de pertes d’emplois et d’austérité pour les fonctionnaires», a déclaré le président national de l’AFPC, Chris Aylward.

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Même son de cloche à l’IPFPC, où la présidente Jennifer Carr reconnaît que le télétravail a permis de faire avancer la diversité, l’inclusion et l’équité dans l’appareil gouvernemental, mais qui a encore beaucoup de questions pour la suite des choses.

«Nous nous demandons avec inquiétude si le gouvernement fédéral a tiré les bonnes leçons de ces deux dernières années. Nous espérions voir une approche plus uniforme et cohérente dans l’élaboration des politiques sur le retour au bureau et la création de lieux de travail sécuritaires», a-t-elle dit.

Rapport annuel du greffier du Conseil privé

Cette mesure survient dans la foulée du rapport annuel du greffier du Conseil privé présenté au premier ministre en décembre. Dans ce rapport, il mentionnait que des changements permanents étaient inévitables dans la fonction publique fédérale.

«L’équité, l’optimisation des ressources, l’évitement des conflits d’intérêts et d’autres principes essentiels doivent coexister avec le respect des échéances, la pertinence des résultats et l’innovation», écrivait Ian Shugart, qui est le plus haut fonctionnaire de l’État.

M. Shugart écrivait par ailleurs que les employés de la fonction publique ont travaillé «à la manière d’une bande élastique» durant la pandémie, à la limite de leurs possibilités pour offrir les services aux Canadiens.

«Lorsque la tension exercée sur la bande élastique se relâchera – et avec le temps, c’est ce qui arrivera –, la tendance naturelle sera de revenir à notre situation initiale. Cela ne doit pas se produire», disait-il.

Le gouvernement présentera une mise à jour sur l’avancement de cet examen dans son budget 2023-2024.

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