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Tout comme le couvre-feu québécois était démesuré.

Jamais justifié ni humainement, ni scientifiquement, ni statistiquement.

Avec leurs panneaux de plexi achetés à grands frais, leurs tables distancées, leurs systèmes d’aération mieux que dans bien des espaces scolaires, leurs appareils pour vérifier nos passeports vaccinaux, ils avaient les outils en place pour gérer la contagion.

Si on les avait limités à un pourcentage de leur capacité alors qu’ils l’étaient déjà aussi par les éclosions forçant des fermetures préventives responsables, on aurait pu gérer tout ça en les traitant en adultes.

On a préféré mettre la clé dans leurs portes, temporairement, partout.

Peu importe l’impact éventuel. Peu importe la fragilisation d’institutions qui façonnent nos communautés, culturellement, humainement, économiquement.

•••••

Depuis le début de la pandémie, des secteurs entiers de nos sociétés, comme celui de la restauration, sont traités comme s’ils étaient là uniquement pour répondre aux caprices du monde moderne. Comme si les fermer n’était donc qu’un geste un peu strict de gestionnaires courageux, non superficiels.

Sauf que voilà.

Des milliers de personnes travaillent dans les restaurants, fournissent les restaurants.

Aujourd’hui, ces gens sont ruinés.

Ce ne sont pas juste des comptes en banque qui ont été vidés depuis deux ans, ce sont des cœurs, des réserves d’énergies, des provisions infinies de bonne volonté.

Allez leur parler. Ils sont au bout du rouleau.

Et les meilleurs d’entre eux.

Une autre série de fermetures décrétées par le gouvernement et on pourrait ne jamais les voir rouvrir. Ils ne bluffent pas.

Surtout que repartir la machine n’est pas pour eux une mince tâche.

Au moins Doug Ford a donné aux restaurateurs ontariens une idée de ce qui s’en venait. Il leur a fourni la semaine dernière une série de dates butoirs permettant aux entrepreneurs de planifier.

Au Québec, on donne six jours aux restaurants pour faire un virage en U.

On aurait pu faire mieux, par respect.

Surtout quand on sait tous les autres obstacles qui se dressent sur le chemin d’un éventuel retour à une possible rentabilité pour ces chefs d’entreprise, en commençant par la difficulté d’embaucher du personnel, l’inflation qui mord encore plus dans leurs liquidités et même les pénuries d’ingrédients.

Difficile d’imaginer un concours de circonstances plus difficile. On aurait plus être plus compréhensifs.

Avant la pandémie, en 2018, le Québec comptait 21 000 établissements de restauration commerciale employant plus de 230 000 personnes, qui ont versé 4,5 milliards de dollars en salaires, traitements et revenus d’entreprise. Selon les chiffres les plus récents sur le site du ministère de l’Agriculture, des pêcheries et de l’alimentation du Québec, la pandémie a fait reculer le secteur de la restauration d’environ 30 % en 2020.

Où en est-on maintenant ?

Dur à dire.

Mais on parle de beaucoup de gens affectés. De montants énormes.

•••••

Au Québec, et en Ontario aussi, on a beaucoup compté sur les fermetures pour limiter la contagion du virus. On a fermé les cinémas, les salles de sports, les théâtres, les musées, les boutiques non essentielles, les salons de coiffures, les spas. Et la liste continue.

Récemment, au Québec, on a même fermé les épiceries le dimanche.

À chaque fois, on plaçait des petites entreprises dans des situations précaires. À chaque fois, avec l’air contrit. Mais jamais avec des statistiques précises montrant que les galeries d’art ou les restaurants, ou les fruiteries de quartier étaient des vecteurs de contagion à contrôler à tout prix, même après les campagnes de vaccination.

Lundi après-midi, un restaurateur m’a écrit. «Pourquoi est-ce que les salons de ‘massage’ continuaient à faire clignoter leurs affiches en néon, pendant qu’on emballait des gnocchis à emporter ?»

Bonne question.

Bien des repères ont été perdus à travers tous ces moments de crise.

Bien des questions légitimes n’ont pas été posées.

On n’a pas osé.

Et aujourd’hui, les restaurants ne vont pas bien.

Si on ne veut pas les perdre, il ne faut pas les laisser tomber.

Et pas juste nous les consommateurs.

Nous, les contribuables, nous les gouvernements.

On leur a enfin permis de rouvrir.

Nous devrons aussi les aider à repartir.

Et nous devons développer d’autres idées que les fermer à chaque fois que le virus recommence à nous enquiquiner ou nous terroriser.

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