L’obligation du compostage, la réduction du volume du bac de déchets et la tarification des surplus de matières destinées à l’enfouissement étaient les mesures phares du dernier Plan de gestion des matières résiduelles (PGMR). Elles ont suscité de la grogne, mais elles ont permis d’atteindre, sinon de se rapprocher des objectifs de réduction pour le secteur résidentiel.
107 000 tonnes
Le PGMR 2023-2029, dont la première ébauche a été présentée au conseil municipal mardi, chiffre à 107 000 tonnes le potentiel de détournement de l’enfouissement qui peut être fait à Gatineau dans les filières du compostage, du recyclage et des résidus de construction. La directrice du service de l’environnement, Chantal Marcotte, note que pour les citoyens, les prochaines mesures seront plus du domaine du «raffinement» que de l’imposition des grands changements comme ces dernières années. C’est donc au tour des ICI de jouer.
La marche demeure haute et l’atteinte des objectifs fixés pour les ICI nécessitera des mesures costaudes et une bonne dose de communication et d’accompagnement. Actuellement les ICI ne recyclent que 31% des matières recyclables, alors que l’objectif est de 75%. La situation est encore pire pour les matières putrescibles alors que seulement 6% sont envoyées au compostage. L’objectif est de 60%.
Actions phares
C’est pourquoi l’une des actions phares du nouveau PGMR qui en comptera une trentaine visera particulièrement le secteur de la restauration. De fait, la Ville souhaite rendre obligatoire le recyclage et le compostage pour l’ensemble des ICI dès 2023.
Les industries, commerces et institutions auront le choix d’utiliser le service de collecte de la Ville de Gatineau qui sera élargi, ou de se tourner vers une entreprise privée. Dans le cas du recours au privé, les ICI devront faire la preuve que leurs matières ne vont pas systématiquement à l’enfouissement. À l’image des citoyens, les ICI qui se tourneront vers le service de collecte de la Ville devront en défrayer les coûts par le biais d’une taxe de gestion des matières résiduelles. Celle des citoyens atteint 138$ cette année.
Flexible, mais sans compromis
Le président du conseil municipal, Daniel Champagne, a salué la volonté de la Ville d’offrir une flexibilité aux ICI, mais a tenu à lancer un important avertissement. «Là où je ne serai absolument pas négociable, c’est dans l’atteinte des objectifs, a-t-il affirmé. Je ne veux pas que les ICI voient cette flexibilité comme une permission de ne pas faire de compostage ou de recyclage. Ce n’est pas une méthode pour contourner les objectifs. Il y aura de la communication et de l’accompagnement, mais à la suite de ça, les ICI devront se conformer à nos attentes. […] Il faudra cheminer vers une forme de répression pour ceux qui ne voudront pas se conformer.»
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La mairesse de Gatineau, France Bélisle, a rappelé que ce qui sera demandé aux ICI n’est pas d’en faire plus, mais seulement de faire leur part. Gatineau, a-t-elle dit, ne peut pas porter seule cet objectif de réduction des déchets. Il s’agit, selon elle, d’un «projet de la communauté gatinoise» pour lequel tout le monde et toutes les organisations du territoire doivent mettre la main à la pâte.
Vous pouvez noter ma citation, on sait qu’on va vivre de la grogne, que des gens vont trouver ça compliqué, lourd et difficile, mais c’est ça le changement et c’est vers ça qu’on va, a-t-elle lancé. Notre responsabilité comme Ville sera de créer des conditions de succès pour que ça fonctionne.
Ces conditions de succès dont parle la mairesse passeront inévitablement par la communication et l’accompagnement. «L’atteinte de nos objectifs va dépendre de notre capacité à bien communiquer et accompagner les entreprises, a-t-elle ajouté. La communication ne devra pas venir uniquement de la Ville, mais elle devra se faire par les regroupements commerciaux et les organisations avec qui nous avons déjà des liens. On devra avoir des tentacules partout.»
Consciente que les enjeux des restaurants peuvent être très différents des bureaux ou du secteur de la construction, la mairesse note que la formule du «one size fit all» ne pourra pas être appliquée. «On ne pourra pas se contenter d’une communication unilatérale pour tout le monde, on devra être capable de s’adapter et de la personnaliser en fonction des clientèles à qui on va parler», a-t-elle insisté.
Réduire à la source
Parmi les autres mesures qui feront partie du nouveau PGMR, beaucoup visent le réemploi ou la réduction à la source. La Ville analyse la possibilité d’interdire de jeter du textile aux ordures, une matière dont la présence dans le bac à déchet des Gatinois est en nette augmentation depuis 2013. Une révision de la réglementation sur les boîtes de dons semble inévitable. Une réglementation cherchera à bannir l’utilisation de certains plastiques à usage unique. Des efforts seront faits pour trouver des déboucher en matière d’économie circulaire. Le tri et la valorisation des résidus de construction de rénovation et de démolition deviendront obligatoires à l’obtention d’un permis de construire.
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La conseillère Olive Kamanyana a dit souhaiter que le PGMR comprenne des programmes qui agiraient comme leviers permettant à la Ville d’avoir une influence sur les chaînes d’approvisionnement des entreprises de son territoire afin de réduire à la source les emballages et les plastiques à usage unique. «Le fond du problème se trouve dans notre société de consommation et dans nos modes de consommation, a-t-elle affirmé. On doit sensibiliser les gens à leur façon de consommer. […] Je ne parle pas juste des familles, mais aussi des institutions.»
Anik Des Marais, vice-présidente de la commission de l’environnement croit elle aussi qu’il revient à une institution comme la Ville de Gatineau de sensibiliser les gens à leurs choix comme consommateurs. «Les choix individuels des consommateurs et la façon dont produisent les entreprises de notre territoire ont un effet sur les finances de la Ville, dit-elle. C’est nous qui gérons les déchets ultimes.»
La Ville de Gatineau consultera la population sur son nouveau PGMR au courant du printemps et de l’été prochains. Les modifications découlant de ces consultations auront lieu à l’automne, avant d’être envoyées à Québec pour approbation par le gouvernement. L’adoption du nouveau PGMR doit avoir lieu au début 2023.