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L’Exemple le plus récent: cette loi, promise par les libéraux en campagne électorale, devant immuniser contre d’éventuelles poursuites judiciaires les employeurs qui imposent une obligation vaccinale à leurs travailleurs. Le cabinet du ministre de la Justice, à qui on demandait quand elle serait déposée, a répondu que cela n’avait pas été fait et que cela ne figurait d’ailleurs pas dans sa lettre de mandat. Vérification faite, cette mission n’apparaît dans la lettre de mandat d’aucun ministre. À qui donc échoit cette tâche, a-t-on demandé au bureau de Justin Trudeau? Réponse: aux ministres du Travail et… de la Justice. Une nouvelle tentative au bureau de David Lametti nous apprend alors qu’on «travaille sur les prochaines étapes» de ce projet.

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Doit-on déduire de cette confusion que le gouvernement reconsidère sa promesse? Non, assure-t-on en coulisses. C’est plutôt qu’on se rend compte qu’elle est plus difficile à réaliser qu’on ne le croyait.

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Les professeurs en droit du travail consultés confirment que ce ne sera pas simple. On ne retire pas facilement à un citoyen son droit de faire valoir ses droits. Une des options serait d’imposer la vaccination obligatoire dans tous les secteurs sous juridiction fédérale (banques, télécommunications, etc.). Les employeurs seraient alors de facto dédouanés et les poursuites, redirigées vers le vrai responsable, c’est-à-dire le gouvernement fédéral. L’autre option serait de modifier le Code canadien du travail.

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Dans un cas comme dans l’autre, seuls les employeurs fédéraux seraient protégés, eux qui n’emploient qu’environ 5 % de toute la main-d’œuvre canadienne. Aucun des professeurs consultés n’arrive à imaginer une loi fédérale qui protégerait les autres. On sera donc loin de la promesse libérale, qui laissait miroiter une protection pour tous.

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Il devient urgent de clarifier cette question. Les obligations vaccinales se multiplient au pays. Ottawa en a déjà instauré une pour ses fonctionnaires, ses fournisseurs, les travailleurs des secteurs ferroviaire et aérien et les camionneurs transfrontaliers. Il entend en imposer une sous peu aux camionneurs interprovinciaux et à tous les autres travailleurs sous juridiction fédérale. La Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick imposent la vaccination à leurs fonctionnaires (sans offrir l’alternative de se faire tester régulièrement comme au Manitoba et en Ontario). Terre-Neuve a même élargi cette obligation à une foule de travailleurs, dont ceux des restaurants et des gyms. En Ontario, la société de transport de Toronto et une agence de santé en ont imposé une. Beaucoup d’employeurs privés ont emboîté le pas.

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Résultat: les congédiements pour cause de non-vaccination prolifèrent. Et leurs contestations aussi. Le Globe and Mail rapportait la semaine dernière que les avocats spécialisés en droit du travail disent être «inondés» de messages et avoir sur les bras «des centaines» de dossiers. Les travailleurs contestent leur renvoi sans indemnité (leur non-vaccination étant assimilée à une faute) et plaident que cette nouvelle condition d’emploi ne se justifie pas d’un point de vue sanitaire puisqu’ils sont encore en télétravail.

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Jusqu’à présent, les tribunaux ont fait preuve de déférence pour les pouvoirs publics. Les demandes d’injonction ont presque toutes été rejetées. Les juges ont la plupart du temps fait valoir que cette question relève de l’application des conventions collectives et doit donc être plutôt traitée en arbitrage de griefs. Quant aux non-syndiqués, les magistrats ont fait valoir qu’ils ne sont pas protégés contre les renvois: la seule question en litige est de savoir s’ils ont droit à une compensation financière, ce qui ne constitue pas une urgence commandant une injonction.

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Les non-vaccinés au bûcher

On assiste ces jours-ci à un renversement politique étonnant. L’opinion publique est si déchaînée contre les non-vaccinés qu’il devient politiquement suicidaire de se porter à la défense de ces parias. Un sondage de la firme Maru publié mercredi nous apprend par exemple que 37% des Canadiens accepteraient de carrément interdire aux non-vaccinés l’accès aux hôpitaux, 33% seraient d’accord pour ne pas renouveler leur permis de conduire et 27% voudraient les envoyer cinq jours en prison! Même en Alberta, où l’opposition à la taxe anti-vax de François Legault est la plus élevée, cette position demeure minoritaire à 46%.

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Aussi les ténors de droite tels que Doug Ford en Ontario, Scott Moe en Saskatchewan et surtout Jason Kenney en Alberta empruntent-ils à la gauche ses arguments traditionnels pour dénoncer la taxe québécoise et les obligations vaccinales en général. Jason Kenney invoque en effet la Loi canadienne sur la santé et le droit à la non-discrimination, lui qui dans le passé a plaidé pour plus de privé en santé et a dénoncé l’activisme chartiste des juges. M. Kenney sait que s’il utilisait seulement l’argument conservateur traditionnel de la liberté — incluant la liberté de faire de mauvais choix—, il ne plairait qu’à sa base. En imitant le discours de l’autre camp, il tente de rallier un plus vaste spectre d’électeurs. C’est une façon comme une autre de construire des ponts dans une société polarisée…

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Reconnaissons que si tous les employeurs instauraient une obligation vaccinale, les non-vaccinés perdraient le droit de gagner leur vie. Surtout qu’Ottawa les prive désormais d’assurance-emploi s’ils sont congédiés pour cette raison. On leur dit essentiellement d’aller sur l’aide sociale.

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Un débat s’impose sur la multiplication de ces obligations vaccinales et les conditions auxquelles les employeurs devraient pouvoir les instaurer. Ne serait-ce que pour limiter les contestations qui, par leur multiplication, congestionneront nos tribunaux. Pour cela, compte tenu du pouvoir limité d’Ottawa d’intervenir, il faudra aussi que les provinces s’en mêlent. Mais ça, c’est une tout autre partie de ping-pong.

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