L’été qui a tout changé pour Drake Batherson

Drake Batherson est le meilleur marqueur de son équipe. Pour la première fois de sa carrière, dans la LNH, il produit à un rythme supérieur à un point par match.

Il y a probablement 12 façons d’expliquer le début de saison époustouflant de Drake Batherson avec les Sénateurs d’Ottawa. Le principal intéressé, quand on lui pose directement la question, choisit de rendre hommage à un nouveau collaborateur.


«J’ai commencé à travailler avec Andy O’Brien», a-t-il révélé, dans une longue entrevue téléphonique, plus tôt, cette semaine.

Dans le monde du hockey, O’Brien est un personnage connu. Et respecté.

L’homme de 44 ans, qui est originaire des Maritimes, a remporté deux bagues de la coupe Stanley à titre de Directeur de la science du sport, au sein de l’organisation des Penguins de Pittsburgh.

Il est donc le préparateur physique du plus grand workaholic de toute la Ligue nationale, Sidney Crosby.

Durant la saison morte, O’Brien rentre chez lui. Il passe ses étés dans la région de Halifax. Ça lui a permis de recruter un autre grand perfectionniste, Nathan MacKinnon, dans son écurie.

Batherson, on le sait, provient aussi de ce coin de pays.

« Ça fait quelques années, déjà, que je patine avec Sid, avec Nate ainsi qu’avec les autres joueurs des Maritimes », commence-t-il.

Dans les premières années, Batherson se contentait de s’entraîner sur glace avec les vedettes. En gymnase, il faisait sa petite affaire, de son côté.

«Les autres n’arrêtaient pas de me parler d’Andy», explique-t-il.

L’ailier droit de 23 ans s’est finalement laissé convaincre. Il a décidé de suivre les deux grandes vedettes.

Il n’a pas été déçu.

«Ça m’a vraiment beaucoup apporté. J’ai vraiment appris beaucoup de choses.»

Batherson est le meilleur marqueur de son équipe. Pour la première fois de sa carrière, dans la LNH, il produit à un rythme supérieur à un point par match.

Jeudi, il est officiellement devenu une grande vedette.

Il a été invité à participer au prochain Match des étoiles, durant la fin de semaine des 5 et 6 février, à Las Vegas.

Nous avons contacté Andy O’Brien, plus tôt, cette semaine.

L’entraîneur nous a confirmé que l’été 2021 a été déterminant pour son poulain.

«Quand il s’est joint à nous, il était très vert. Dans certains cas, ça peut être une très bonne chose», croit le préparateur physique.

«Nous avons commencé par lui enseigner la base. Il devait apprendre à faire les mouvements de façon correcte. On essayait aussi de le pousser à se dépasser, jour après jour.»

«Je dois reconnaître que j’ai été surpris par la vitesse avec laquelle il a tout assimilé. Drake est un type étonnant, vous savez. Quand on le rencontre, à l’extérieur de la glace, il n’a rien de bien particulier. Il n’a l’air de rien. Il est, malgré tout, un athlète très doué. Sa coordination main-œil est excellente. Il a donc été capable d’apprendre très rapidement.»

«En fait, je dois avouer que sa courbe de progression m’a vraiment étonné. »

À Pittsburgh, Crosby a remporté la coupe Stanley à trois occasions. Il a pris part aux Jeux olympiques à deux occasions. Chaque fois, le Canada a gagné la médaille d’or.

Leadership

En s’entraînant avec Andy O’Brien, Batherson a fait d’une pierre, deux coups. Ça lui a également permis de se rapprocher du tandem Crosby/MacKinnon.

À Pittsburgh, Crosby a remporté la coupe Stanley à trois occasions. Il a pris part aux Jeux olympiques à deux occasions. Chaque fois, le Canada a gagné la médaille d’or.

L’armoire à trophées de MacKinnon n’est pas aussi garnie, mais on ne peut pas lui reprocher de ne pas essayer!

On se souvient tous de l’entrevue accordée par l’ancien défenseur de l’Avalanche du Colorado, Nikita Zadorov, à un journal russe.

Dans ce papier, on a pu apprendre que MacKinnon a fait bannir la sauce carbonara, jugée trop calorique, dans la salle à manger de l’équipe.

Si vous voulez détruire votre santé, vous le ferez durant l’été. Ici, on veut gagner la coupe, aurait-il annoncé à ses coéquipiers.

Quand il est question de leadership, je dirais que je suis toujours en train d’apprendre. Mais j’ai vraiment envie de prendre plus de place, au cours des prochaines années.

Tout ça pour dire que Batherson côtoie ces deux types chaque jour, durant la belle saison. Il prend des notes.

«L’été dernier m’a vraiment ouvert les yeux», confirme-t-il. «C’était vraiment bon, pour moi, de voir à quel point ils travaillent fort.»

«L’élément le plus important, selon moi, c’est le leadership. Nate et Sid n’ont jamais l’air satisfaits. Ils essaient de s’améliorer un peu, chaque jour. Chaque fois que je les regardais, durant l’été, ils poussaient la machine à 110 %. Je vois la même chose, quand je les regarde en action, durant un match, au mois de novembre. Quand je les regarde, j’apprends des tas de choses au niveau du leadership. Et ce sont des choses que j’aimerais emmener avec moi, à Ottawa.»

À l’automne, Pierre Dorion et D.J. Smith ont choisi leur capitaine. Ils ont déterminé que Brady Tkachuk sera le principal leader des Sénateurs, au cours des sept prochaines années. Du coup, ils ont dit que Thomas Chabot serait son bras droit.

Les bonnes équipes n’ont jamais assez de bons leaders. Batherson peut certainement se faire une place au sein du groupe.

«C’est ma quatrième année dans les rangs professionnels. Nous sommes en train de bâtir quelque chose de bien, à Ottawa. Nous formons une équipe très unie. À l’extérieur de la glace, chacun contribue. »

«Quand il est question de leadership, je dirais que je suis toujours en train d’apprendre. Mais j’ai vraiment envie de prendre plus de place, au cours des prochaines années.»

Sur la patinoire, Batherson veut s’inspirer des deux autres. Il n’est pas entièrement satisfait par son début de saison. Il se croit capable de faire mieux, encore.

«Personne ne pouvait prédire qu’il connaîtrait un si bon début de saison, note Andy O’Brien. Je crois qu’au fur et à mesure qu’il s’améliorait à l’extérieur de la glace, l’été dernier, Drake gagnait aussi en confiance. Il a compris qu’en se poussant à la limite, il était capable de suivre les meilleurs joueurs de toute la ligue.»

La confiance, dans le sport, ça peut mener loin.

Après le travail, il faut savoir s'amuser

Drake Batherson ne fait pas que travailler. Il est aussi capable de s’amuser.

Notre entrevue s’est déroulée dans un contexte plutôt sérieux, au téléphone, mercredi midi. Quand il a raccroché, il a grimpé dans le bus qui partait vers le Scotiabank Saddledome.

À son arrivée, les responsables de la production vidéo des Sénateurs ont eu la bonne idée d’installer un micro sous son équipement, histoire d’enregistrer ses commentaires, durant l’entraînement.

Batherson s’est fait devoir de livrer un bon show. Il a parlé sans arrêt!

Les Sénateurs ont pu produire une vidéo virale d’environ trois minutes, durant laquelle on découvre son côté cabotin.

Il utilise par exemple les numéros de ses coéquipiers pour les interpeller, durant les exercices. Pour une raison qu’on ignore, dans le cas de Norris, il parle français. Avec son accent, on entend davantage «nouf» que «neuf».

Batherson est capable de s’amuser. Parfois, c’est nécessaire.

Les Sénateurs ont joué un seul match, dans le dernier mois. Pour chasser l’ennui, durant cette interminable séquence, le joueur l’a fait avec le jeu.

«Il y a tout plein d’étangs, dans mon voisinage. Mes voisins ont aménagé des patinoires extérieures, un peu partout. Quand je trouvais le temps un peu long, je chaussais mes patins et je sortais pour lancer des rondelles pendant une demi-heure...»

Quand il voulait de la compagnie, ou de l’opposition, Batherson pouvait toujours se tourner vers ses colocataires. Il vit avec des amis de longue date qui sont habiles, sur une patinoire.

«Le hockey, à l’extérieur, c’est parfait, pour s’évader. Il n’y a pas de structure de jeu, sur une patinoire extérieure. On est là pour le plaisir. On essaie de faire des feintes spectaculaires, chaque fois qu’on touche à la rondelle. On ne se casse jamais la tête, quand on joue sur une patinoire extérieure. On est là pour avoir du fun.»

Mark Stone

Mark Stone, le premier modèle

Les statistiques de Drake Batherson font rêver. Les fans des Sénateurs, qui aiment les chiffres, ont tôt fait de tisser une comparaison.

Depuis deux ans, Batherson produit à un rythme d’environ 0,775 point par match.

Au même âge, Mark Stone présentait une moyenne fort similaire de 0,81 point par partie.

La comparaison avec le capitaine des Golden Knights de Vegas n’effraie pas le numéro 19 d’Ottawa.

«C’est drôle d’en parler, maintenant. Quand j’ai été repêché, personne ne me connaissait. Quand on me demandait de décrire mon style de jeu, j’utilisais souvent Stone. Comme lui, je suis un ailier droit costaud qui est fort avec la rondelle. Comme lui, je pense que mon QI de hockeyeur est assez élevé.»

Batherson s’estime chanceux d’avoir pu côtoyer Stone, un peu, avant son départ pour Vegas.

«J’ai joué une vingtaine de matches avec lui, en tout. J’ai aussi appris des choses en le côtoyant. Il est ultra compétitif. Ça saute aux yeux. Il se réjouit autant pour ses coéquipiers, quand ils marquent des buts. C’est sans doute pour cette raison qu’il est le capitaine, en ce moment, à Vegas. Nous sommes tous très contents pour lui.»