Chronique|

Montfort: Le jour où tout a changé

Le 7 décembre 2001 - il y a 20 ans - la Cour d’appel de l’Ontario tranchait dans la cause Lalonde c. Commission de la restructuration des services de santé, aussi connue comme la cause SOS Montfort.

Je l’avoue, j’avais oublié cette date. Je ne me souvenais plus que le 7 décembre est une date qui a marqué l’histoire de la communauté franco-ontarienne.


Je me sens un peu mal. J’aurais dû m’en souvenir. Heureusement que l’équipe de communications de l’Hôpital Montfort était là pour nous le rappeler.

Et vous? Vous en souveniez-vous de cette date?

Le 7 décembre 2001 – il y a 20 ans – la Cour d’appel de l’Ontario tranchait dans la cause «Lalonde c. Commission de la restructuration des services de santé», aussi connue comme la cause SOS Montfort. Les juges confirmaient – à l’unanimité s’il vous plaît – que l’Hôpital Montfort demeurerait ouvert.

En d’autres mots, le 7 décembre 2001 est le jour où l’on a gagné après cinq longues années de lutte. Le jour où la justice a dit aux Francos: vous avez raison, votre cause est juste.

Bien sûr, le gouvernement conservateur de l’Ontario aurait pu porter cette cause devant la Cour suprême. Mais l’avocat qui a défendu SOS Montfort devant les tribunaux, Me Ronald Caza, nous disait de ne pas nous en faire, que le gouvernement de Mike Harris abdiquerait enfin. Et puisque nous avions une confiance absolue en Me Caza, on y croyait. Sauf que… Sauf que nous avions aussi une «méfiance absolue» envers le premier ministre Mike Harris. Et on savait, après cinq ans de lutte, qu’il n’y avait rien à son épreuve. Il aurait bien pu porter cette cause devant la Cour suprême. Mais non. Ronald Caza avait raison.

Deux mois après cette décision historique du 7 décembre 2001, une délégation du gouvernement de l’Ontario s’est rendue à l’Hôpital Montfort pour rencontrer la leader du mouvement SOS Montfort, Gisèle Lalonde, afin de lui annoncer publiquement qu’il n’entendait pas porter la cause devant la Cour suprême. Le drapeau blanc était hissé. Les Franco-Ontariens avaient gagné.

C’est peut-être la raison pour laquelle la date du 7 décembre 2001 est un peu tombée dans l’oubli. À cause de ce petit doute qui persistait. Le gouvernement allait-il porter la cause en Cour suprême?

C’est comme LE BUT de Paul Henderson dans la «Série du siècle» en 1972. Oui, le Canada prenait l’avance 6 à 5 dans son match ultime contre la Russie. Mais il restait 34 secondes à jouer dans la partie. On ne pouvait pas crier «victoire!» tout de suite.

Donc ces deux mois d’attente dans la cause SOS Montfort sont un peu les «34 secondes» de la communauté franco-ontarienne. On n’a pas pu crier «victoire!» tout de suite.

N’empêche que j’aurais dû me souvenir de la date du 7 décembre 2001. Parce qu’elle a changé le cours de l’histoire de la communauté franco-ontarienne et de toutes les communautés francophones au pays. Elle devrait être célébrée chaque année. On se doit de s’en souvenir. 

Cette décision de la Cour d’appel de l’Ontario a tout changé. En ce 7 décembre 2001, les Franco-Ontariens ont obtenu la certitude que plus personne, jamais, ne pourrait s’attaquer à leurs institutions.  

J’aime bien la façon que Me Caza et le Dr Bernard Leduc, PDG de Montfort, ont conclu leur lettre publiée sur nos plateformes: «Aujourd’hui, ont-ils écrit, chaque fois que nous demandons à recevoir des services en français, chaque fois que nous écoutons et lisons les médias en français, et chaque fois que nous parlons entre nous et dans nos familles en français — nous célébrons la décision Montfort.»

Bien dit.


Grand Ralliement de SOS Montfort au Centre municipal d’Ottawa le 22 mars 1997.

***

Petits problèmes de santé obligent, j’ai dû visiter l’Hôpital Montfort à quelques reprises au cours des deux dernières années. J’y ai même séjourné à deux reprises.

Et chaque fois je suis renversé par ce que cette institution est devenue au fil des 25 dernières années, soit depuis sa fermeture annoncée. De ce «petit» hôpital pour lequel on s’est battu corps et âme pendant cinq ans a surgi un hôpital de calibre national qui a doublé en capacité, et qui se classe année après année parmi les meilleurs hôpitaux de recherche au Canada.

Quand je suis là et que je regarde le va-et-vient des professionnels de la santé et des usagers, je me demande ce qui serait devenu de nous, francophones de la grande région d’Ottawa, si nous n’avions pas gagné cette cause.

Le gouvernement voulait fermer Montfort tout en nous assurant que le futur méga-hôpital d’Ottawa allait être bilingue. Que nous n’avions rien à nous inquiéter.

Bullshit. J’ai aussi visité l’Hôpital d’Ottawa au cours des deux dernières années. Son personnel est d’un professionnalisme exemplaire et j’ai obtenu d’excellents services. Mais souvent, trop souvent, j’ai dû me débrouiller en anglais. Parce que contrairement aux employés de Montfort, ceux de l’Hôpital d’Ottawa ne sont pas tous bilingues. Ils sont même rares. Et croyez-moi, ça peut devenir frustrant pour un patient de devoir expliquer son «bobo» dans une langue qui n’est pas la sienne.

Vive Montfort.

***

Je me promets donc de ne plus jamais oublier la date du 7 décembre 2001.

On se doit de célébrer cette journée. Elle a marqué l’histoire et l’avenir de la communauté franco-ontarienne. Elle nous a donné des ailes. 

Et peut-être qu’on pourrait dorénavant la souligner, non pas en parlant du jour où on a sauvé l’Hôpital Montfort de la fermeture, mais bien du jour où Montfort, à l’image de son peuple, est devenu grand.