L’Ontario: le cancre canadien du financement de ses collèges

En 2018-2019, l’Ontario a fourni aux collèges publics moins de 10 000$ de financement par étudiant à temps plein, soit le plus bas niveau de financement provincial au pays.

Parmi toutes les provinces canadiennes, l’Ontario est celle qui offre le plus faible appui financier aux institutions collégiales publiques par étudiant.


En 2018-2019, l’Ontario a fourni aux collèges publics moins de 10 000$ de financement par étudiant à temps plein, soit le plus bas niveau de financement provincial au pays.

C’est ce qu’a dévoilé la vérificatrice générale de l’Ontario dans son rapport annuel, publié mercredi, dans lequel elle expose entre autres un audit sur la surveillance des collèges publics. 

En 2020-2021, le ministère des Collèges et Universités a fourni, sur la base de subventions, un financement aux collèges publics totalisant 1,6 milliard de dollars. 

Les collèges ont également reçu des revenus d’autres sources, comme les frais de scolarité, les subventions fédérales et les dons, notamment. 

Les étudiants internationaux gardent la tirelire à flot

Au cours de la dernière année, le revenu total des collèges publics de l’Ontario était de 5,1 milliards de dollars. 

La VG a découvert que ces revenus ont augmenté de 62% au cours des quatre années précédant 2020-2021.

«Bien que cette augmentation soutient la santé financière du secteur, c’est principalement dû à une dépendance importante à l’égard des inscriptions d’étudiants internationaux», a noté Bonnie Lysyk.

Les 24 collèges publics de la province comptent sur les frais de scolarité de ces étudiants pour leur santé financière, «une formule risquée pour leur survie à long terme», a révélé la vérificatrice.

À travers la province, près de 70% de tous les revenus de frais de scolarité proviennent maintenant d’étudiants internationaux, totalisant 1,7 milliard. 

Les étudiants internationaux paient en moyenne 14 306$ en frais de scolarité annuels, contre des frais moyens de 3228$ par année pour les résidents canadiens. 

«Dans certaines écoles plus petites, plus de 90% de leurs frais de scolarité proviennent d’étudiants étrangers.»

Bonnie Lysyk dévoile qu’il y a trois fois plus d’étudiants étrangers dans les collèges de l’Ontario aujourd’hui, comparativement à la décennie précédente.

Entre 2012-2013 et 2020-2021, les inscriptions de résidents canadiens ont diminué de 15%, alors que les inscriptions internationales ont augmenté de 342%. 

La VG a expliqué, en point de presse, pourquoi il s’agit d’une situation préoccupante. «C’est un pourcentage assez haut que si les frontières ferment, ou si un pays entre en conflit avec le Canada et ne permet plus aux gens de venir y étudier, la viabilité financière des collèges entre en jeu.»


La politologue Geneviève Tellier

Impact sur le bilinguisme?

Il s’agit d’un fait avéré que les étudiants internationaux représentent aussi une grande portion du revenu des universités de la province.

«Le marché le plus payant, à l’Université d’Ottawa, c’est celui des étudiants étrangers. C’est ça qui est rentable», avait noté la politologue Geneviève Tellier, en entrevue avec Le Droit.

Des professeurs de l’Université d’Ottawa ont déploré au Droit, au cours des dernières semaines, que l’administration ait fait le choix des profits engendrés par les étudiants internationaux aux dépens de la survie du fait français au sein de l’institution. 

«Je ne dis pas qu’il n’y a pas d’efforts qui sont faits pour conserver le fait français. Mais on est dans une position où ce que l’on fait, c’est de tenter d’attirer des clients de toute la planète pour qui le français n’est pas important», avait quant à lui souligné le professeur en journalisme, Marc-François Bernier.

La vérificatrice générale Bonnie Lysyk croit que le ministère des Collèges et des Universités doit intervenir. «Le ministère devrait évaluer comment la dépendance croissante envers les frais de scolarité internationaux pourrait avoir une incidence sur l’éducation postsecondaire à plus long terme.»