Goodee: une entreprise qui fait du bien

Byron et Dexter Peart

Ce sont deux visages incontournables de l’univers de la mode canadienne, le genre à se retrouver dans la liste des personnalités les plus influentes sur la planète que publie annuellement le magazine londonien The Business of Fashion. Leur première griffe, Want les Essentiels, a déjà eu des boutiques à New York, Toronto, Vancouver et Montréal. Leur nouvelle bannière Goodee est vendue dans le monde entier. Et pourtant, ils demeurent relativement peu connus à Ottawa, leur ville d’origine. Rencontre avec Byron et Dexter Peart, des jumeaux qui ont fait leur marque.


Byron et Dexter Peart sont nés et ont grandi à Ottawa, dans une famille de fonctionnaires fédéraux. Très tôt, ils se démarquent par leur créativité: «Au secondaire, nous étions le genre d’élèves qui fondions des compagnies. Nous vendions des t-shirts et des cosmétiques», se souvient Byron Peart, rencontré chez sa mère qui habite le secteur Nepean.

Après des études en commerce et quelques années passées à travailler pour des multinationales du milieu de la mode, ils découvrent lors d’un voyage en Scandinavie des marques prometteuses, encore inconnues en Amérique du Nord. Flairant l’opportunité d’affaires, ils créent une compagnie d’importation pour vendre des produits européens à de grands magasins de New York et de Montréal.

Byron et Dexter Peart accompagnés de leur mère

Pendant cette période, ils commencent à se faire un nom (ou plutôt deux) dans le milieu de la mode et contribuent à faire connaître de nouvelles marques de ce côté de l’Atlantique, comme la compagnie de jeans suédoise Acne Studios. 

« Au bout d’un moment à représenter d’autres marques, on a eu envie d’exploiter un autre de nos talents que celui de dénicher et de revendre des choses. On a voulu créer nous-mêmes», raconte Byron Peart. En 2007, les jumeaux conçoivent leur propre gamme de sacs en cuir et fondent la marque Want les essentiels.



Le nom de la marque est issu d’une réflexion qu’on avait à l’époque sur le consumérisme: on voulait trouver un équilibre entre les choses qu’on désire et les choses dont on a réellement besoin.

Ça n’est pas non plus sans arrière-pensée que les jumeaux ont choisi ce nom  bilingue : «Ça, ça vient du fait qu’on a grandi à Ottawa».

En quelques années, Want les essentiels prend de l’ampleur. Leurs produits, onéreux et destinés à une clientèle jet set, se retrouvent sur les tablettes de grands magasins de Montréal et de New York. 

En plus des sacs de voyage, qui forment le cœur de la marque, les jumeaux conçoivent des chapeaux, des bottes, des portefeuilles, etc. 

La presse internationale les endosse. Le magazine Wallpaper vante les produits, mais aussi toute leur vision du design en boutique. L’entreprise exporte ses produits partout dans le monde et ouvre même ses propres magasins dans de grandes villes américaines.

«Je pense que d’avoir grandi au Canada et en particulier à Ottawa, au milieu de toute cette diversité, ça nous a donné une vision vraiment internationale qui a influencé nos entreprises plus tard », croit Dexter Peart

Puis, en 2017, surprise: Byron et Dexter Peart annoncent qu’ils quittent l’entreprise qu’ils ont fondée, pour se consacrer à leurs enfants et à un nouveau projet.

Une entreprise

Ce nouveau projet, c’est Goodee, une entreprise d’importation et devente en ligne à laquelle les jumeaux insufflent une mission sociale et environnementale. 

L’idée de cette nouvelle marque est de proposer des produits qui font du bien non seulement aux consommateurs qui les achètent, mais aussi aux personnes et aux endroits qui les produisent. Les frères dénichent à l’international des produits originaux, fabriqués par de petites entreprises des cinq continents. Toutes ces entreprises sont choisies en fonction du bien qu’elles font dans le monde, que ce soit parce qu’elles sont respectueuses de l’environnement, parce qu’elles aident des personnes à sortir de la pauvreté ou parce qu’elles contribuent à maintenir en vie de vieilles traditions.

«Avec Goodee, on veut montrer que les affaires peuvent être une force pour le bien, qu’il est possible de faire de l’argent tout en ayant un impact positif sur le plan social ou environnemental», explique Dexter Peart.

Avant de faire affaire avec une entreprise, la compagnie soumet ses partenaires à des audits, pour déterminer s’ils font vraiment leur part pour aider le monde. Goodee elle-même a reçu la certification B-Corp, accordée aux entreprises qui réussissent à avoir des impacts bénéfiques tout en continuant à être lucratives. 

Sur le site, on trouve de tout, de partout: des assiettes traditionnelles égyptiennes, des paniers de jute écologiques du Mexique, des sacs confectionnés par des réfugiés en Italie… De quoi joliment décorer toutes les pièces de la maison, à condition de sortir sa bourse: ici, la qualité et la durabilité l’emportent sur le bon prix. 

Goodee vend de beaux objets, mais surtout des belles histoires qui leur confèrent une valeur. Sur le site, chaque produit en vente est accompagné d’une description étoffée qui explique sa genèse et sa conception, souvent à l’aide de belles photographies. «Quand on sélectionne de nouveaux objets ou de nouveaux partenaires, on pense tout de suite à l’histoire qu’on veut raconter , explique Dexter Peart. On voudrait aider les gens à acheter moins de produits en général pour remplir leur maison, mais plus de produits qui ont une histoire et auxquels ils peuvent accorder un sens.»

«Je pense qu’avant d’être entrepreneurs, nous nous sommes toujours vus comme des conteurs», dit Dexter Peart.

«Au moment de lancer Goodee, on avait une intuition que la maison deviendrait un lieu de plus en plus important, à mesure que tout deviendrait de plus en plus virtuel. Notre slogan était “Qu’est-ce que la maison pour vous?”», se rappelle Byron Peart. Avec la pandémie qui nous a tous forcés à redécouvrir notre chez-soi, on peut dire qu’ils ont eu une idée prémonitoire. 

Même s’il concède que la pandémie a grandement accéléré le phénomène de repli vers la maison, Dexter Peart croit que cette tendance était déjà amorcée et qu’elle continuera de se développer dans les prochaines années.

La compagnie est encore jeune, mais pour le moment le succès est au rendez-vous. En quatre années d’existence, Goodee a réussi à attirer près de cinq millions de dollars d’investissements privés et compte déjà une quinzaine d’employés. Nordstrom, qui a notamment pignon sur rue au Centre Rideau à Ottawa, en a fait une boutique à l’intérieur de son site en ligne et dans certains de ses magasins américains. Et une fois de plus, les jumeaux Peart parviennent à faire parler d’eux dans le monde très exclusif de la mode : au début de l’année, l’entreprise des frères d’Ottawa s’est frayé une place dans le top 10 des entreprises les plus innovantes du milieu de la mode du réputé magazine Fashion, au côté de géants comme Gucci, Hermès et Lululemon.