Nouvelle controverse francophone: l’Université d’Ottawa réagit

Actuellement, environ 13 000 étudiants francophones étudient à l’Université d’Ottawa sur une population étudiante totale d’environ 45 000 étudiants.

Après quelques jours de mutisme, l’Université d’Ottawa (Ud’O) réagit à la plus récente controverse touchant la francophonie au sein de son établissement.


Dans une lettre envoyée au Droit et publiée dans notre section Opinion du 6 octobre, le vice-recteur, International et Francophonie, Sanni Yaya, assure que son «institution tire sa singularité dans la place éminente qu’elle accorde au respect de la langue française».

Or un récent rapport produit par l’Ud’O laisse plutôt entendre qu’une culture de «discrimination» voire de «francophobie» semble exister au sein de l’université canadienne, telle qu’elle se décrit elle-même en vertu de son offre pédagogique bilingue.

«Bien que certains progrès soient indéniables en matière de francophonie institutionnelle, le rapport issu de ces consultations nous présente un portrait éloigné de nos aspirations, concède M. Yaya. Le statu quo n’est pas une option et le message qui ressort de ces consultations ne doit pas être nié, amoindri ou banalisé».

Consultations

Le rapport «Renouveau de la francophonie à l’Université d’Ottawa : une responsabilité collective» décrit les principaux constats qui ont émané des consultations sur la francophonie, tenues en mai 2021 à l’Ud’O, auprès de la communauté universitaire.

Les consultations ont abordé trois thèmes : la vie en français à l’Ud’O, les programmes universitaires et la recherche en français ainsi que les services administratifs et facultaires en français.

Elles ont vu le jour après que les propos d’un de ses professeurs, Amir Attaran, avaient projeté l’université sous les feux de la rampe. En mars dernier, il avait qualifié le Québec d’«Alabama du Nord» sur Twitter. Il avait été tout aussi virulent à l’endroit du premier ministre québécois François Legault devant son refus de reconnaître l’existence de racisme systémique dans la province.

Le recteur de l’établissement, Jacques Frémont, avait pris quelques semaines avant de condamner les messages «inacceptables» du professeur tout en rappelant « l’attachement profond de l’Ud’O à l’endroit de la francophonie.» À cette même occasion, il a demandé à M. Yaya d’engager un dialogue sur l’état de la francophonie au sein de l’établissement.

«Un exercice, que nous avons voulu transparent et réalisé de notre propre initiative», rappelle M. Yaya dans sa lettre à l’éditeur.

Importantes préoccupations

Durant les consultations, d’importantes préoccupations ont été soulevées par certains des quelque 400 participants sur ce qu’ils perçoivent comme des propos irrespectueux et parfois dénigrants envers les francophones ou la francophonie, a notamment dévoilé la semaine dernière ONFR+.

«Plusieurs ont évoqué l’émergence d’une francophobie qui, selon eux, semble prendre ses aises, pour décrire des incidents qui se répètent de plus en plus fréquemment sur le campus», peut-on lire dans le rapport.

De plus, les étudiants, professeurs et personnel administratif consultés disent avoir le sentiment que la francophonie «fait parfois l’objet d’une certaine hostilité».

D’autres participants ont évoqué un manque d’accès à des cours en français dans certains programmes.

Certaines des personnes sondées ont aussi indiqué qu’il existerait au sein de l’Ud’O un préjugé favorable à l’embauche de chercheurs qui ont étudié dans les établissements anglo-saxons, au détriment de personnes formées dans les universités francophones canadiennes ou internationales.

Bien que la promotion du bilinguisme demeure importante, elle ne doit pas s’effectuer au détriment de la présence du français sur le campus, ont ajouté d’autres personnes présentes aux discussions.

En somme, de l’avis de plusieurs participants, «la langue française aurait été reléguée au second plan dans l’architecture et le fonctionnement même de l’Université», conclut le rapport.


Initiatives en marche

Fort de ses conclusions, M. Yaya assure que l’Ud’O «n’a pas perdu de temps pour agir». De nouvelles initiatives ont été déclenchées en réaction aux consultations.

«De nouvelles règles communes et plus mordantes en matière de bilinguisme viendront bientôt mieux éclairer nos pratiques;  nous travaillons à assurer et à encourager un meilleur équilibre des deux langues, et de nouvelles modalités de gouvernance et un cadre d’imputabilité plus claire seront instaurés à brève échéance, incluant une lentille francophone. Ces mesures visent un objectif commun : favoriser plus d’autonomie et de vigueur à l’avancement de la francophonie», écrit-il dans sa missive au Droit.

Actuellement, environ 13 000 étudiants francophones étudient à l’Ud’O sur une population étudiante totale d’environ 45 000 étudiants.