Un premier match pour le Liban et grand-papa

L'attaquante franco-ontarienne d'Ottawa, Pilar Khoury, effectuera ses débuts au sein de l'équipe nationale du Liban, la semaine prochaine, en Arménie. Elle évolue depuis juillet 2019 au sein de l'AS Saint-Étienne, en France.

La dernière fois que Pilar Khoury avait visité le pays natal de ses parents, c’était en juin 2018 afin de renouer avec des tantes et cousines. La joueuse de soccer franco-ontarienne d’Ottawa se trouve à nouveau au Liban ces jours-ci, mais pour des raisons différentes.


L’attaquante âgée de 26 ans effectuera ses débuts au sein de l’équipe nationale libanaise. On l’a recrutée pour une série de rencontres internationales en Armémie dès lundi prochain. Elle disputera des matches contre la Lithuanie, la Jordanie et la nation hôtesse.

«C’est incroyable de revenir ici, non seulement pour revoir de la famille, mais représenter le pays de ma famille», raconte Khoury, qui a notamment évolué chez les Gee Gees de l’Université d’Ottawa avant de faire le saut chez les pros en Europe, il y a cinq ans.



Sa mère Marie et son père Tony ont immigré au Canada à la fin des années 1980, choisissant de fonder leur famille dans la capitale. Ils ont eu trois enfants, dont Pilar s’avère l’aînée.

«Mes parents comptaient retourner vivre au Liban. Mais avec les guerres et l’état dont le pays s’est retrouvé, ça ne s’est jamais produit.»

Khoury a fait ses études au Lycée-Claudel avant de se retrouver en classes en sciences de la santé à l’Université d’Ottawa. Elle a porté les couleurs des Gee Gees pendant cinq saisons, aidant l’équipe à remporte deux fois le bronze aux championnats canadiens.

L’entraîneur des gardiens, David Bellemare, l’a mis en contact avec un entraîneur français qui était de passage à l’époque à Gatineau. Ce dernier cherchait une joueuse pour meubler l’alignement d’une formation en France.



Khoury a pu effecuter ses débuts chez l’ASPTT Albi en 2016. Puis ce fut le passage chez le Grenoble Foot 38 pendant une année avant de joindre l’AS Saint-Étienne (ASSE) en deuxième division. C’est son club depuis juillet 2019, marquant sept buts en 14 parties, dont un en Coupe de France.

Cette aventure chez les pros, c’est aussi un peu l’affaire de son grand-père maternel Louis Saad.

«Je n’ai jamais vraiment raconté cette histoire. Mon grand-père, c’était mon mentor. Mon héros. On peut dire que c’est lui qui m’a tout appris au sujet du soccer. Avant qu’il ne décède (en 2013), il m’avait demandé d’aller chercher mon passeport. Il me disait que je devais continuer à croire en moi et dans mon rêve, que ça finirait par arriver.»

Khoury ne croyait pas autant que ce rêve allait devenir réalité. «J’avais un petit doute», confie-t-il.

«Tu sais quand un membre de ta famille te dit ça tout ça, tu as envie de lui répondre qu’il n’est pas objectif puisqu’il t’aime», ajoute-t-elle du même souffle.

Quand le coach français a cogné à sa porte, Khoury était bien contente d’avoir son passeport en main. En raison de la pandémie, la présente saison s’avère tout sauf normale.



L’AS Sainte-Étienne n’a pas joué depuis la fin de l’automne dernier, étant limité à six parties. Khoury avait déjà amassé quatre buts, ce qui a retenu l’attention du Liban.

«On s’entraîne tous les jours depuis novembre. Mais c’est très difficile mentalement. Tu es habituée à avoir des compétitions durant toute l’année.»

Ce qui ajoute une couche de frustration? Les championnats masculins n’ont jamais arrêté.

«Nous chez les femmes, il y a juste la première division qui a continué. Le gouvernement français devrait décider à la fin d’avril si on reprend ou non. Ça tombe bien donc de venir au Liban. Si la compétition avait repris, je n’aurais pas pu passer autant de temps ici. Ça fait bien en termes de motivation de retrouver la compétition.»

Nouvelles coéquipières, nouveau rôle

Khoury était un brin nerveuse en rejoignant l’équipe nationale libanaise ce week-end. «Je ne connais personne», dit-elle.

«Mais les joueuses ont toutes été accueillantes et chaleureuses avec moi. Tu appréhendes toujours de recommencer et trouver un rôle dans une équipe et t’entendre avec tes nouvelles coéquipières. Je peux parler un peu libanais. Et les autres filles parlent aussi français et anglais. Ça aide beaucoup.»

L’alignement de la formation libanaise s’avère jeune. Tout comme le programme national féminin fondé au milieu des années 2000.

«La nouvelle génération est très forte. Les U19 ont gagné dernièrement un championnat en Asie. L’idée, c’est d’amener ces joueuses dans l’équipe senior.»



Pilar Khoury avait bien hâte de disputer une première partie dans l’uniforme des Cèdres au «Women International Friendly Tournament» du 5 au 11 avril. Quelque part dans les nuages, il y a un grand-père qui sera un spectateur attentif.

«Il ne ratait jamais aucun match de mon petit frère, ma petite soeur et moi. Je pense bien qu’il est fier de mon travail. Je dirais que je le ressens encore plus présent... Je sens qu’il m’encourage.»