Les Québécois mal logés laissés pour compte

François Legault, premier ministre du Québec

OPINION / Dans son dernier budget du 25 mars dernier, le gouvernement Legault n’a pas compris l’urgence d’agir en matière de lutte à la pauvreté et pour améliorer la résilience des citoyens mal-logés du Québec comme il prétend le faire dans ce budget. Après un an de pandémie, ce gouvernement persiste et signe: les ménages en situation de mal-logement et de pauvreté ne doivent rien attendre de lui.


Alors que la pénurie de logements s’étend dans plusieurs municipalités du Québec, dont celle de Gatineau, que les loyers montent en flèche et que les ménages sans logis ne cessent d’augmenter, le gouvernement Legault ne prévoit réaliser qu’un très maigre 500 nouveaux logements sociaux de plus pour l’ensemble du Québec au cours de la prochaine année. Ces 500 unités budgétées sont très largement insuffisantes pour répondre rapidement aux besoins urgents des 244 120 ménages locataires mal-logés du Québec tel qu’identifiés dans les données du dernier recensement, et ce, avant la pandémie.

Logemen’occupe s’indigne que les conséquences dévastatrices du mal-logement et du manque de logements abordables mises en lumière durant la pandémie ne soient pas plus prises en compte dans le plan de relance de ce gouvernement. Ce maigre 500 unités de plus, ça ne permettra vraiment pas de répondre aux besoins variés et urgents exprimés partout au Québec et en Outaouais, comme ceux des personnes en situation d’itinérance, des femmes victimes de violence conjugale, des Autochtones vivant en milieu urbain, des personnes aînées, de celles en situation de handicap, des familles sans logis ou vivant dans des logements surpeuplés. Toutes ces personnes sont encore abandonnées et condamnées à attendre des années pour accéder à un logement décent.

Pour les organismes impliqués au niveau du logement social et communautaire, le seuil minimal était de 5000 nouvelles unités pour la prochaine année. La Ville de Montréal, à elle seule, demandaient 1500 unités, la ville de Québec 500 et Gatineau 125. Selon Logemen’occupe, le manque d’ambition du gouvernement Legault est d’autant plus inexplicable que le Québec disposait d’un montant rétroactif de plus de 132,6 millions $ reçu d’Ottawa, en vertu de la nouvelle Entente Québec-Canada sur le logement.

Logemen’occupe est également déçu de l’absence d’un plan de développement pour les prochaines années. Avec la crise structurelle du logement qui sévit dans l’ensemble des centres urbains du Québec, nous estimons qu’il aurait fallu annoncer dès maintenant les sommes nécessaires afin que les organismes publics et communautaires puissent planifier dès maintenant des projets de logements sociaux pour les années à venir. À cet égard, Logemen’occupe demandait au gouvernement de lancer sans plus attendre un grand chantier de 50 000 logements sociaux en 5 ans.

Logemen’occupe se réjouit, par ailleurs, que le budget prévoit enfin les sommes manquantes pour compléter le financement de tous les logements sociaux qui avaient déjà été annoncés avant l’arrivée du gouvernement Legault. Il espère qu’avec la hausse marquée des coûts de construction, les 250 M$ prévus à cette fin, dont 106,6 M$ proviennent du fédéral, suffiront à réaliser pour de bon l’engagement électoral de la CAQ à ce sujet.

Au niveau des autres mesures de lutte à la pauvreté, alors que les prestations n’avaient pas été bonifiées depuis 2006, Logemen’occupe est complètement estomaqué du maigre 18,5M$ destinés à la bonification des prestations spéciales liées à la santé pour les personnes assistées sociales sur une période de cinq ans. Pour l’année 2021-2022, cela représente une dépense de 1,3M$ sur des revenus de 122 567M$.

Alors que les organismes communautaires sont complètement débordés de nouvelles demandes d’aide, un maigre 16M$ leur est consacré en 2021-2022 afin d’améliorer leur financement et l’accès à leurs services. De fait, l’enveloppe qui leur est consacré ne représente que 1,6% du budget du Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Comment comprendre une telle mesquinerie alors que dans son mémoire déposé au ministre des Finances du Québec le 14 février dernier, la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles a demandé l’ajout, dans le budget 2021-2022, de 460 millions $ dans les divers programmes de financement à la mission globale des organismes d’action communautaire autonome. Pour les services dédiés aux femmes victimes de violence conjugale, 4,5 M$ pour 2021-2022, ce qui est très peu considérant la vague de féminicides qu’a pourtant déploré le premier ministre Legault lui-même.

Bref, retenons de ce budget que les crises, sanitaire, de l’itinérance et du logement, n’auront pas stimulé l’imagination du gouvernement caquiste en matière de politiques sociales. Avec ce budget, ce n’est vraiment pas au cours des prochains mois que nous verrons poindre la lumière au bout de la grande pauvreté et du mal-logement au Québec.

François Roy,

Coordonnateur de Logemen’occupe