Ensemble, même éloignées

CHRONIQUE / Cette chronique, comme celle de la semaine dernière, est très personnelle et je crois que plusieurs d’entre vous vont s’y reconnaître. Elle porte sur des évènements de vie marquants et difficiles vécus durant la pandémie par moi-même et par ma petite sœur Joanne : une séparation pour moi et une perte d’emploi pour ma sœur.


Je me suis séparée juste avant les Fêtes. Cela s’est bien fait, dans le respect de chacun. Ceci dit, cela n’a pas été facile. Loin de là. Comme toute séparation, en temps normal (lire : pré-COVID), on a de la peine. C’est un deuil à traverser qui nous fait vivre une panoplie d’émotions (de la tristesse à la colère et toutes les nuances possibles). Habituellement, on s’en sort à l’aide de nos proches, des sorties entre ami.e.s, des nouvelles rencontres. Malheureusement, le confinement nous limite dans les stratégies qu’on peut utiliser pour nous aider dans cette situation : celles qui nous ont été utiles dans le passé, mais auxquelles on a plus accès.

Je vais vous dire que j’ai trouvé le temps des Fêtes très difficile. Vivre une rupture est une chose. Mais la vivre dans un contexte de pandémie en est une autre. Rajoutons le confinement à cela et on se retrouve avec un beau cocktail d’émotions. 

De plus, pour respecter les mesures sanitaires et freiner la propagation de la COVID, nous ne pouvons pas rencontrer de nouvelles personnes. Non pas que je suis prête pour cela, mais je sais que pour mes ami.e.s célibataires, c’est tout un défi. En fait, c’est presque impossible. Pour rester dans l’air du temps, ce sont des dates Zoom qui prennent la relève. Joanne, qui veut m’aider à me changer les idées, m’a encouragé à créer un compte Tinder. On est rendus là. J’ai ma propre marieuse, service personnalisé! 

On peut en rire, en fait on en rit parce qu’on a besoin de rire. Sauf que ce n’est pas si drôle. Rencontrer quelqu’un actuellement relève presque du miracle. Cela nécessite beaucoup de patience de créativité. Nous avons besoin de ce contact humain. Nous sommes des êtres sociaux après tout. 

Georgia Vrakas

Croyez-moi, j’ai utilisé toutes les stratégies que j’ai partagées avec vous les dernières semaines pour composer avec la peine que je vis : la peinture, la lecture, les marches, la méditation pleine conscience, des séries Netflix et j’en passe. C’est le contact avec l’autre qui me manque. Bien évidemment, j’ai vu mes ami.e.s et ma famille via Zoom ou FaceTime car en temps de crise sanitaire nous n’avons pas le choix de nous adapter pour tenter de retrouver un certain équilibre. Et j’ai mon travail de professeure et celui de psychologue qui me tiennent tous deux très occupée.

Période sombre

Ma sœur Joanne vit le contraire. Elle est mariée depuis 8 ans et a deux beaux garçons adorables. Sur papier sa vie a l’air parfaite. Elle est journaliste et animatrice de profession. Son conjoint André Monet est un artiste-peintre reconnu mondialement. Ses deux enfants vont très bien malgré la pandémie. Mais elle, tout comme moi, traverse une période sombre présentement. Tout juste avant la pandémie, après la fin de son émission matinale quotidienne à Montréal, elle avait eu deux offres d’emploi dans son domaine. Elle était tellement contente d’apprendre ces nouvelles. Avec l’arrivée de la crise sanitaire, tout a changé à son très grand malheur. Toutes les embauches ont été gelées, les processus de recrutement en cours aussi. Depuis, elle se cherche un emploi, elle veut retrouver sa carrière, se retrouver. 

Joanne Vrakas

C’est une femme qui a toujours travaillé fort et qui a toujours connu du succès dans les médias depuis les 20 dernières années. Et là, elle se retrouve sans cette partie si essentielle pour elle, si importante pour la réalisation de soi. Elle prend des contrats, quand ils sont disponibles et intéressants, mais les vraies offres sont sur pause. De l’extérieur, tout parait merveilleux, mais à l’intérieur elle a mal et elle anxieuse en attendant un éventuel retour à la normale. Elle sait par contre qu’elle n’est pas la seule dans cette situation. Qu’on est plusieurs présentement à devoir composer avec des évènements stressants, angoissants, qui changent une vie.

Je réalise en écrivant ce texte que c’est vraiment douloureux pour moi de parler de ma peine à moi que je dois vivre. Je sais aussi que je suis fragilisée d’avance par mon propre vécu de dépression. Il faut donc que je sois vigilante et que je prenne soin de moi, de ma santé mentale. Le temps passera et je sais que je vais me sentir mieux. J’ai mes deux sœurs, mes ami.e.s, mes ressources et mes forces internes. Je suis bien entourée et j’ai l’aide psychologique dont j’ai besoin. 

En parlant de tout cela avec Joanne, les deux on réalise que le tunnel n’est pas tout noir. Il est parsemé de brèches de lumières qui réussissent à y frayer un chemin. Notre famille a déjà passé par là, même pire, comme peut-être certains d’entre vous. C’est normal d’avoir mal. Ce qui nous aide le plus est de garder un contact régulier, d’en parler de s’écouter et d’être accueillies dans nos souffrances. De rire quand on peut et, quand on ne peut pas, de se donner la permission de pleurer. C’est correct et tout à fait normal d’avoir mal lorsqu’on est confrontés à des difficultés qui chamboulent notre vie. C’est normal d’avoir besoin d’aide à ces moments-là. Ceci est encore plus vrai en ce temps de pandémie. 

Je suis consciente qu’accéder aux ressources en santé mentale pour nous aider à nous adapter à nos nouvelles réalités est complexe présentement. C’est pour cela que je vous partage celles que j’ai chaque semaine. J’espère que ce texte et les ressources que je vous partage vous aident. En terminant, j’aimerai vous laisser avec un message d’espoir. Même si on vit chacun et chacune des réalités différentes face à cette pandémie, on est pas seul.e.s à les vivre. On va s’en sortir. Ensemble, même si éloignés.

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