Il semble d’ailleurs que ces entreprises fassent des affaires d’or depuis l’éclosion du virus et du télétravail, souligne le professeur agrégé à l’École nationale d’administration publique ( ÉNAP ), Étienne Charbonneau, aussi titulaire de la Chaire de recherche du Canada en management public comparé.
Il y a plusieurs compagnies qui vendaient déjà des outils de surveillance, ou encore d’autres qui avaient certains éléments adaptés pour faire des outils de surveillance et qui se sont réorientées, et qui disent faire de bonnes affaires.
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L’entreprise informatique Prodoscore, spécialisée dans la conception et la vente d’outils de surveillance de la productivité des employés, révélait d’ailleurs au réseau américain CNBC avoir vu ses affaires bondir de 600 % dans les derniers mois en raison du nouveau coronavirus.
« Ces compagnies vont souvent dire qu’elles ont beaucoup de clients aux États-Unis et au Canada, mais elles ne vont pas divulguer la liste de leurs clients, car les firmes ou organismes publics qui utilisent ces outils-là ne veulent généralement pas que ce soit connu. Donc on sait qu’il y en a plus, mais pas à quel pourcentage », précise le chercheur.
M. Charbonneau fait remarquer que certaines technologies existent depuis longtemps en milieu de travail – telles que les caméras de surveillance et la surveillance des sites internet consultés - et pour lesquels les tribunaux ont déjà statué. Toutefois, l’émergence du travail à distance soulève d’autant plus de questions et de préoccupations quant à la protection de la vie privée et pour lesquelles les cours de justice n’ont pas encore été appelées à se prononcer.
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« Au Canada, ce qui régit et limite les outils de surveillance qu’un employeur peut utiliser, ce sont les attentes raisonnables à la vie privée en milieu de travail qui ne sont pas aussi grandes que lorsque vous êtes à votre domicile, ainsi que le caractère intrusif de ces outils », explique-t-il.
M. Charbonneau et son collègue Carey Doberstein ont ainsi sondé l’avis de plus de 3000 Canadiens et 350 fonctionnaires en mars dernier, afin de mesurer leur niveau de tolérance envers une douzaine de technologies de surveillance ( voir l’encadré ). Résultat : la vaste majorité des répondants sont contre l’utilisation de ce type de technologies de surveillance en milieu de travail.
« Lorsqu’on pose directement la question aux Canadiens sur le caractère intrusif et ou raisonnable des outils, la majorité d’entre eux - à deux exceptions près, et même pour la surveillance des fonctionnaires - considère ces technologies comme intrusives et déraisonnables et dans certains cas même très déraisonnables », précise-t-il.
Selon lui, l’utilisation par l’employeur de certaines technologies de surveillance à l’insu des employés risquerait de miner le lien de confiance entre les deux parties, si cela devenait éventuellement connu.
« Ça peut aussi amener les employés à réduire leur temps au minimum, car plusieurs rapportent utiliser le temps sauvé dans les déplacements pour avancer davantage les tâches qui leur sont confiées », explique M. Charbonneau.