La situation est plus grave chez les personnes âgées. À 75 ans, la moitié des Canadiens sont atteints de déficiences auditives; dès 85 ans, la moitié sont atteints à la fois de déficiences auditives et visuelles. De plus, les personnes ayant une perte sensorielle sont plus susceptibles d’avoir une déficience cognitive. En d’autres termes, les personnes les plus exposées au risque de la COVID-19 peuvent également être celles qui courent le plus grand risque d’isolement en raison de leur besoin d’accessibilité à la communication.
Les problèmes de communication se sont multipliés à mesure que la COVID-19 a modifié les modes d’interaction sociale (distanciation, port du masque). Voir un visage, entendre l’émotion d’une voix ou les mots prononcés à travers un masque opaque est impossible. Les appareils auditifs et les lunettes ne sont pas toujours utilisés lorsque les personnes ont besoin de soins de santé, que ce soit dans une ambulance, aux urgences, aux soins intensifs, aux soins palliatifs ou même lorsqu’elles subissent une intervention chirurgicale non urgente. Dès que les visites sont limitées, les personnes ayant des difficultés de communication se retrouvent seules pour prendre les décisions relatives aux soins de leur santé. Aussi bons soient-ils, les soins de santé ne peuvent être fournis sans accessibilité à la communication.
[...] Les personnes les plus exposées au risque de la COVID-19 peuvent également être celles qui courent le plus grand risque d’isolement en raison de leur besoin d’accessibilité à la communication.
Durant cette période stressante, nous devons nous attarder à trouver de nouvelles solutions en matière d’accessibilité à la communication, sinon, il faut espérer en tirer des enseignements utiles afin d’améliorer l’accessibilité à la communication post-COVID. Depuis plusieurs mois, les associations de professionnels spécialisés et les regroupements de personnes vivant avec des handicaps auditifs, visuels et cognitifs, les entreprises manufacturières et les chercheurs qui étudient le vieillissement en bonne santé ont redoublé leurs efforts pour offrir des solutions. Au début, des personnes malentendantes et des audiologistes créatifs ont bricolé leurs propres masques en y intégrant un écran transparent pour faciliter la lecture labiale. Aujourd’hui, ce type de masque a reçu les autorisations requises des autorités sanitaires au pays. Mais nous sommes loin de la coupe aux lèvres. Il y a encore beaucoup à faire… et rapidement!
Les chercheurs de l’équipe Interventions à l’interface sensorielle et cognitive du Consortium canadien en neurodégénérescence associée au vieillissement (CCNV) et leurs partenaires travaillent à améliorer l’accessibilité à la communication dans les établissements de soins de santé. Partout au pays, les cliniciens qui œuvrent auprès des personnes ayant des limitations sensorielles et cognitives participent eux-aussi au développement d’outils de télésanté pour améliorer la communication patient-clinicien. Certains utilisent la vidéoconférence munie d’amplificateurs personnels, des applications de sous-titrage, de synthèse vocale ou le recours à des interprètes. Cependant, des conseils de communication simples, testés et s’avèrent souvent les plus utiles, pensons à la patience, au discours clair et lent, à l’utilisation d’un bon éclairage, au bruit de fond minimal, sans oublier de prendre le temps de s’assurer que le message soit bien compris par la personne et par son entourage. Voilà quelques pistes pour surmonter le paramètre invisible. Vous en avez d’autres? Nous sommes à la recherche de nouvelles idées et solutions (ccnateam17.ca).
Si chacun de nous prenions davantage conscience de l’importance des sens et de la communication pour surmonter l’isolement, nous en bénéficierons tous collectivement. C’est à chacun de nous de faire une différence visible !
Les auteurs de cette lettre sont:
- Kathleen Pichora-Fuller, Professeur émérite, Psychologie, Université de Toronto
- Natalie Phillips, Professeure, Psychologie, Université Concordia, Montréal
- Walter Wittich, Professeur agrégé, Optométrie, Université de Montréal
- Jennifer Campos, Professeure agrégée, Psychologie, Université de Toronto et Titulaire d’une chaire de recherche du Canada, University Health Network
- Dawn Guthrie, Professeure, Kinésiologie, Université Wilfrid Laurier, Waterloo
- Paul Mick, Professeur adjoint, Médecine, Université de Saskatchewan, Saskatoon
- J.B. Orange, Professeur, Sciences et troubles de la communication, Université Western, London
- Marie Y. Savundranayagam, Professeure adjointe, Études de la santé, Université Western, London
- Melissa K. Andrew, Professeure agrégée, Médecine gériatrique, Université de Dalhousie, Halifax
- Inbal Itzhak, Spécialiste en transfert de connaissances, CCNV, Montréal
- Chantal Kealey, Directrice de l’audiologie, Orthophonie et audiologie Canada, Ottawa
- Patricia Kéroack, Spécialiste en communications, CCNV, Montréal
- Marilyn Reed, Audiologiste, Baycrest, Toronto
- Grace Shyng, Audiologiste et conseillère spéciale, Wavefront Centre for Communication Accessibility, Vancouver
- Christopher Sutton, PDG, Wavefront Centre for Communication Accessibility, Vancouver
- Lyn Turkstra, Professeure, École des sciences de la réadaptation, Université McMaster, Hamilton
- Ruth Warick, Présidente, International Hard of Hearing Association and BC Chapter, Canadian Hard of Hearing Association