Le télétravail séduit un travailleur sur deux

Les Canadiens seront nombreux à poursuivre le télétravail une fois la pandémie derrière eux, selon des résultats préliminaires d’une étude de l’Université de Montréal.

Les Canadiens seront nombreux à poursuivre le télétravail une fois la pandémie derrière eux, selon des résultats préliminaires d’une étude de l’Université de Montréal. Sur quelque 3000 personnes sondées, près d’un travailleur sur deux (43 %) dit vouloir poursuivre le boulot à la maison à l’avenir.


L’étude, menée en collaboration avec des chercheurs de l’université de Toulouse et de l’Université Laval, vise à cibler les éléments qui favorisent le télétravail ou à l’inverse lui nuisent, ce qui aide à hausser la satisfaction des travailleurs ou leur productivité.

« Un résultat intéressant est que le pourcentage de personnes voulant continuer à télétravailler est allé en augmentant, souligne la professeure titulaire Tania Saba à l’École de relations industrielles de l’UdeM. On se serait attendu à ce que les télétravailleurs trouvent ça plus difficile avec un confinement qui ne finit plus de finir, mais ça n’a pas été le cas. Ce qu’on a constaté aussi, c’est que plus les gens travaillent à distance, plus ils ont envie de continuer. Il y a donc une question d’habitude et on apprécie le télétravail non pas comme un accommodement, mais comme un mode d’organisation du travail. »

Parmi les répondants, sollicités à partir du 4 avril, 53 % n’avaient jamais fait de travail à distance. Les employés plus âgés apprécient plus l’expérience que les plus jeunes, selon Mme Saba qui explique cela par la solitude liée au télétravail et le fait « de moins avoir à se prouver aux autres lorsque nous sommes plus avancés dans notre carrière ».

Contrairement aux idées préconçues qui laissent croire que les employés à la maison sont moins productifs, le tiers des répondants ont affirmé avoir réussi à hausser leur productivité malgré la charge de travail augmenté.

« Et ce n’était pas perçu de manière négative. Ils ont donc trouvé des manières plus productives de travailler », indique Mme Saba.

Professeure à l’École des sciences de l’administration à l’Université TELUQ, Diane-Gabrielle Tremblay n’est pas étonnée de ces résultats. 

« C’est un mode de travail qui est réclamé par les employés depuis longtemps », constate-t-elle d’entrée de jeu.

Pourtant, avant la COVID-19, les employeurs comme les syndicats n’étaient pas chauds à l’idée de développer une culture du travail à la maison.

« Il y a toute la question du rendement qui posait problème pour les gestionnaires, mais du côté des syndicats aussi il y avait des réticences. C’est une des raisons pour lesquelles il n’y a presque rien dans les conventions collectives à propos du télétravail », explique la professeure.

Les prochaines négociations de conventions collectives de plusieurs entreprises et dans la fonction publique devraient donc être teintées par la volonté de plusieurs employés de travailler quelques journées par semaine à la maison. 

Les différentes études réalisées sur le télétravail sont d’ailleurs unanimes sur ce point : les effets bénéfiques du travail à distance suivent une relation en U inversé, ce qui signifie que la pratique modérée du travail à la maison offrirait le maximum de bénéfices pour la santé.

Au plus fort de la crise, environ 40 % des travailleurs canadiens ont dû s’installer un bureau à la maison. Ce taux tournait autour de 10 % avant la pandémie et devrait se stabiliser à 25 %, selon Mme Tremblay. 

Dans une prochaine phase de son projet de recherche, la professeure Tania Saba désire étudier le télétravailleur vu par l’employeur. 

Les résultats préliminaires de son étude démontrent déjà que l’expérience semble moins positive pour les gestionnaires que les employés.

« Mais il n’y a pas la résistance à laquelle on s’attendait », précise-t-elle.

D’autres études sont actuellement menées à travers le monde sur le télétravail. Mme Saba attend des résultats des États-Unis et de l’Australie. Elle peut toutefois déjà affirmer que le travail à la maison crée plus d’engouement au Québec que dans plusieurs autres pays. 

« Il ne faut pas oublier qu’avec l’hiver qu’on a ici, ça peut être intéressant », souligne-t-elle.