La nouvelle avait fait grand bruit, à l’automne 2018, lorsque Le Droit avait révélé que les finissants du cégep souhaitant suivre leur formation en médecine à la faculté satellite de l’Outaouais allaient devoir passer un an sur le campus montréalais de McGill dans le cadre d’une année préparatoire où les cours sont exclusivement en anglais.
Le ministre responsable de l’Outaouais, Mathieu Lacombe, avait vivement réagi à cet enjeu linguistique. « Au Québec, chaque étudiant a le droit d’avoir sa formation 100 % en français », avait notamment mentionné M. Lacombe, quelques semaines à peine après son élection.
Rien n’avait pu être fait pour l’année en cours, puisque le recrutement des étudiants avait déjà été entamé lorsque l’information avait été dévoilée, au moment où la Coalition avenir Québec venait d’être portée au pouvoir.
Malgré les contraintes logistiques découlant du fait que l’UQO n’offre pas tous les cours de l’année préparatoire aux études en médecine, le gouvernement est parvenu à établir un plan qui permettra que cette formation puisse être suivie en français et en Outaouais dès l’automne prochain.
Selon ce qu’il a été possible d’apprendre, le gouvernement annoncera ce lundi un investissement annuel récurrent de 140 000 $ pour que l’année préparatoire puisse être offerte dans la région. Les cours seront offerts dans les locaux de l’UQO par des professeurs ou chargés de cours provenant autant de l’établissement gatinois que de McGill.
Les finissants du cégep dont les demandes d’admission en médecine à McGill seront analysées prochainement qui seront choisis pour étudier à la faculté satellite de l’Outaouais pourront ainsi suivre leur année préparatoire dans la région, dans la langue de Molière. Ils feront ensuite leur entrée dans le programme de médecine au sein de la cohorte de 2021.
Cette année préparatoire n’est obligatoire que pour les étudiants qui terminent leur formation collégiale, et non pour ceux qui ont déjà un bagage universitaire ou un autre parcours académique. McGill avait indiqué que pour chaque cohorte de 24 étudiants de la faculté satellite de l’Outaouais, il était anticipé qu’il y en ait entre 12 et 20 arrivants d’un cégep.
La faculté satellite doit ouvrir ses portes dès l’automne prochain, au-dessus de l’urgence de l’Hôpital de Gatineau. Au sein de la toute première cohorte se retrouveront des étudiants qui auront suivi leur année préparatoire dans la langue de Shakespeare, à Montréal. Ce programme inclut entre autres « des cours obligatoires en biologie moléculaire, biologie cellulaire et métabolisme ».
Pour tout ce qui concerne l’enseignement médical, l’Outaouais se retrouve sous la responsabilité de l’université McGill en raison de la division territoriale en vigueur pour les quatre facultés de médecine de la province.
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UNE SAGA LINGUISTIQUE
Mars 2014
En pleine campagne électorale provinciale, Le Droit révèle que près du quart des quatre premières années de formation de la faculté satellite se fera en anglais, à distance, par visioconférence. « C’est ça ou rien », avait à l’époque réagi la députée libérale de Hull, Maryse Gaudreault. « Je ne peux pas comprendre qu’on forme des étudiants en médecine en français à l’Université d’Ottawa et à Moncton, mais qu’on ne puisse pas le faire complètement en Outaouais », avait pour sa part réagi le péquiste Pierre Duchesne, qui était alors ministre de l’Enseignement supérieur. McGill affirme qu’il sera impossible de franciser tout le programme d’ici l’ouverture de la faculté, à l’époque prévue pour 2016.
Avril 2014
La première ministre péquiste sortante, Pauline Marois, se dit prête à accepter une courte période de transition pour la francisation de la formation afin de ne pas en retarder l’implantation dans la région.
Septembre 2016
Le premier ministre libéral Philippe Couillard affirme que seul l’enseignement purement magistral sera donné en anglais par visioconférence et que cela ne représente que 8 % de la formation – en considérant les quatre années de formation prédoctorale et les deux années de résidence. Le Droit avait toutefois révélé qu’environ 50 % des cours seraient en anglais pendant les 18 premiers mois. Le Dr Gilles Brousseau, vice-doyen adjoint à l’enseignement médical de l’université McGill, affirme qu’il y a « de grosses chances » que le français puisse être plus présent lors de l’ouverture de la faculté en 2020. Alors porte-parole de la Coalition avenir Québec en matière de protection et promotion de la langue française, la députée Claire Samson aborde le dossier à l’Assemblée nationale en mentionnant que son parti « exige du gouvernement et de l’université McGill de corriger la situation ».
Octobre 2016
Jugeant la situation « tout à fait inadmissible », le mouvement Impératif français lance une campagne pour réclamer que la nouvelle faculté satellite relève d’une université de langue française et que la formation soit entièrement donnée en français.
Février 2017
Impératif français revient à la charge avec une publicité dans les marchés radiophoniques de Gatineau, Montréal et Québec pour inviter la population à dénoncer la place que prendra l’anglais à la faculté satellite.
Janvier 2018
Le Dr Gilles Brousseau, vice-doyen adjoint à l’enseignement de la médecine de McGill, affirme que le plan de francisation du programme « devrait être réalisé pour 2020 ».
Novembre 2018
Le Droit révèle que les finissants du cégep devront au préalable aller passer un an à Montréal pour y suivre un programme préparatoire offert exclusivement en anglais. L’UQO indique ne pas être en mesure d’offrir ce programme à court terme, car il contient de nombreux cours en biologie humaine qui ne sont pas offerts par l’établissement. Le ministre responsable de la région, Mathieu Lacombe, accuse les libéraux d’avoir accepté sans broncher que l’année préparatoire se fasse en anglais à Montréal. « On arrive au gouvernement et on est pris avec ce problème-là qu’il va falloir régler, avait-il mentionné. Mais ça ne sera pas facile. »
Janvier 2019
En rencontre éditoriale avec Le Droit, le ministre Mathieu Lacombe avoue qu’il « ne sait pas trop comment régler » ce dossier et que la solution pourrait coûter cher. « C’est beaucoup d’argent pour respecter un principe, mais le principe est important », affirme M. Lacombe. Deux semaines plus tard, le premier ministre François Legault affirme qu’il souhaite une solution « le plus rapidement possible ». « Si ce n’est pas possible de le faire avec McGill, faisons-le avec une autre université, mais ces cours doivent être donnés en français », dit-il.
Février 2019
Le recteur de l’UQO, Denis Harrisson, confie en entrevue éditoriale avec Le Droit qu’un groupe de travail a été formé avec McGill et le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur pour régler le dossier de l’année préparatoire. Il évoque la possibilité que ce programme puisse être offert sur le campus de l’UQO dès 2020.
Juin 2019
Le Droit apprend que l’Université d’Ottawa a approché l’université McGill à quelques reprises, en vain, pour offrir en français l’année de formation préparatoire sur son campus.
Février 2020
Le gouvernement caquiste annonce que l’année préparatoire pourra être offerte en français dès 2020 sur le campus de l’UQO.