Le capitaine Joël Renaud avait subi son procès devant la Cour martiale de la Base militaire de Bagotville en septembre dernier. Il était accusé en vertu de la Loi sur la Défense nationale. Les militaires doivent suivre certaines règles pour le maintien de l’ordre et de la discipline, sous peine de sanction.
Deux plaignantes avaient dénoncé le policier militaire concernant des incidents qui s’étaient produits en 2017, lors d’un déploiement en Roumanie. Joël Renaud était alors Grand Prévot, ce qui signifie qu’il était le policier en chef de la mission. Si deux plaignantes avaient été appelées à la barre, le juge n’a pas retenu le témoignage de la première et principale présumée victime, estimant qu’elle s’est contredite et qu’elle n’a pas livré un témoignage fiable.
Les faits reprochés concernant cette première plaignante, une militaire qui a aujourd’hui quitté les Forces, s’échelonnaient sur plusieurs jours et concernaient des textos à caractère sexuel, une supposée photo de pénis envoyée via message texte et des paroles offensantes comme des blagues sur les «chattes», des références à des rêves érotiques et à des trips à trois, de même que des allusions à sa «queue», soit son pénis.
Les textos ont été supprimés, de même que la photo de l’organe génital, ce qui a poussé le juge à douter du témoignage de la plaignante. Il a également remis en doute qu’une telle photo puisse avoir existé. De plus, la Poursuite n’a pas fait les efforts nécessaires pour retracer ces messages et cette photo, a ajouté le juge.
Si le capitaine Renaud était accusé d’abus de confiance et d’obstruction à la justice, c’est qu’il avait demandé à cette première plaignante d’effacer les textos compromettants. Toutefois, le juge Pelletier a reconnu que le capitaine avait fait cette demande à la suite d’ordres venus de ses supérieurs, qui voulaient que cette histoire de textos gênants soit close. À cette époque, des rumeurs circulaient au sein des troupes de la mission, concernant cette relation virtuelle à saveur sexuelle.
Le juge Martin Pelletier a acquitté le militaire de ces accusations, qui étaient les plus graves dans le dossier, estimant que le policier n’avait pas agi dans le cadre de ses fonctions et qu’il n’avait pas demandé que la plaignante efface ces messages dans le but d’entraver la justice. D’ailleurs, à ce moment, aucune enquête n’était en cours.
Il mime une fellation
Le dossier de Joël Renaud s’est corsé concernant la seconde plaignante, qui a témoigné à propos d’un geste obscène qu’il avait mimé lors d’une réunion de travail. Le militaire a d’abord fait une blague de «chatte», ce qui n’a pas été retenu par le juge comme étant un propos désobligeant, mais il a mimé une fellation à la militaire, en se léchant les lèvres et en se dandinant langoureusement.
«Il s’agit d’un incident grave. La plaignante se dit encore sous le choc, deux ans après les faits. Un officier ne devrait pas faire un geste aussi dégueulasse dans le cadre d’une réunion de travail», a déclaré le juge Pelletier.
L’autre incident pour lequel a été reconnu coupable Joël Renaud concerne une soirée en Roumanie, alors qu’un groupe de militaires se trouvait dans un restaurant. Le militaire a fait des remarques désobligeantes à l’endroit des Roumaines présentes, en parlant de leurs seins et de leurs fesses avec ses collègues.
«Il s’agissait bel et bien de remarques dégradantes envers les femmes, indignes d’un officier des Forces armées», a indiqué le juge.
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Me CANTIN EN PARTIE SATISFAIT
L’avocat de Joël Renaud, Me Charles Cantin, s’est dit satisfait des acquittements sur les trois principaux chefs d’accusation de son client, dont deux qui auraient pu se solder par de la détention, soit les chefs d’obstruction à la justice et d’abus de confiance.
« Nous allons tout faire pour lui éviter d’être rétrogradé. Je me déclare satisfait sur les trois premiers chefs, mais un peu déçu pour mon client concernant les deux verdicts de culpabilité. Les chefs d’abus de pouvoir et d’entrave étaient vraiment plus dangereux, puisque mon client aurait pu faire de la détention », a expliqué Me Cantin.
Le criminaliste s’accorde un temps de réflexion à savoir s’il va porter la cause en appel. De toute façon, il ne peut pas prendre de décision en ce sens avant le prononcé de la sentence, puisqu’il s’agit d’une cause entendue en Cour martiale et que la façon de faire y est différente.
Les parties se retrouveront le 21 janvier pour les observations sur la peine.
Un blâme, une réprimande ou une amende pourraient être une sentence envisagée, selon la défense. Il n’a pas été possible de savoir ce que la Poursuite entend plaider.
La procureure militaire a toutefois fait savoir qu’elle se dirigeait vers une autre sanction.
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UN AUTRE PROCÈS EN COUR MARTIALE
Alors que le verdict du capitaine Joël Renaud a été prononcé jeudi, un autre procès s’amorcera en Cour martiale de la Base militaire de Bagotville, lundi. Le major Éric Duquette, un membre de la Force régulière en poste à la 2e Escadre, est accusé d’agression sexuelle, d’abus de subordonné et de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline. Ces accusations découlent d’incidents qui se seraient produits entre le 1er et le 2 décembre 2018.