Acquittement partiel du policier Laurin: «Nous sommes extrêmement déçus», dit la famille de la victime

Richard Rompré et Linda Noonan ne digèrent pas l’acquittement partiel du policier impliqué dans la collision qui a tué leur fils en 2012, sur la route 148, près de Papineauville.


Dans le cadre de son deuxième procès, le policier de la Sûreté du Québec (SQ) François Laurin a été acquitté de conduite dangereuse causant la mort, vendredi.

La juge Anouk Desaulniers a toutefois déclaré François Laurin coupable d’un chef réduit de conduite dangereuse.

Selon la magistrate, la conduite du policier Laurin était bel et bien dangereuse, mais un doute raisonnable a subsisté dans son esprit quant à la responsabilité du décès.

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Lors de son premier procès, François Laurin a été reconnu coupable du chef le plus grave, soit conduite dangereuse causant la mort.

La cause, portée en appel, est revenue au palais de justice de Gatineau dans le cadre d’un deuxième procès.

Pour les parents de la victime, l’accusé Laurin a eu le temps « d’embellir son histoire », réussissant cette fois à faire germer le doute raisonnable dans l’esprit du tribunal.

La Couronne a 30 jours pour en appeler de la décision du tribunal.

Virage en U

C’était jour de RockFest, le 16 juin 2012, dans la Petite-Nation.

Éric Rompré, sa conjointe Marie-Ève Bossé et un ami circulaient sur la 148, près de Papineauville. Peu habitués à la région, les festivaliers étaient à la recherche d’une crèmerie du coin.

La victime, Éric Rompré

C’est en effectuant un virage en U, sur la 148, que leur destin a été fauché.

Le policier François Laurin filait à 181 km/h dans une zone de 90, alors qu’il répondait à un appel en renfort. Un festivalier intoxiqué par l’alcool donnait du fil à retordre à d’autres policiers.

Ces derniers avaient réussi à le menotter et à le mettre à l’arrière d’un véhicule de patrouille. Le prévenu cognait fortement sa tête sur la vitre séparant le banc arrière et les sièges des policiers.

Selon la juge, le policier Laurin n’avait pas à filer à si haute vitesse sur une route rurale, dans une période de fort achalandage.

Le policier a été téméraire, a conclu la juge Desaulniers.

Mais la magistrate a eu un doute sur sa culpabilité quant au chef d’accusation de conduite dangereuse causant la mort.

Avant d’effectuer son virage en U, le jeune Rompré aurait dû voir ou entendre la voiture conduite par le policier Laurin arriver dans sa direction, gyrophares et sirène en marche.

Le sang de la victime contenait des traces de métamphétamines, d’alcool et de cannabis.

La juge a évoqué la possibilité d’un « malheureux et tragique moment d’inattention (chez la victime) ». Même à une vitesse réduite de 120 km/h, la collision aurait pu provoquer d’importantes lésions.

Les peines applicables pour une conduite dangereuse vont de l’absolution à la prison. Les observations sur la peine seront entendues cet automne.

L’avocate du policier, Me Nadine Touma, n’a pas commenté le dossier.

Déçus

Richard Rompré et Linda Noonan en ont gros sur le cœur. « Nous sommes extrêmement déçus », ont-ils lancé à leur sortie du palais de justice.

Selon le couple endeuillé, le policier Laurin est un « expert » de ce type de situations. « Pour créer un doute raisonnable, il est un expert, dit M. Rompré. En 2003, il a pointé son arme à feu de service vers une personne sans raison valable. Il ya eu un doute raisonnable et il s’en est sorti. Il a pu poursuivre sa carrière. C’est un habitué des tribunaux. C’est un bon gars pour se créer des romans. »

La famille Rompré était plus conciliante envers lui au début du premier procès.

Richard Rompré dit avoir vu un changement de ton ces derniers mois. Les accolades de certains policiers et les mots de sympathies ont laissé la place à une attitude différente, lors du deuxième procès.

« On était (rendus) des ennemis, ils se sont comportés en goujats (de façon grossière), ils ont monopolisé tous les isoloirs (du palais de justice). Ils ont marqué le territoire (...) Ils ont pris le plancher pour montrer leur présence et ont mis une certaine pression auprès de la juge. »

Selon Linda Noonan, François Laurin n’a pas livré la même version que lors du premier procès. « Il s’est préparé. »

« Cet individu (François Laurin) n’a jamais exprimé aucun remord, a lancé Richard Rompré. je ne peux pardonner à un être semblable. »