Non, je ne suis pas allé flâner dans les bois. Je ne suis pas ornithologue non plus.
Mais mercredi, il y avait une exposition d’oiseaux à l’hôtel de ville d’Ottawa. Alors je m’y suis rendu, gai comme un pinson et sifflant comme un merle en me disant que ce sera chouette.
Sauf que ce n’était pas chouette. Mais pas du tout. C’était même… triste.
Oui, on comptait beaucoup d’oiseaux dans cette exposition. Près de 1500, m’a-t-on dit. Des roitelets, des colibris, des geais bleus, des hirondelles, des grives, des pinsons, des pics, des mésanges… alouette !
Il y avait même une bernache du Canada et un harfang des neiges. C’est beau, un harfang des neiges.
Mais celui-là était… comment vous dire ? Celui-là était moins beau, mettons. Il était mort. Congelé et mort.
En fait, tous les oiseaux de cette exposition — les 1500 oiseaux — étaient morts. Tous étendus là, au sol, sur une couverture et à la vue de tous. Une chapelle ardente, quoi. Des funérailles. Ne manquait plus qu’une envolée de colombes.
Les gens défilaient devant en secouant la tête, l’air triste et chagriné. Rien de chouette, disais-je. J’ai même quitté l’hôtel de ville avec de grands oiseaux noirs qui me chatouillaient le cœur. Comme si on m’avait coupé les ailes.
(Fin des jeux de mots. Promis…)
Ces centaines d’oiseaux ont tous été tués de la même façon. En entrant en collision avec une vitre, une fenêtre. Leurrés par le reflet des arbres dans la vitre ou par ce qu’ils voyaient à travers les fenêtres transparentes, ils sont pratiquement tous morts sur le coup.
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On dit que les collisions avec le verre tuent près d’un milliard d’oiseaux par année en Amérique du Nord. À Ottawa-Gatineau, on estime que 250 000 oiseaux périssent annuellement après s’être écrasés le bec et la tête sur une fenêtre.
L’organisme « Ailes en sûreté Ottawa », qui a organisé cette exposition d’hier à l’hôtel de ville, a répertorié 3135 collisions dans la région en 2018. C’est-à-dire que les bénévoles de cet organisme ont récupéré 3135 oiseaux tués par une collision avec le verre. Et près de la moitié de ces « victimes ailées » étaient exposées au grand public, mercredi. Pour ensuite être remis à des musées et des universités au pays.
Et les autres, demandez-vous ? Qu’est-il advenu des milliers d’autres oiseaux de la région qui sont entrés en collision avec une vitre ?
« La plupart sont dévorés par des chats, par d’autres prédateurs et par des charognards, a répondu Anouk Hoedeman, la directrice et fondatrice d’Ailes en sûreté Ottawa. Certains oiseaux réussissent à s’envoler, mais meurent ensuite de leurs blessures internes. Et ceux que nous récupérons blessés sont apportés au «Ottawa Valley Wild Bird Care Centre», dans l’ouest d’Ottawa, où ils sont soignés puis relâchés dans la nature.
«Nous ne sommes qu’une dizaine de bénévoles et nous ne pouvons évidemment pas visiter tous les édifices et toutes les résidences privées d’Ottawa, a ajouté Mme Hoedeman. Mais nous ciblons les édifices où l’on compte le plus grand nombre de collisions et nous tentons d’apporter des solutions pour en éviter d’autres. Nous tentons aussi de convaincre les élus d’Ottawa d’adopter un règlement qui obligerait les constructeurs à apporter des mesures de protection lors de la construction de nouveaux édifices. Ça fait quelques années qu’on le demande au conseil municipal, mais toujours sans succès.»
Les élus pratiquent la politique de l’autruche, quoi…
Comment éviter des collisions chez vous ? En appliquant des pellicules décoratives dans les fenêtres, en fermant les rideaux, en éloignant les plantes intérieures des fenêtres. Plusieurs solutions existent.
Pour en savoir plus long, pour signaler une collision ou pour faire un don : safewings.ca/fr ou le 613-216-8999.