À une époque où les francophones et les anglophones de la classe ouvrière se bagarraient pour des emplois, le légendaire Jos Montferrand était reconnu pour ses exploits d’homme fort et grand défenseur de ses compatriotes.
Source de fierté pour les francophones du Canada, il fut le « Maurice Richard de son époque », peut-on lire dans les archives de la Commission de toponymie de Gatineau.
À Gatineau, l’édifice Jos-Montferrand, situé au 170 rue de l’Hôtel-de-Ville, a été nommé en son honneur. Il abrite plusieurs services du gouvernement du Québec, incluant le palais de justice. La rue Jos-Montferrand, dans le nouveau quartier Zibi, porte désormais aussi son nom.
Né à Montréal le 25 octobre 1802, Jos Montferrand (dit Favre) était de la lignée des Montferrand. Son grand-père s’était établi à Montréal après la conquête de la Nouvelle-France, et y avait ouvert une salle d’escrime, selon les archives du Dictionnaire biographique du Canada.
On raconte des Montferrand qu’ils étaient taillés comme des Hercules et étaient réputés pour leur force musculaire. Jos a grandi dans le quartier Saint-Laurent ou on comptait une dizaine de salles de boxe et de nombreuses tavernes où les bagarres entre les matelots étrangers et les voyageurs étaient fréquentes.
C’est de son père, François-Joseph, que Jos apprend l’art de la savate et de la boxe. Ses dons naturels en font un fier-à-bras respecté. Dès l’âge de 16 ans, il avait déjà presque atteint la stature d’homme, mesurant six pieds et quatre pouces. Le teint clair, les yeux bleus et la chevelure blonde, il dit de lui qu’il n’avait rien d’une brute.
En 1818, il s’impose en rossant trois malotrus qui terrorisaient les gens de son quartier. Sa célébrité vient lorsque devant une foule considérable d’amateurs, il met hors combat un boxeur de la marine anglaise qui se proclamait champion.
Puis, lors de son passage à Kingston, en 1820 ou 1821, il bat un instructeur de boxe admiré par les soldats.
On disait alors de lui « qu’il frappait comme la ruade du cheval » et « qu’il maniait la jambe comme un fouet. »
Pendant plus de trente ans, il mène la vie aventureuse des hommes de chantier. On dit que Jos se complaisait dans cette vie errante qui l’amène à passer une partie de son existence dans les points chauds du Bas-Canada : les chantiers, les ports et les tavernes, là où régnait la loi du plus fort. Et où les fiers-à-bras défendaient l’honneur de leur race.
Il part ensuite pour la région de l’Outaouais où il devient cageur à l’âge de 25 ans, puis maître de cage pour Philémon Wright.
Pendant des mois, avec les hommes de chantier, il s’affaire à la coupe de bois du matin au soir sur le haut de la rivière Outaouais.
Au printemps, les bûcherons devenaient draveurs. Ils dirigeaient les billots qui étaient assemblés en train de bois et qui flottaient sur la rivière Outaouais.
À cette époque, les immigrants irlandais se trouvaient en grand nombre au pays et dans la région de l’Outaouais, si bien que les ouvriers canadiens-français devaient redoubler d’ardeur pour dénicher du travail. Les tensions étaient donc vives et les affrontements fréquents.
Sur le pont Union (des Chaudières) entre Hull et Bytown, Jos aurait saisi un adversaire par les pieds pour s’en servir comme massue afin d’envoyer plus de 150 Irlandais dans la rivière des Outaouais.
Lorsqu’il entrait dans une taverne, Jos avait aussi l’habitude de donner un coup de pied au plafond. Plusieurs tenanciers de ces établissements se vantaient d’avoir la marque de Jos Montferrand dans leur établissement.
Ces exploits deviennent plutôt rares par la suite. En 1857, Montferrand se retire à Montréal, rue Sanguinet, où il avait une résidence.
Reconnu comme le roi de l’Outaouais, il était aussi adulé dans son quartier comme un héros. Il est décédé à 61 ans dans sa demeure le 4 octobre 1864.