En écrivant ces lignes, j’ai sous les yeux la photo d’un Justin Trudeau tout sourire, accueilli comme une rock star par un groupe de danseuses dans la province de Pampanga aux Philippines. Je l’aime bien, M. Trudeau. Mais je commence à en avoir marre de le voir plus souvent dans son rôle de vedette que dans celui de chef de gouvernement.
Je ne vous parlerai pas aujourd’hui des paradis fiscaux et de l’incapacité du fédéral de taxer les Netflix et les Google de ce monde, c’est carrément scandaleux. C’est un sujet beaucoup plus terre à terre qui m’anime : comment justifier plus longtemps l’énorme disproportion entre les contrats accordés aux chantiers navals de Vancouver, Halifax et Lévis?
Si vous avez écouté l’excellent reportage de l’émission Découverte, dimanche, sur la construction du navire de ravitaillement Asterix par Chantier Davie, vous avez sans doute la même question. Cette conversion d’un porte-conteneurs en navire de ravitaillement ultra moderne et sophistiqué est une véritable prouesse. Pendant que les chantiers navals de Vancouver et d’Halifax traînent des retards et affichent des dépassements de coûts importants dans l’exécution des milliards de dollars de contrats obtenus du gouvernement Harper depuis 2011, Chantier Davie a respecté le budget et les échéances.
C’est vrai que le chantier devait faire ses preuves après autant d’années de déficits et de difficultés à remplir ses contrats. Et c’est vrai que ces difficultés ont écarté sa candidature des plantureux contrats fédéraux en 2011. Mais après le ravitailleur Asterix, le Québec est en droit de s’attendre à une meilleure part des contrats à venir de la part du gouvernement.
Le Parti libéral demande à ses députés de vanter leurs mérites? C’est de bonne guerre. Mais on aimerait les entendre également sur leurs efforts touchant l’échéancier et la répartition des contrats à venir entre les différents chantiers navals du pays. Tout le monde sait que la marine aura besoin d’un autre navire ravitailleur comme Asterix. On l’a déjà baptisé Obelix. On sait aussi qu’un rapport (Emerson) commandé par le gouvernement fédéral a statué que «les navires de la Garde côtière, dont les brise-glace nordiques, sont en service depuis 34 ans en moyenne» et ne satisfont plus aux besoins du transport maritime.
Bref, il y aura plein de besoins à combler en ce domaine au cours des prochaines années, mais le gouvernement traîne la patte dans son processus décisionnel. Que font nos députés et ministres libéraux du Québec dans ce dossier? Mes appels sur le sujet n’ont pas donné de grands résultats. Les libéraux feraient bien de s’activer, car l’opposition conservatrice à Ottawa et le gouvernement du Québec s’impatientent. Je ne suis pas ému par les pressions de l’opposition. Mais quand on me dit que 800 travailleurs de la Davie seront mis à pied sous peu à cause de l’incapacité du gouvernement fédéral à «se brancher», ça vient me chercher. Parce que des retards, c’est contre-productif et ça menace toujours l’expertise acquise.
Quant à M. Trudeau, on ne lui demande pas d’avoir l’air bête à l’étranger. Mais puisqu’il est également un député, il pourrait être un peu plus disponible de retour au pays. Parce qu’autant vous le dire, il est quasi impossible d’obtenir une entrevue avec notre premier ministre.