Voilà la question que pose un collectif d’auteurs provenant de différentes universités du pays, à la suite du rejet par une majorité de parlementaires du projet de loi privé du député néo-démocrate François Choquette le 26 octobre dernier, qui aurait fait du bilinguisme une condition essentielle pour être nommé juge à la Cour suprême du Canada.
« On se demande qui défend les langues officielles au sein du gouvernement fédéral. Il y a certes des ministres qui ont des responsabilités en matière de langues officielles, mais cela n’en fait pas des champions au sein de l’appareil gouvernemental », soulignent les neuf signataires de cette lettre, Linda Cardinal, Guillaume Deschênes-Thériault, Martin Normand et François Rocher, tous de l’Université d’Ottawa, Michel Doucet de l’Université de Moncton, Stéphanie Chouinard du Collège militaire royal du Canada, Rémi Léger de l’Université Simon Fraser, Valérie Lapointe Gagnon et Claude Couture de l’Université de l’Alberta.
« Le vote libéral du 26 octobre dernier laisse-t-il présager un abandon par le parti de ses engagements à l’égard de la défense du bilinguisme ? Seulement 17 députés libéraux ont appuyé le projet de loi. Aucun ministre n’a eu le courage de contredire son chef alors qu’un projet de loi privé n’exige pas de voter selon la ligne du parti », rappellent-ils.
Le rejet du projet de loi privé sur le bilinguisme des juges de la Cour suprême par les Libéraux « est d’autant plus étonnant et décevant », selon les auteurs, que pendant la dernière campagne électorale le premier ministre présentait le Parti libéral du Canada comme celui du bilinguisme. De plus, Justin Trudeau et Dominic LeBlanc, de même que l’ensemble du caucus libéral, avaient voté en faveur d’un tel projet en 2014 alors présenté par l’ancien député du NPD Yvon Godin.
De tous les députés présents lors du vote sur le projet de loi privé, seulement 65 ont voté en faveur alors que 43 députés étaient absents, dont plusieurs libéraux francophones incluant Darrell Samson, Paul Lefebvre ou Denis Paradis. « Comment auraient-ils voté ? » demandent-ils.
Chez les députés francophones de l’extérieur du Québec, cinq libéraux ont voté pour le projet de loi, six s’y sont opposés. « Que se passe-t-il au sein du PLC pour qu’on rejette un projet de loi si important pour la progression de l’égalité du français et de l’anglais au pays ? De toute évidence, l’influence des députés francophones au sein du parti est faible, pour peu que le bilinguisme leur tienne à cœur ».
D’autres dossiers touchant les langues officielles s’accumulent, font-ils remarquer. Qu’il s’agisse du nouveau Plan d’action pour les langues officielles « qui doit être annoncé sous peu, mais qui semble être retourné à la planche à dessin ». Puis, l’entente avec Netflix . Deux plaintes ont d’ailleurs été déposées auprès du Commissariat aux langues officielles à cet effet.
Il y a eu aussi les « tergiversations » dans le dossier du Bureau de la traduction, le « vaudeville » de la nomination du prochain Commissaire aux langues officielles, de la « désinvolture » affichée par Justin Trudeau sur le statut bilingue d’Ottawa.