Chasse aux sources au SPVG

Le journaliste Pierre-Jean Séguin, de TVA Gatineau-Ottawa, a livré son témoignage mercredi.

Le Service de la Ville de Gatineau (SPVG) a tenté de savoir qui, dans ses rangs, a pu entretenir des contacts avec trois journalistes et un animateur de la région.


Selon les informations divulguées mercredi devant la commission Chamberland par l'inspecteur du SPVG Sylvain Renaud, pas moins de 36 policiers ont été interrogés en 2013 afin de savoir s'ils connaissaient - de près ou de loin - des journalistes ou toute autre personne travaillant pour un média.

Cette enquête disciplinaire a été lancée après qu'un caméraman de TVA Gatineau-Ottawa eut été aperçu sur les lieux d'une opération visant à mettre la main au collet d'un suspect lié à une vague de vols à main armée, Anthony Parker.



Liste des numéros de téléphone de journalistes recueillis par le SPVG.

Les policiers interrogés devaient notamment répondre à la question suivante : « Est-ce que tu connais quelqu'un qui travaille dans les médias ou tu fais une activité sportive ou sociale dans laquelle tu côtoies quelqu'un des médias ou tes enfants font une activité avec les enfants de quelqu'un qui travaille dans les médias ou quelqu'un des médias vit dans ton voisinage ?».

L'inspecteur Renaud a reconnu avoir voulu ratisser « large ». L'enquête cherchait aussi à savoir si les policiers dénonceraient la personne à l'origine d'une fuite médiatique s'ils connaissaient son identité, et s'ils avaient « une idée sur qui pourrait avoir parlé aux médias ». L'objectif était également de « mettre une pression » et d'« instaurer une crainte » chez les policiers, a admis le représentant du SPVG, qui a précisé qu'aucun mandat n'a été obtenu pour effectuer quelque forme de surveillance que ce soit sur des journalistes.

Appelé à témoigner en après-midi, le reporter Pierre-Jean Séguin a révélé que la présence de TVA lors de l'opération policière était « le fruit du hasard », que personne ne l'avait informé « d'aucune façon » de ce qui allait se tramer sur le boulevard Saint-Joseph, le 19 juin 2013.

Un document contenant les numéros de téléphone de M. Séguin, des journalistes du 104,7 Outaouais Éric Charron et Mathieu Locas et de Louis-Philippe Brulé, animateur à la même antenne, a aussi été déposé devant la commission. Ces numéros, obtenus auprès « du service des communications », ont été utilisés pour vérifier si des recoupements pouvaient être faits avec les registres téléphoniques de policiers.



« On va s'arrêter où ? a questionné Pierre-Jean Séguin. Et le public là-dedans ? Le public a le droit de savoir. »

Il a aussi été possible d'apprendre lors du témoignage de M. Renaud devant la Commission d'enquête sur la protection de la confidentialité des sources journalistiques que le SPVG a tenté de savoir qui avait pu informer M. Séguin des détails d'une « technique d'enquête spéciale » ayant fait l'objet d'un reportage à l'hiver 2016. La possibilité de mettre M. Séguin sous filature a été évoquée, mais l'inspecteur Renaud dit avoir « accusé une fin de non-recevoir immédiatement ».

L'enquête pour trouver l'origine de la fuite a été mise de côté en raison d'une « trop grosse charge de travail », mais « chaque fois qu'il y a eu des fuites dans les médias par la suite, nous les avons notées dans ce dossier pour tenter de faire des recoupements éventuels », écrit le chef Harel. 

Aucune accusation disciplinaire n'a été déposée au terme de ces enquêtes internes.