Certaines font sourire. D'autres arrachent une larme ou deux.
Des coureurs élites batailleront pour des bourses. Pendant ce temps, un voisin ou un collègue de travail enfilera ses espadrilles en quête d'une victoire personnelle.
Martin Jarry retiendra l'attention samedi au départ du 10 km. Atteint d'une maladie rare et débilitante, ce policier de la Sûreté du Québec, qui a servi en Outaouais de 1993 à 2000, a reçu la permission des organisateurs de courir avec l'aide d'un exosquelette robotisé.
Les enfants de son quartier à Montréal, où il habite maintenant, l'ont surnommé « Robocop ». Un clin d'oeil au populaire film.
Ça fait rire Jarry. « Quand je cours, ça fait le même bruit », avoue-t-il en parlant de l'appareil conçu par l'entreprise québécoise B-Temia.
« Ça attire l'attention des gens. Ça les impressionne. »
C'est le but à Ottawa, lieu de sa première course en carrière. Le père de famille âgé de 47 ans ne cherche pas à gagner. Au contraire.
« C'est plutôt de faire connaître la maladie qui m'afflige. La plupart des gens qui en sont atteints ne peuvent plus courir. Ils sont en fauteuils roulants. »
Jarry souffre de la myosite à inclusion, dont la cause demeure encore inconnue. Près d'une personne sur un million en serait atteinte. Aucun remède n'existe.
Dans son cas, il s'avère la plus jeune victime au pays. Habituellement, ce sont les personnes âgées de la soixantaine qui reçoivent pareil diagnostic.
Le système immunitaire se trompe et s'attaque aux tissus normaux de la personne. Ce qui mène à la destruction rapide des muscles et un décès prématuré.
« On me donne une espérance de vie de 12 à 15 ans. Ça va m'amener dans un fauteuil roulant. Ça va m'amener ensuite des problèmes pulmonaires et je ne pourrai éventuellement plus manger. »
Le verdict est tombé au printemps 2016 pour Martin Jarry.
Déjà en un an, les dégâts sont déjà visibles et trop réels pour ce sportif qui jadis « montait 20 étages trois fois par jour et les descendait trois fois aussi » à son lieu de travail. Maintenant à la maison, ça lui arrive de débouler les escaliers.
« Souvent, je dois soulever une de mes jambes à l'aide d'une de mes mains afin de monter dans le véhicule », raconte-t-il.
Ses triceps ont fondu. Il les compare maintenant « au gras qui pend aux bras des grands-mamans. Je ne suis pratiquement plus capable d'effectuer des push-ups », dit-il.
C'est pourquoi l'exosquelette est nécessaire afin de lui permettre de courir. « Une technologie incroyable », précise Jarry.
« Ce n'est pas un robot. C'est vraiment toi qui décides ce que tu fais. Il y a des capteurs sur toi. Si tu veux aller à gauche, tu vas à gauche. Ça te facilite les mouvements. Ça ne peut pas partir en fou. »
On ne le verra pas finir par les premiers.
Encore une fois, Martin Jarry répète que l'objectif n'est pas de remonter le peloton. « Je pars dans la dernière vague », indique-t-il.
Ce dernier veut donner de la visibilité à Myosite Canada, et lui permettre d'amasser des fonds. C'est la première fois que l'organisme est inscrit au défi caritatif Banque Scotia de la Fin de semaines des courses.
Jarry ne sera pas seul à prendre le départ. Une vingtaine de policiers vont courir avec lui. Deux médecins aussi. Même chose pour son garçon Loïc, âgé de 16 ans.
Sa fille de 11 ans et sa conjointe seront sur les lignes de côté. « Ils seront habillés en homme sandwich avec ma photo », souligne Martin Jarry, touché par le geste des deux femmes les plus importantes dans sa vie.
Son histoire du gars qui perd ses muscles, mais qui tient à courir avec l'aide d'un exosquelette fait le tour du web. Elle lui a valu courriels et appels de gens atteints de la même maladie que lui. Tiens, il y a cet avocat de la Belgique.
« Il a vu l'appareil. Son rêve est de plaider une cause debout. Tu sentais la fébrilité dans sa voix lors de notre conversation. »
C'est ça aussi le message de Martin Jarry. Qu'il y a enfin un peu d'espoir pour les gens dont la vie est bouleversée par la myosite à inclusion. « En t'entraînant, tu peux peut-être ralentir le processus. Je ne suis peut-être pas plus fort qu'il y a un an. Mais je suis plus en forme », lance-t-il.
Et le moral se porte mieux pour Robocop dans sa bataille contre cette saprée maladie.